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Le secteur public n’est plus en mesure de répondre aux besoins de développement, selon Miled Achour

Miled Achour, président du Syndicat National des Conseillers des Services Publics (SNCSP) estime que la révision des nominations citée par la feuille de route n’est pas suffisante à elle seule pour garantir l’instauration d’un climat de confiance au sein de l’administration qui serait propice à l’organisation des élections dans les meilleures conditions possibles. Interview :

Il est beaucoup question de la révision des nominations partisanes au sein de l’administration publique, pouvez-vous nous préciser la position de votre syndicat à propos de la question ?

Pour faire un petit rappel, le SNCSP a réagi à plusieurs reprises par le biais de communiqués officiels pour dénoncer les vagues de nominations partisanes aux niveaux central et régional qui ont été effectuées à des étapes différentes.

Mais, d’un autre côté, le SNCSP a la ferme certitude que la révision des nominations citée par la feuille de route issue du Dialogue national, quoique bien fondée et prioritaire, n’est pas suffisante à elle seule pour garantir l’instauration d’un climat de confiance au sein de l’administration qui serait propice à l’organisation des élections dans les meilleurs conditions possibles, et ce eu égard à plusieurs facteurs à savoir :

D’abord, l’absence de critères objectifs concertés et bien définis relatifs à cette révision des nominations, l’absence d’une structure impartiale composée de connaisseurs du système de gestion publique qui procède à cette révision et l’implication des mêmes parties qui ont procédé aux nominations et l’exclusion du secrétariat d’Etat chargé de la gouvernance et de la fonction publique ainsi que des composantes de la société civile spécialisée dans le domaine de l’administration du processus de révision des nominations.

Ensuite, l’absence de l’impératif de compatibilité entre le poste et le profil ainsi que l’absence de la responsabilisation sur la base de mandats bien définis et composés de programmes et de résultats quantifiables pour pouvoir ensuite procéder à l’évaluation de la performance des personnes nommées aux différents postes.

Enfin l’absence de garanties professionnelles pour les fonctionnaires issus de certains corps de la fonction publique surtout ceux appartenant à la sphère de gestion publique qui répondent largement aux critères de nominations mais qui hésitent à se porter candidats en l’absence de ces garanties dont d’autres corps bénéficient, ce qui a fait qu’une des nominations effectuées sur la base de la révision affiche l’appartenance à une catégorie de fonctionnaires qui jouissent des garanties nécessaires pour mener à bien leurs missions. On ne manquera pas de citer ici que les conseillers des services publics ont largement été lésés par cette injustice administrative flagrante et ciblée.

Mais, est-ce qu’on peut s’attendre à un changement réel dans le rendement de l’administration tunisienne si cette question de révision des nominations est résolue ?

On peut avancer ici que l’administration publique tunisienne porte en elle, d’un côté, les origines de la quasi-totalité des maux du pays mais, d’un autre côté, la composante essentielle du remède à tous les maux socio-économiques dont souffre la Tunisie en cette période très délicate.

En effet, On ne peut parler de développement économique et social sans mettre en place les bases d’une administration publique moderne et performante. Tout le monde crie haut et fort aujourd’hui que le secteur public n’est plus en mesure de répondre seul aux besoins de développement surtout dans les régions les plus défavorisées. Dans le même temps, tout le monde a tendance à oublier ou négliger le fait que les investisseurs privés ont besoin d’un climat d’affaires favorable pour prendre l’initiative économique et jouer le rôle nécessaire dans la relance économique. Ce climat d’affaires repose essentiellement sur la performance de l’administration publique qui souffre aujourd’hui d’un cadre de travail dépassé à tous les niveaux que ce soit au niveaux du cadre juridique, des structures, de la gestion des ressources humaines, ou du système de rémunération … et même l’orientation générale de baser la réforme sur le seul axe de contrôle n’a pas porté ses fruits si on se réfère aux différents classements de la Tunisie dans les domaines de la corruption et du climat d’affaires.

A partir de ce qui précède, une refonte totale de tout le système surtout au niveau de la redéfinition de la sphère de gestion publique est devenue aujourd’hui un impératif qui doit être entamé sans plus tarder en impliquant toutes les parties prenantes dans l’élaboration d’une stratégie bien claire basée sur une vision globale pour remédier aux différentes distorsions qui sont en train de s’accentuer au sein du système administratif tunisien au vu de la guerre de cloisonnement et de placement entre différents corps de la fonction publique surtout au niveau des hautes fonctions.

En parlant des corps de la fonction publique, Est-ce que vous trouvez que les revendications syndicales ont affecté l’avancement des choses au sein de l’administration publique ?

Il faut bien noter ici que le problème, à notre avis, ne réside pas dans les revendications syndicales qui ont certes eu des implications sur l’économie mais qui sont très souvent bien fondées et légitimes surtout au vu de la dégradation flagrante de la situation globale des salariés, conjuguée avec l’inflation et la flambée des prix en plus de la marginalisation dont ont souffert plusieurs corps depuis des décennies.

Nous avons la certitude au SNCSP que le problème réside dans la manière avec laquelle les représentants de l’administration ont traité les revendications. D’une part, il y a eu un laisser aller dans plusieurs dossiers par l’octroi à des catégories de fonctionnaires des privilèges en excluant des catégories similaires. Ce qui a instauré une véritable injustice administrative due à la fois à une absence de vision claire et d’une démarche objective dans le traitement des dossiers syndicaux. Pire encore, certains dossiers ont été personnifiés et ont été traités sur la base des considérations purement subjectives des responsables mandatés à y trancher. En tant que SNCSP, nous avons vécu l’expérience à nos dépens quand on s’est heurté à un refus insensé de nos propositions de réformes qui sont bénéfiques à l’administration avant d’être bénéfiques au corps des conseillers des services publics malgré que nous avons avancé tous les arguments objectifs d’appui à ces propositions visant à valoriser le système de formation, la gestion des ressources humaines aux niveaux central et local tout en se basant sur les expériences comparées et les standards internationaux.

Mais devant la négligence de la part de la présidence du gouvernement malgré tous les dossiers déposés, la personnification du dossier par certains responsables et l’exclusion ciblée du corps qui est composé de cadres supérieurs hautement formés et qualifiés et qui a un grand plus à apporter au niveau de la modernisation de l’appareil administratif, nous nous trouvons obligés de nouveau de recourir aux moyens de pression syndicaux bien que nos valeurs et notre culture du service public nous empêchent d’y recourir systématiquement sauf pour faire face aux tentatives de marginalisation auxquelles nous faisons face depuis quelque temps surtout par le refus de révision du statut qui demeure inchangé depuis presque 30 ans et malgré la signature d’un accord avec la présidence du gouvernement.

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