« La Tunisie, qui enregistre 400 m3 d’eau environ par habitant et par an en moyenne, se trouve sous le seuil du stress hydrique, fixé à 500 m3 par habitant et par an, selon l’Institut des ressources mondiales (en anglais World Ressources Institute, WRI par sigle). Depuis 2016, le pays est confronté à une grave sécheresse ». C’est ce qu’affirme, en date du 20 août 2024, la Banque Africaine de Développement (BAD), dans un rapport (Pdf) sur l’élaboration par la Tunisie de la stratégie « Eau 2050 ». Un projet, qui plus est, financé par la BAD. « D’abord un don de 1,345 millions d’euros de la Facilité africaine de l’eau de la Banque africaine de développement. Ensuite 0,9 million d’euros de la KFW ; et enfin 0,281 million d’euros de la GIZ afin de financer une étude intitulée « EAU 2050 », dit le rapport.
Tous, dont l’Observatoire tunisien de l’eau, appellent à décréter l’état d’urgence hydrique en Tunisie. Cette dernière dispose pourtant, et depuis bien avant la Covid-19, d’une stratégie, validée par d’importants financiers comme la BAD et la KfW allemande dont le financement serait prêt, mais traîne le pas à mettre en place cette stratégie « Eau 2050 ».
– Un plan d’action de 23 milliards €
Cette stratégie « Eau 2050 en Tunisie » entend donc contribuer au développement socioéconomique du pays, en sécurisant l’accès aux ressources en eau à l’horizon 2050, de manière efficiente et inclusive, équitable et durable, selon une approche de gestion intégrée des ressources en eau. « Un plan d’action jusqu’à 2050, d’un coût de 23 milliards d’euros environ, a été conçu pour la mettre en œuvre », précise même la BAD.
Le présent Projet « EAU 2050 » s’inscrivait parfaitement dans l’esprit de la constitution tunisienne du 26 janvier 2014 (et remplacée depuis par une nouvelle constitution en 2022), qui consacrait le droit à l’eau et l’obligation pour l’Etat et la société de préserver cette précieuse ressource et de la gérer d’une manière rationnelle, le droit à un environnement sain et équilibré, la décentralisation, la généralisation, l’organisation et le renforcement des pouvoirs des autorités locales élues.
Ce projet, qui intervient dans une période cruciale pour le pays, va permettre à la Tunisie de disposer d’un outil de planification du secteur de l’eau jusqu’en 2050. Cette étude de plus de 4000 pages, et qui s’appuie sur des modélisations faites sur les 30 dernières années, propose différents scenarii, qui sont accompagnés de projets prioritaires et de budgets. C’est un outil indispensable pour la planification des investissements dans le secteur. (C’est aussi un outil unique en Afrique, puisque très peu de pays disposent d’une stratégie aussi détaillée).
– La KfW finalise les études de faisabilité pour la création de nouveaux barrages
Selon le même rapport, la Stratégie va permettre la préparation de nombreux projets structurants pour la Tunisie, pour un montant estimé à 20 milliards d’euros d’ici 2050. A ce jour, on peut déjà compter quelques engagements fermes qui vont contribuer à la mise en œuvre de la stratégie : La BAD vient d’approuver récemment un prêt de 82 millions € pour un projet d’amélioration de la qualité des eaux traitées pour la réutilisation, La Tunisie a effectué une requête de 500 millions € à la Banque mondiale pour des transferts d’eau traités pour renforcer des périmètres agricoles dans le centre et le sud du pays, l’AFD va financer des projets en matière de REUSE (les études sont finalisées) pour des montants qui restent à définir, la KfW finalise actuellement les études de faisabilité des projets de transfert d’eau brute et de renforcement de barrages (création de nouveaux barrages, surélévation des barrages existants), etc. Et le rapport d’affirmer que « la Banque appuiera donc le Gouvernement dans la mise en œuvre de actions prioritaires du plan d’actions de la stratégie « Eau 2050 ».
– Parmi les objectifs de la stratégie, une gestion de l’eau par la demande
Selon le rapport de la BAD, la stratégie tunisienne « Eau 2050 » a pour objectifs, d’abord, de préserver et protéger les ressources en eau pour les générations futures ;utiliser rationnellement toutes les ressources en eau disponibles dans une logique de gestion intégrée et en tenant compte des contraintes liées au changement climatique ; passer à une gestion de l’eau par la demande ; valoriser l’eau pour une agriculture productive et résiliente répondant aux impératifs stratégiques de sécurité de l’eau et de sécurité alimentaire ; promouvoir le recours aux énergies renouvelables. Mais aussi de mobiliser les usagers et les différentes parties prenantes (Ndlr : ce qui nécessite un autre type de communication Sonede-Usagers, qui n’existe par ailleurs pas, et se limite aux communiqués de coupure d’eau). Mais encore améliorer les connaissances et renforcer les capacités pour permettre la conception et la mise en œuvre d’actions cohérentes.
– La BAD pointe les causes du retard
« On peut considérer que l’objectif de développement est atteint puisque la Tunisie dispose d’une vision, d’une stratégie et de scenarios d’actions pour sécuriser l’accès à l’eau de manière durable d’ici 2050. Au total, ce sont plus de 100 ateliers qui ont été organisés tout au long du processus d’élaboration de la Stratégie. Ce processus a aussi pris beaucoup de temps dans la mise en œuvre, en particulier, pendant la pandémie de COVID-19 où il était compliqué de réunir les parties prenantes et de valider les différentes étapes de l’étude. C’est d’ailleurs la leçon principale que l’on peut tirer en matière de conception : une sous-évaluation notable des délais nécessaires pour chaque phase du projet », disent les experts de la BAD.
Evoquant ensuite les causes de retard de la mise en chantier de cette stratégie, le rapport de la BAD cite « par exemple, et par expérience, les recrutements initiaux de bureaux d’études [qui] prennent toujours plus de temps que prévu. La validation des étapes par l’administration [qui]prend également beaucoup de temps. Cette validation nécessite plusieurs ateliers nationaux et régionaux avec des délais assez importants ». « Le projet a connu un retard considérable au démarrage puis à cause de la pandémie de COVID-19 qui a compliqué les réunions et les rencontres de validations initialement prévues. Le projet a finalement duré 7 ans, soit 4 années de plus que ce qui était prévu », résume le rapport.
Et elle a raison la Tunisie de refuser ce genre de financement, nous avons assez de compétences pour réaliser les études nécessaires, non seulement ils veulent faire travailler leurs bureaux d études en plus nous devons les payer et dire merci enduite.