AccueilLa UNEEnnahdha aux abois, condamnée à la fuite en avant

Ennahdha aux abois, condamnée à la fuite en avant

Entre vendredi et samedi, Ennahdha nous a presque fait vivre l’enfer : le 1er jour, le parti islamiste faisait lire aux imams de Bizerte un prêche sous forme de communiqué signé par l’association des imams des mosquées appuyant Mohamed Morsi en Egypte et menaçant le mouvement « Tamarroud « en Tunisie. Le 2ème jour, samedi , il donnait libre cours au très autorisé dirigeant Sahbi Atig ( chef du groupe parlementaire d’Ennahdha à l’ANC , et très proche de Ghannouchi ) ,de menacer ceux qui piétinent la légitimité dans le pays et tuent la volonté du peuple d’être, à leur tour, piétinés et la rue tunisienne sera autorisée à en faire ce que bon lui semblera (youstabahouna).

Les observateurs ont vu dans ces gestes de désespoir des indices probants qu’Ennahdha puisse commettre l’irréparable pour se maintenir au pouvoir et soutenir ses alliés régionaux.

Ce virage aux conséquences imprévisibles est l’aboutissement d’un exercice calamiteux du pouvoir, dont le parti islamiste ne paraît pas saisir toutes les répercussions.

En fait, les torts que tout le monde impute à Ennahdha sont multiples et paraissent de plus en plus irrémédiables, mais ils trouvent racine dans les conceptions qu’elle adopte, et qui ne cadrent pas avec les exigences de la démocratie et des spécificités du pays.

Les deux exigences : adhésion à la démocratie et respect des spécificités sont les deux clés de la réussite dans la période transitoire. L’adhésion à la démocratie doit se faire de manière réfléchie et systématique : sans faille ni tricherie, la démocratie étant une philosophie et non pas seulement des lois et des institutions. Le respect des spécificités culturelles, politiques et en matière de développement de chaque pays , doit se faire également de manière scrupuleuse ,car seules ces spécificités témoignent du degré de maturité des peuples et des progrès des pays en question, prenant valeur de paramètres consacrant leur singularité et donnant un contenu spécifique aux programmes de développement et fixant le timing de leur réalisation avec l’efficacité voulue .

Les théories supranationales, qui rapprochent, dans ce chapitre, l’islamisme du communisme, ont toujours négligé ces spécificités. Et il ne paraît pas que le nouveau venu (l’islamisme) soit en mesure de saisir les enseignements de l’expérience négative de son prédécesseur (le communisme) qui a imposé des stéréotypes au sujet des formes de révolution et des projets de développement pour les pays du bloc communiste . Des révisions ont été introduites depuis la chute du mur de Berlin, et la littérature se rapportant à ces expériences est abondante, mais l’islam politique ne veut ni prendre cette expérience humaine en considération, ni en tirer les enseignements qui s’imposent.

L’islamisme qui s’est toujours présenté comme une des alternatives aux choix politiques et de développement à caractère international, est en train de tomber dans le même piège. Certes, il brandit l’enseigne de la spécificité islamique ,par rapport à la donne mondiale , mais il ne daigne pas aller jusqu’au bout pour reconnaître d’autres spécificités sous-jacentes qui ont donné , à travers le temps , substance et forme à des identités intermédiaires et fini par s’accorder avec les contours des Etats-Nations qui ont émergé depuis les siècles , et ont pris forme depuis les indépendances .

Les peuples de la région qui ont toujours revendiqué une dimension religieuse, culturelle et civilisationnelle de leur identité, sont restés jaloux de leur spécificité et des acquis qui en émanent.

Au lieu de se conformer à ce cadre identitaire à deux dimensions , les islamistes d’Ennahdha ,et surtout leur chef Rached Ghannouchi, ont cherché à prouver que la Tunisie n’est différente en rien de n’importe quel pays musulman ,et les différences qui peuvent exister sont le fait de la pénétration occidentale rendue possible par les gouvernements successifs depuis l’Indépendance , et il est temps de les faire disparaître , et ne plus les mettre en valeur , ne pouvant être que le résultat d’une déviation imposée au peuple contre son gré .

Et c’est par ces conceptions que nous pouvons expliquer l’immixtion d’Ennahdha dans les affaires internes d’Egypte en soutenant une partie du peuple égyptien (Morsi et les frères musulmans ) dans leur lutte contre une autre partie du même peuple , comme cela a été le cas en Palestine ( appuyer Hamas contre l’Autorité palestinienne ) et en Syrie ( souffler sur les braises de la guerre civile ) ,etc.…

Pour ce qui est du deuxième volet la démocratie, le parti islamiste n’a pas l’air d’y adhérer de manière délibérée et systématique .Ennahdha entretient toujours des rapports flous avec la violence et ceux qui la pratiquent, fait le mélange entre politique et religieux, veut saper la neutralité de l’administration en l’envahissant en y plaçant ses inconditionnels, et fait un usage excessif et inconsidéré de la règblede la majorité qui lui est acquise au sein de l’ANC , seule institution représentative .

Ce sont là des signes qui ne trompent pas et qui révèlent que le parti islamiste n’est pas en train de faire son apprentissage de la démocratie, ni saisir ce qui fait la spécificité du cheminement politique et en matière de développement et de transition démocratique de la Tunisie. Ces deux manquements sont à l’origine de tous les échecs d’Ennahdha. Mais le parti islamiste , au lieu de faire amende honorable, préfère maintenir le cap , et ne trouve , de ce fait , de solution aux problèmes générés par ces choix pernicieux que la fuite en avant que soulignent les déclarations de Sahbi Atig de Samedi , et le prêche des imams de Bizerte, vendredi .

Aboussaoud Hmidi

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