AccueilLa UNEBTL, une banque malade mais qui se soigne

BTL, une banque malade mais qui se soigne

«Les bilans financiers, clôturés le 31 décembre 2018, mettent en exergue un total de fonds propres de 72,082 MDT après soustraction de la participation de la BTL dans le capital de la NAIB (North Africa International Bank) d’une valeur de 29,254 MDT. En conséquence, les fonds propres de la BTL ne représentent que 6,3 du total des engagements de la BTL, et ne permettent donc pas à la banque de respecter le ratio de solvabilité (Ndlr : adéquation capital/risques) qui est de 10 %, ainsi que les ratios prudentiels relatif à la répartition des risques-clients, requise par la BCT. Il convient de rappeler que, sans tenir compte des 300 % de dépassements (434 MDT), le ratio de solvabilité se situe à 10,2 %. Nous avons aussi remarqué, une baisse importante, à 37,1 %, du ratio de liquidité contre les 90 % requis. Cette situation pourrait faire subir à la banque les sanctions prévues par les circulaires, 2018-06 et 2014-14». C’est ce que disent de cette banque mixte tuniso-libyenne qui vivait surtout du commerce entre les deux pays, ses propres commissaires aux compte. On marche sur la tête ! Une banque qui ne respecterait pas autant de ratios, serait presqu’inconcevable. Et pourtant, explication il y a et son DG tunisien bardé de diplômes prestigieux, Zouheir Ouakaa, n’en manque pas.

  • Ouakaa s’explique et explique

Dernier DG, Tunisien, en place depuis le 14 juin 2017, Zouheir Ouakaa est issu de l’université Jussieu Paris7, titulaire d’un MBA en Business administration de JP Morgan où il avait occupé le poste de vice-président pendant 10 ans. Le quinquagénaire a aussi été vice-président senior de la Gilford Securities à NY et Chief Business Officer à la QNB.

Il commence, d’abord, de remarquer que «peu de banques de la place respecteraient tous les ratios prudentiels de la BCT, vu l’absence de liquidités sur le marché. Il y a quelques ratios qui sont respectés et d’autres qui ne le sont pas. La BTL respecte, par exemple, le LTD (Loan to deposit). Cueillis au dépourvu, on était à 260 % en 2017, on est désormais à 200 %». Et lorsqu’on lui argue que la banque pourrait, peut-être, avoir investi plus qu’elle n’en a les moyens, pour expliquer cette défaillance dans les ratios du «capital adequacy» et de la liquidité, il nous oppose la thèse du verre à moitié plein et du verre à moitié vide. «Je vous explique. Pour tout ce qui est engagements, il faut rappeler qu’on a été acculés, en 2005, à accorder des crédits, plus ou moins politisés et qui sont au-dessus des moyens de la BTL». Son DG cite en exemple le dossier Carthage Cement où elle aurait mis 20 MDT pour des fonds propres de 70 MDT pour la BTL. Et Ouakaa d’ajouter que «j’estime qu’il y a eu aussi d’autres dossiers politisés, comme celui de Bizerte-Cap 3000 et d’autres, où la banque avait pris part à concurrence de 10 MDT et 15 MDT».

Rattrapé, certainement, par l’obligation de réserve à propos d’autres dossiers, dits politisés, le DG de la BTL esquive adroitement et passe à autre chose. «En fait, vous êtes venus nous voir au moment idéal. Le Conseil d’Administration s’était réuni le 18 juin et avait déjà décidé une augmentation du capital de la banque, car la BTL est une banque sous-capitalisée et tout ce que vous voyez est la conséquence de cette sous-capitalisation». Et d’expliquer encore que «vous ne pouvez alors plus donner de crédits. Donc vous ne pouvez plus accepter les dépôts, ce qui vous met dans une position difficile. Le tout, à cause d’une législation tunisienne qui impose à la banque qu’elle ne peut accorder que 5 % de ses fonds propres en crédits». 

  • La BCT refuserait le Swap, Devises/Dinar !

Décryptage, la BTL ne peut s’engager au-delà de 3,5 MDT pour des fonds propres de 70 MDT. Un plafond, jugé très handicapant, même pour financer le commerce extérieur tuniso-libyen. Et Zouheir Ouakaa de piocher encore plus dans les handicaps qui entravent l’expansion de sa banque, en rappelant l’arrêt, ou presque, des échanges tuniso-libyens à cause de la conjoncture sécuritaire. «Avant, on faisait un chiffre d’affaires de presque 2.000 MDT. Aujourd’hui on fait entre 200 et 300 MDT, avec une commission de quelque 0,5 %».

Et le DG de la BTL, dont les affaires se font en devises, de révéler que «nos dépôts, et ils sont assez conséquents, sont en devises étrangères que nous transformons, par Swap avec la BCT, en Dinars tunisiens. Or, la BCT a décidé de ne plus accepter ces opérations de Swap, avec beaucoup d’autres banques de la place, comme l’ABC qui est dans le même cas que nous». Une information, quelque peu intrigante, dans un pays où les réserves en devises sont en déclin et qui devrait, en principe, en rechercher et non en refuser. La réponse pourrait-être dans le manque de liquidité. Et le problème pourrait être que cette liquidité circule dans l’économie souterraine !

En attendant, et même si la BTL cherche à sortir de l’état où elle est et à se soigner, la dernière réunion de son conseil d’administration a, certes, décidé d’augmenter le capital, mais sans pour autant encore décider du montant de cette augmentation. «Autant les autorités libyennes pourraient aisément le faire, la situation en Tunisie ne le permet pas de le faire avec autant de facilité», explique à Africanmanager le DG de la banque.

Retour donc au point de départ, qui est quoi et comment faire pour éviter que la situation financière de la BTL ne se dégrade. En réponse, Zouheir Ouakaa tient d’abord à mettre certains points, qu’il juge essentiels, en exergue. «Nous aurions pu facilement finir 2018 avec un bénéfice de 1 ou 2 MDT. L’actuelle direction de la banque a cependant décidé de ne plus faire du Window-dressing [Ndlr : pour éviter de dire du maquillage des chiffres]. C’est-à-dire, faire une consolidation des comptes de certains clients en difficultés, pour atténuer le niveau des pertes et s’engager ainsi dans une fuite en avant». Ceci expliquerait aussi les 14 MDT en provisions (6 pour Ciment de Carthage, 3 pour Cap 3000 et une autre provision pour un projet de briqueterie à Taj El Agareb, initialement destiné à l’exportation en Libye).

  • Retour en courbe ascendante en 2019

Pour l’avenir de la BTL, son DG reste optimiste. «Pour 2018 et 2019, tous les indicateurs, hormis ceux relatifs aux capitaux, sont positifs. Les dépôts ont augmenté de 100 %. Le recouvrement a réalisé un record de 17 MDT. On fera donc reprise de provision de 15 MDT en 2019, un exercice qu’on pourrait terminer avec un bénéfice de 5 à 6 MDT, selon le niveau de provision qu’on fera», précise Zouheir Ouakaa. Le DG évoque, aussi, une nouvelle stratégie adoptée par la banque. «N’étant plus en mesure d’investir, nous ne travaillerons plus autant sur le crédit, restant comme en 2018 au niveau de 385 MDT pour rester dans un LTD positif. On va mettre le paquet sur le règlement des dossiers contentieux, et sur le recouvrement et nous serons nettement plus rigoureux et plus stricts, en termes de choix des risques. En attendant, les dépôts ont atteint les 500 MDT après seulement 250 MDT».

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