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Des élections anticipées. Est-ce une bonne idée?

A mesure que la crise s’envenime, l’échiquier politique ne donne pas l’impression d’être à court d’idées-bonnes et moins bonnes- pour tenter d’extirper le pays  du bourbier dans lequel il s’enfonce depuis  une décennie et plus encore depuis cette guérilla à laquelle se livrent les tenants des deux pouvoirs, exécutif et législatif. Il y a ceux qui tournent au tour du pot et jouent la montre et ceux qui vont à visière levée vers le but, de peur d’être rattrapés par le temps et voir leurs projets expirer avant leur mandat.

Et c’est de ce capharnaüm que vient d’émerger de nouveau l’idée, ou plutôt l’ardente résolution, de tenir des élections anticipées comme panacée à une crise politique qui n’a que trop duré , frappant de paralysie l’appareil de l’Etat autant que le service public  et laissant en jachère et la merci d’une variété d’impondérables et de contingences des pans entiers de citoyens dont des centaines sont quotidiennement fauchés par l’insoutenable pandémie du coronavirus.

Un scrutin avant terme qui serait le point d’orgue d’un ensemble de réformes constitutionnelles et législatives qui auront été soumis au préalable à référendum.Voilà l’idée qui tarauderait sans cesse le chef de l’Etat et dont le secrétaire général de l’UGTT, Noureddine Taboubi, s’est fait l’écho  dans une interview diffusée par une chaîne de télévision privée. Y figure une bonne place l’adoption d’une  version amendée de la première constitution de la Tunisie  promulguée en 1959, en lieu et place de la Loi fondatrice de la 2ème République de 2104, à soumettre  un référendum populaire.

Le président de la République lui-même n’en a pas pipé mot dans ses nombreuses interventions, mais on a compris le fin fond de sa pensée quant il a préconisé, mardi dernier,  un dialogue sur la création d’un nouveau système politique et l’amendement de la constitution de 2014, qu’il a qualifiée de loi fondamentale  » verrouillée de partout. » Il est plus qu’essentiel de  rappeler à cet égard que la constitution de 1959, adoptée sous le règne du premier président Habib Bourguiba, prévoit un système  présidentiel, tandis que la constitution de 2014 fait pencher la balance en faveur du parlement et partage les pouvoirs exécutifs entre le président et le premier ministre.

Le scénario d’élections générales anticipées en Tunisie est devenu plus que jamais une option probable, compte tenu de l’impasse politique actuelle, mais nombreux sont ceux qui estiment qu’un    retour à la constitution de 1959 est loin d’être envisageable au vu des réactions négatives que l’idée a suscitées jusqu’à présent. En début de semaine, l’idée d’un dialogue national a également été évoquée, avant que les tensions politiques ne s’aggravent à nouveau, réduisant à néant les espoirs d’un éventuel accord, Saied aurait insisté pour que la priorité soit donnée à une révision du système politique, ce qui a provoqué la colère des principaux acteurs politiques du pays et suscité des appels à des élections générales anticipées , comme celui lancé par l’UGTT, dont un membre du Bureau  exécutif, a déclaré que « le syndicat a une dernière option, qui est celle des élections générales anticipées pour résoudre la crise actuelle, et le peuple l’imposera. »

Des réactions réservées

L’appel à des élections anticipées est également accueilli avec des réserves par de nombreux acteurs politiques, y compris les islamistes. Le porte-parole d’Ennahdha, Fethi Ayadi, a exprimé le soutien de son parti à l’appel de l’UGTT à des élections anticipées en cas d’échec du dialogue national.

Cependant, certains partis politiques tunisiens estiment que la nouvelle position d’Ennahdha sur les élections s’inscrit dans le cadre de la surenchère de Saied, qui a récemment exprimé son mécontentement à l’égard de la constitution actuelle et du système de gouvernement. Il en est ainsi du parti Attayar dont le  porte-parole, Mohsen Nabti a  affirmé  que « la position d’Ennahdha sur les élections s’inscrit dans le cadre de la surenchère du président de la République. Ils voulaient lui dire : Si vous voulez  des élections anticipées, laissez partir tous les responsables du système actuel, dans le but de brouiller toute la situation. » Nabti a ajouté : « La solution commence par le départ de ces gens du pouvoir, car ils ne sont pas qualifiés pour diriger l’État pour une autre mandat. Le pays connaît un effondrement complet aux niveaux économique, sanitaire, politique et social. » Le relayant, le député du même parti, Ziad Ghannai, a déclaré à The Arab Weekly : « La transition démocratique est au point mort depuis quatre ans. La révision des lois et la mise en place d’institutions constitutionnelles ont marqué le pas et des crises ont balayé la plupart des institutions. »

Ghannai a ajouté que « la tenue de nouvelles élections est une idée importante », mais il a précisé que « les instances constitutionnelles doivent être mises en place, la loi électorale doit être modifiée, le processus électoral ajusté et d’autres mesures doivent être prises pour assurer le succès des élections anticipées. Si elles sont organisées, ces élections peuvent remettre la transition démocratique sur les rails.  » D’autres acteurs politiques ne sont pas enthousiastes à l’idée d’élections anticipées, car elles coûteront des millions de dollars à un pays à court d’argent et risquent de reconduire les mêmes figures au pouvoir.

Les experts ne sont pas en reste. Commentant la préconisation d’un amendement à la constitution la constitutionnaliste Salsabil Klibi a déclaré qu’un amendement ne serait pas possible en l’absence d’une Cour constitutionnelle.

« Abandonner la constitution et procéder, comme le propose le chef de l’État, à un modèle transitoire représente un danger pour le pays. Des questions se poseront sur la légitimité du processus. Ensuite, le succès d’une telle démarche n’est pas garanti car il faudra un consensus général », a-t-elle expliqué.

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3 Commentaires

  1. Il est difficile d’avoir un consensus général mais plutôt la majprité qui s’exprime sur les nouvelles mesures. Depuis plus d’un an, nous réclamons des élections anticipées car les tubniens n’ont plus confiance à ces députés en querelle tout le temps, pas deprojet pas de travail et même le Président de l’assemblée n’a pas les compétences pour diriger les plénières, il est tout le temps absent et bénéficie d’un haut salaire qui ne justifie pas la prestation fournie.

    Nous avons perdu beaucoup de temps et nous allons encore perdre du temps si on accélère pas l’organisation des élections anticipées. Pour la constitution, il faudra passer par un référandum afin d’impliquer les tunisiens dans le choix du régime et de la cnstitution, faire vite et faire bon.

  2. Les mêmes causes produiront les mêmes effets.
    Les élections anticipées ne résoudraient aucun problème et pourraient aboutir à la reconduction de la même classe politique, incompétente et médiocre, à moins qu’il n’y ait avant leur organisation, une modification de la loi électorale (surtout éviter la farce des « grands restes ») et l’établissement d’un seuil électoral pour éviter une assemblée éclatée en 1000 morceaux inconciliables.

  3. « Un amendement ne serait pas possible en l’absence d’une Cour constitutionnelle. » dit la constitutionnaliste Salsabil Klibi. Ceci est faux, car la constitution de 2014 a été adoptée en l’absence de la cour constitutionnelle .

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