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Béhi ministre contre Béhi agriculteur

C’est une position intenable qu’est celle de l’actuel ministre tunisien du Commerce. A peine quadra après la Révolution, le jeune ingénieur de l’INA et docteur de Montpelier Omar El Béhi, a occupé des postes de responsabilité à l’Union tunisienne de l’agriculture et de la pêche (UTAP), dont ceux de trésorier et de vice-président, chargé de la production animalière.

Septembre 2015, col de chemise ouvert et cheveux en bataille, il prenait sa nouvelle fonction très à cœur et défendait encore avec véhémence les agriculteurs, corporation dont il est membre, puisqu’il est céréaliculteur. «Les agriculteurs sont dans une situation très difficile. Leurs situations financières sont périlleuses et ils n’ont aucune perspective», disait-il alors au micro d’une radio privée.

Quatre années plus tard, il est en aval du système agricole, dans les rouages du commerce, une activité qui a été de tous temps accusée de s’enrichir sur le dos des agriculteurs. Vendus dans les circuits officiels de distribution, comme les marchés de gros, à bas prix par les agriculteurs et les pêcheurs notamment, leurs produits se retrouvent quelques heures plus tard, refilés à des prix exorbitants sur les étals des commerçants.

Retour à septembre 2015. Très concret, le membre de l’organisation agricole Omar El Béhi évoquait au micro d’une radio privée l’exemple des pommes de terre. «Que fait l’Etat lorsque le prix des pommes de terre augmentent ? Il en fixe le prix. Le ministère du Commerce devient ainsi celui qui met le plus de bâtons dans les roues du secteur agricole», disait-il avec force gesticulation. Il était alors syndicaliste et défendait directement son pain.

Quatre années plus tard, il se retrouve à défendre l’importation par le gouvernement dont il fait partie, de grandes quantités de pommes de terre. Le même Omar El Béhi, passé de l’autre côté du spectre, s’en explique le 27 mai 2019, sur une radio privée. Le ministre El Béhi fait alors part d’un déficit, «structurel» dit-il et selon des chiffres du ministère de l’Agriculture, de 30.000 tonnes en pommes de terre, pour expliquer l’importation par l’OCT (sous tutelle du ministre) pour réguler le marché.

Le 30 mai 2019, son collègue ministre de l’Agriculture et devant celui qui préside l’Utap où Béhi officiait, répond que «nous n’avons jamais parlé de déficit structurel en matière de pommes de terre». Plusieurs producteurs de ce tubercule, de cultures estivales et de volailles ont organisé un rassemblement de protestation, mardi 28 mai, devant le siège du ministère du Commerce pour dénoncer les décisions du ministère en matière d’importation. Devenu ministre, l’ancien agriculteur, essuiera la colère de ses anciens collègues.

Retour sur la question du lait. Décembre 2018, El Béhi est désormais ministre, qui plus est du commerce, le même portefeuille qu’il accusait de tous maux de l’agriculteur. Interrogé par Africanmanager sur la crise chronique du secteur du lait, il dira que «les difficultés sont exagérées».

Quelques années auparavant, en 2015, il évoquait le cas du litre de lait, évalué après études à 850 millimes. Il est vendu à 736 millimes par l’agriculteur. «Nous sommes pour la compensation au profit du citoyen, mais pas aux dépens de l’agriculteur», dit-il comme un vrai syndicaliste.

Devenus ministre, l’ancien syndicaliste n’arrive pas, comme tous ceux qui l’ont précédé, à trouver une solution pérenne, aux questions endémiques du lait et de la pomme de terre. Toujours pas de solution, non plus, pour rapprocher les intérêts des agriculteurs de ceux des commerçants.

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