AccueilLa UNEGouvernement : Ennhahdha prend ses aises avec la Constitution. Jemli peut-il revoir...

Gouvernement : Ennhahdha prend ses aises avec la Constitution. Jemli peut-il revoir sa copie ?

Le parcours du chef du gouvernement désigné Habib Jemli, depuis qu’il a été pressenti pour la Primature a été une enfilade d’écueils et de vicissitudes où une crise en chasse une autre et un contretemps  en déloge un autre plus funeste. Les Tunisiens se sont pris à pousser un soupir de soulagement quand le locataire sporadique de Dar Edhiafa a annoncé qu’il avait en poche la liste du gouvernement qu’il avait mission de former, mais ils ont vite déchanté à la vue d’un casting expédié en cinq-sept, quelque part à la diable mais souvent sous la pression des partis politiques , et surtout du premier d’entre eux, nommément le mouvement Ennahdha.

C’est que la composition livrée ne trouvait pas grâce à ses yeux, ni d’ailleurs à ceux de bien d’autres. Sauf que, en se défendant de s’en offusquer, il faisait mine de ne pas s’ingérer dans les affaires du chef du gouvernement désigné tout en se livrant à des manœuvres dilatoires qui ne disent pas leur nom. D’abord, en s’exceptant de tenir dans la foulée et sans plus tarder la séance plénière dédiée au vote de confiance, dont la date a été fixée au 10 janvier, pour ensuite faire l’objet d’une proposition de renvoi au 14 du mois courant, invoquant le prétexte que « l’on est encore dans les délais constitutionnels ». Ensuite, la nécessité déclarée ou suggérée pour Jemli de revoir sa copie et remplacer des membres de son gouvernement qui n’auraient pas l’heur de rentrer dans les grâces des partis de la prochaine majorité. Là encore, on retrouve le mouvement Ennahdha qui , sans exiger que des noms soient changés pour avoir fait l’objet de critiques et de réserves émises d’ici et d’ailleurs, souligne «  l’importance pour Jemli d’être attentif à tous les points de vue, comprendre les positions de tous les groupes parlementaires et faire des remises en question dans ce sens ».

Une « étape irréversible »

Seulement, l’on feint d’ignorer l’esprit de la Constitution s’agissant de l’opportunité de modifier la composition du gouvernement alors même qu’elle est déjà sur le bureau du Parlement, dûment envoyée par le président de la République. Le constitutionnaliste Abderrazek Mokhtar, affirme qu’elle est rigoureusement inconstitutionnelle y voyant plutôt «  une manoeuvre politique qui vise à alléger la pression exercée sur le gouvernement et une tentative de résorber la colère des bases », a-t-il estimé dans une déclaration lundi à l’agence TAP. Il a fait remarquer que la désignation d’une personnalité pour la formation du gouvernement est un processus cohérent fixé par l’article 89 de la Loi fondamentale dont « la logique constitutionnelle ne permet aucune modification de la liste des noms proposés après sa communication au parlement ». « C’est une étape irréversible », a-t-il affirmé, citant un précédent ayant valeur de jurisprudence, qui remonte à 2014, date à laquelle le chef du gouvernement de l’époque, Habib Essid, avait apporté des modifications à son équipe avant l’envoi de sa composition au parlement par les soins du président de la République.

Ennahdha s’est-il fait gruger par Jemli ?

Selon toute vraisemblance, le mouvement Ennahdha s’emploie à sonder des biais autres que l’épreuve de force pour sortir de l’ornière dans laquelle il se trouve enserré. D’après l’un de ses dirigeants, Ajmi Lourimi, une délégation de haut niveau du parti, comprenant le chef du mouvement, Rached Ghannouchi, le président de conseil de la Choura, Abdelkrim Harouni et une brochette de caciques du mouvement, se rendra auprès du chef du gouvernement désigné, Habib Jemli pour trouver une issue acceptable à la crise née après l’annonce de la composition ministérielle. Il s’agit de trouver un terrain d’entente à la faveur duquel il sera possible de composer un gouvernement qui soit à la fois politique et technocrate. Au demeurant, le président du conseil de la Choura a parlé, dimanche, de son attachement au principe d’un gouvernement politique composé des représentants des partis politiques avec une ouverture sur les compétences nationales indépendantes, Ennahdha n’endossant aucune responsabilité au cas as où les négociations échoueraient avec certains partis se réclamant de la révolution et qui ont, selon lui, fait d’importantes concessions dans ce sens. Il est vrai, cependant, que Habib Jemli avait fait part de sa disposition à procéder à certains aménagements pour rendre la composition de son gouvernement plus amène et plus susceptible d’obtenir le vote de confiance du parlement.

On peut comprendre que le mouvement Ennahdha s’irrite de s’être fait gruger par celui qu’il a choisi pour former le prochain gouvernement, mais les craintes se font présentes et insistantes que même si l’épisode de vote de la confiance va à son terme, d’autres péripéties de plus ample gravité surviennent en chemin , par exemple, le dépôt d’une motion de défiance ou de retrait de confiance. Ce serait le pire des scénarios qu’encourt la première version du gouvernement Jemli, un schéma voué à se reproduire tant que demeurera en l’état l’aberrante architecture politique enfantée par la tout aussi aberrante Constitution de 2014.

LM

- Publicité-

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

Réseaux Sociaux

108,654FansJ'aime
480,852SuiveursSuivre
5,135SuiveursSuivre
624AbonnésS'abonner
- Publicité -