La dernière vague de la pandémie de Covid-19 a de nouveau mis a nu l’état de l’infrastructure sanitaire tunisienne, et l’a placée sous la lumière crue de l’indigence, notamment à Kairouan.
C’était en 2019 sous le gouvernement de Youssef Chahed. Abderraouf Chérif, alors ministre de la Santé, déclarait que les travaux du CHU de Kairouan démarreront « en janvier 2019 avec cet investisseur dont l’argent est déjà prêt, pour être livré en 2021 » et énumérait un certain nombre d’autres infrastructures sanitaires toujours à Kairouan. Il n’en sera rien !
Quelques années plus tôt, fin novembre 2016, au cours du Forum 2020 et toujours sous Youssef Chahed, un haut responsable saoudien annonçait à Tunis « un don de 100 MUSD, dont 85 MUSD seront consacrés à la construction d’un hôpital pluridisciplinaire à Kairouan (…) ». On ne sait pour quelle raison aussi, le projet restera lettre morte, et l’argent des Saoudiens, simple promesse qui n’avait engagé que ceux qui y ont cru, ou détourné comme d’autres fonds pour combler les déficits des budgets de l’Etat.
Plus tard, en juillet 2020, la présidence de la République tunisienne annonçait le « lancement de la 2ème phase du projet de la cité médicale à Kairouan » avec un luxe de détails sur un projet qui n’avait manifestement pas encore démarré. En effet, le 27 février 2021, le même chef de l’Etat se déplaçait dans la région de « Menzel Mhiri » à Kairouan, dont les images montraient un terrain encore nu de tout début d’infrastructure et sans même aucun signe de lancement de travaux, pour le même projet. Nous sommes désormais ainsi au 2ème gouvernement de l’après Chahed, sans que le projet d’un CHU à Kairouan n’arrive à voir le jour. Pourquoi ?
D’abord, parce que ce projet, s’il a été une idée tunisienne et plus précisément de l’ancien chef d’Etat Feu Béji Caïed Essebssi (BCE) qui en avait pu convaincre le souverain saoudien, n’a jamais été imaginé pour être financé par l’Etat tunisien. Ce dernier n’en avait pas les moyens. Le financement devait en effet, selon des sources sûres qui préfèrent garder l’anonymat, être un projet clé en main purement saoudien.
Les Saoudiens avaient annoncé un don de 85 MDT, mais qui devaient financer un projet, conçu et réalisé par les parties que le bailleur de fonds saoudien choisirait lui-même, et la première pierre devait en être posée à l’occasion de la visite du souverain saoudien en Tunisie pour les besoins des assises de la Ligue arabe.
Le décès de BCE, et des problèmes administratifs et fonciers, ont fini par enterrer le projet de CHU de Kairouan. Le financement saoudien devant géré directement par le bailleur de fonds, n’a ensuite pas été versé, et le projet abandonné.
En second lieu, il faut noter que l’ancien projet saoudien et le nouveau mégaprojet de la cité médicale de Kais Saïed sont deux projets différents. Celui du chef de l’Etat semble être, selon nos propres informations et en l’absence de tout canal de communication avec la présidence de la République, semble être l’un des projets du ministère de la Santé pour une sorte de ville médicale dans les environs de Tunis.
Le ministère de la Santé en aurait été « dépossédé » et le projet a été remis entre les mains des militaires, avec décision du chef de l’Etat de le délocaliser à Rakkada à Kairouan, ce que notre source estime irréalisable.
Le chef de l’Etat, qui n’en a jamais révélé les moyens de financement, croyait certainement ainsi le mettre hors de tracasseries administratives. On est bientôt en juillet 2021, date à laquelle la présidence parlait du lancement d’une seconde étape, et le projet du chef de l’Etat fait son petit chemin cahin-caha, sans que l’on voie l’ombre d’un mur ou qu’on entende le bruit d’une pelleteuse.