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L’insondable Noureddine Khadmi

Dans un communiqué publié, mercredi 14 août, le ministre des Affaires religieuses appelle les Tunisiens à retenir la leçon de la dispersion par la force des militants pacifistes qui revendiquaient le retour au pouvoir du président destitué Mohamed Morsi.

Apportant son soutien inconditionnel aux sit-inneurs pacifiques en Egypte, le ministre appelle à une journée de soutien aux Egyptiens, vendredi prochain , au cours de laquelle les fidèles effectueraient la prière de l’Absent en hommage aux « martyrs égyptiens », et les imams consacreraient leur prêche aux évènements d’Egypte , exhortant les ulémas de Tunisie et des pays du monde islamique à agir pour stopper l’effusion de sang.

En fait, le ministre des Affaires religieuses , qui se pare, cette fois , des habits du chef de gouvernement et du ministre des Affaires étrangères réunis , nous a habitué à se manifester et à se faire oublier selon une cadence qui ne correspond ni à la logique de l’Etat ni à ses traditions . Il s’est fait oublier notamment lorsque les 8 soldats de l’armée nationale ont été sauvagement tués par les terroristes de Chaâmbi, ou lorsque les djihadistes assassinaient perfidement des hommes politiques pacifistes (Chokri Belaid et Mohammed Brahmi ). Mais il se fait remarquer comme bon lui semble, par des positions controversées.

Avant d’être désigné ministre en décembre 2011, il transforme la Mosquée Al-Fath, dont il est l’imam, en un point de ralliement des djihadistes de tous bords. Toutes les marches qui glorifiaient le djihad , menaçaient les démocrates , francophones , juifs, et artistes ou s’attaquaient aux Etats arabes et l’Occident impie prenaient pour point de départ l’enceinte de la dite mosquée , et leurs meneurs se nourrissaient des discours extrémistes de l’illustre imam .

Il est l’architecte des premiers slogans des marches islamistes post-révolution : antisémitisme et antiaméricanisme primaires et appels incessants à l’application de la Chariâa . Les premières marches dédiées ,en février 2011 , au soutien de la révolution égyptienne , dont le coup d’envoi a été donné de la Mosquée Al-Fath , défilaient à l’enseigne des étendards noirs d’Al-Qaida , devant la synagogue de la Fayette pour scander « Khaybar Khaybar ya yahoud Jaych Mohammed sa ya3oud  » . Slogan scandé à gorge déployée à l’arrivée et au départ du chef du Hamas à Gaza , Ismaïl Hania à l’aéroport de Tunis Carthage , à bord d’un avion affrété par les turcs , et lors du grand meeting à la coupole d’El-Menzah, en janvier 2012, présidé par Hania lui-même.

Le combat pour inscrire la Chariâa dans la constitution, en mars 2012 , c’était aussi lui . Il est vrai que toutes les formations islamistes sont montées au créneau , et Ghannouchi lui-même a été de la partie, avec sa fameuse vidéo dans laquelle il disait que l’armée la police et l’administrations n’étaient pas sûres , mais les observateurs qui ont remarqué que cette campagne avait un caractère pavlovien, et était menée par les tripes et la haute voix , n’ont pas manqué d’y voir les empreintes de Noureddine Khadmi en personne .

Le laxisme de son administration envers les djihadistes qui occupent toujours des centaines de mosquées dans le pays , et les réseaux de recrutement des jeunes pour le djihad en Syrie au sein même des mosquées sous tutelle du ministère , trouvent leur ressort théorique et théologique dans sa propension à glorifier le djihad , et à établir la ligne de démarcation dans la société tunisienne entre islam et apostasie, abandonnant la notion de citoyenneté aux modernistes qui ne devraient logiquement pas avoir droit de cité dans la Tunisie islamiste qu’il prône .

Baptisé  » Imam du Jihad  » pour un prêche du vendredi, dans lequel il a incité l’ANC à rompre toute relation avec Israël et a appelé au Jihad pour libérer la Cisjordanie, les députés qui voulaient le voir se comporter en homme d’Etat, l’ont interpellé, lors d’une séance plénière, en date du 9 mai 2013, au sujet de ses sermons qui incitent à la violence et au djihad dans le monde et surtout en Syrie . Sa réaction qui laissait transparaître qu’il était intouchable , a été laconique , se contentant de leur rappeler que les prêches qu’il a prononcés font partie de son droit académique qu’il exerçait même avant son entrée en fonction à la tête du ministère des Affaires religieuses.

Parallèlement à ces combats qui se rapportent à son crédo et à sa vision du monde , heureusement tous perdus les uns après les autres , sont entamés d’autres combats , plus terre à terre , plus personnels , cette fois : Habib Bousarsar qui avait menacé de mort Béji Caïd Essebsi , un certain dimanche 25 mars 2012,était un des collaborateurs de Noureddine Khadmi . Le ministère des Affaires religieuses s’est illustré par son hostilité et ses menaces claires à l’encontre des artistes pendant les évènements Al-Ibdillyah , en juin 2012 , prolongeant les positions du citoyen – universitaire Noureddine Khadmi au moment de la diffusion du film « Persépolis » en octobre 2011 .

Lorsque l’organisation internationale des frères musulmans décide , à la sortie du film « l’innocence des musulmans  » , d’établir une nouvelle règle de jeu avec l’administration américaine , utilisant tous les extrémismes pour affaiblir Barak Obama en pleine campagne électorale pour un deuxième et dernier mandat , deux têtes se distinguent dans ce jeu macabre en Tunisie : Abou Iyadh et Noureddine Khadmi . C’est vrai que le premier avait le bras long et ses adeptes (Ansar Chariâa) ont participé directement à l’assassinat de l’ambassadeur américain en Libye, le 11 septembre 2012 , mais Noureddin Khadmi s’est acquitté pleinement de son devoir , en poussant les Tunisiens à manifester leur colère devant l’ambassade américaine, sans que ces appels soient assortis de nuance ou de limite , d’après ce qui ressort du témoignage de Touhami Abdouli, ex-secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères qui assurait la permanence au département, le jour des faits , et était en liaison constante avec la représentation US et la présidence du gouvernement .

Depuis cette date, le 14 septembre 2012 , les observateurs affirment que les Etas –Unis ont exigé son départ , et tout le monde le donnait partant même avant le remaniement ministériel qui pointait à l’horizon . Mais c’était compter sans l’avis du véritable décideur qu’est Rached Ghannouchi .Il veut le maintenir à son poste, et le séisme provoqué par l’assassinat de Chokri Belaid, le 6 février 2013, a amené Ennahdha à lâcher Hamadi Jébali , mais pas Noureddine Khadmi .

Ce fils de Thala , très habitué aux méandres de l’islamisme de l’Arabie et des pays du Golfe pour avoir passé une vingtaine d’années dans les coulisses de leurs universités , palais et organisations régionales , n’a réellement émergé qu’après le 14 janvier 2011 . Mais son statut de ministre intouchable ne semble cadrer ni avec l’exercice chaotique de son département, ni avec ses sorties médiatiques aussi malheureuses les unes que les autres , encore moins avec sa posture d’indépendant , crédo repris par  les dirigeants d’Ennahdha , cyniquement et sans grande conviction.  .

Aboussaoud Hmidi

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