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Tunis : Blocage politique et polémique chez les juristes sur « l’offre » de Hamadi Jebali

Le chef du gouvernement Hamadi Jebali a annoncé, dans la soirée du mercredi 6 février, 2013, la formation d’un gouvernement restreint de technocrates. Une décision qui n’a pas plu aux constitutionnalistes et aux ministres. Abdelwaheb Maatar, ministre de l’Emploi et de la Formation Professionnelle est parmi ceux qui ont rejeté cette initiative. Dans une déclaration à Africanmanager, Abdelwaheb Maatar a indiqué que la formation d’un nouveau gouvernement est une violation de la loi relative à l’organisation provisoire des pouvoirs publics. « C’est un dépassement de la loi. Au niveau constitutionnel, on peut dire qu’il s’agit d’une décision illégale », affirme le ministre avant d’ajouter que « ladite loi n’habilite pas le chef du gouvernement à remplacer le gouvernement actuel par un autre sans avoir au préalable présenté sa démission ».

Le professeur du droit Constitutionnel, Sadok Belaid, a souligné, quant à lui, que, en se référant à la petite constitution, Hamadi Jebali « doit démettre le gouvernement actuel, pour qu’un gouvernement de technocrates soit formé » faisant savoir que le changement intégral du gouvernement fait partie des prérogatives de l’Assemblée nationale constituante. « Ainsi, Hamadi Jebali doit revenir à l’ANC, mais avant, il doit présenter sa démission ».

Abdelhamid Jelassi, un des leaders du mouvement Ennahdha a rejeté, lui aussi, la décision de Hamadi Jebali qui, selon lui, a pris des décisions unilatérales, soulignant que son mouvement n’est pas d’accord sur un gouvernement de compétences. Il a ajouté que, pour son mouvement, le pays a encore besoin d’un gouvernement qui compte des figures politiques. Il a, par ailleurs, indiqué que le mouvement Ennahdha n’a pas été avisé par le chef du gouvernement.

Hamadi Jebali ne peut remercier tout un gouvernement !

Chawki Gaddès, secrétaire général de l’Association Tunisienne de Droit Constitutionnel et enseignant à la faculté des Sciences juridiques, politiques et sociales de Tunis, a fait savoir, dans une déclaration à Africanmanager, que le chef du gouvernement ne peut remercier toute une équipe ministérielle qui a obtenu la confiance de l’ANC et se maintenir au pouvoir. « Un gouvernement est défini comme étant une formation collégiale solidaire. Donc, on peut remercier l’un de ses membres, mais si tous les ministres sont remerciés, ceci équivaut à une démission, ce qui placerait le chef de l’État dans la situation prévue par l’article 15 »,a-t-il indiqué.

Il a ajouté que cette disposition stipule clairement que : « Le président de la république, après concertation, charge le candidat du parti ayant obtenu le plus grand nombre de sièges au sein de l’Assemblée Nationale Constituante de former le Gouvernement.

Selon Chawki Gaddès, le Chef du Gouvernement, mandaté conformément au 1er paragraphe, forme le Gouvernement et soumet ses travaux au Président de la République dans un délai ne dépassant pas 15 jours de la date de son mandat. Le dossier contient la composition du Gouvernement et un exposé récapitulatif de son programme.

Hamadi Jebali doit remettre sa démission !

Ainsi, le chef du gouvernement doit remettre sa démission au chef de l’État qui doit, après concertations, nommer un nouveau chef de gouvernement, même s’il reconduit celui démissionnaire. Une fois le gouvernement formé dans les quinze jours, celui-ci doit impérativement obtenir la confiance de l’ANC. Si cela n’est pas acquis, le chef de l’État pourra choisir un chef de gouvernement en dehors du parti majoritaire et reprendre la procédure.

Il a ajouté que Hamadi Jebali a pris tout seul cette décision sans consultation des acteurs, de son parti, de sa majorité et de son équipe gouvernementale, ce qui est inacceptable. Ces pouvoirs sont du ressort de l’ANC et de la majorité à travers le chef de l’État, et il doit revenir devant ces autorités pour reconstituer un gouvernement. « De ceci émane l’obligation de bannir le régime parlementaire de nos options politico juridiques à venir et, ensuite, consulter les spécialistes du droit public et les constitutionnalistes pour la rédaction de textes aussi importants pour le pays », a-t-il expliqué.

Chawki Gaddès a souligné, en outre, qu’il s’agit d’une décision destinée uniquement à calmer la rue. Il doit rendre compte de sa responsabilité devant les tunisiens et devant l’histoire. C’est son autisme qui a conduit à cela, et il ne peut se soustraire à sa responsabilité. Donc, il dit au peuple et à la société civile ce qu’ils voudraient bien entendre.

Il s’agit d’un remaniement ministériel !

Contrairement à tout cela, le constitutionnaliste, Iyadh Ben Achour, a fait savoir, pour sa part, que le chef du gouvernement Hamadi Jebali a le droit d’annoncer un gouvernement de technocrates, puisque cela s’inscrit dans le cadre d’un remaniement ministériel et non d’un nouveau gouvernement, ajoutant que l’article 15 ne s’applique pas dans ce cas de figure.

Iyadh Ben Achour a révélé, en outre, que 8 ministères ne seront pas touchés par le remaniement, notamment la Justice et l’Equipement.

L’accord de l’ANC n’est pas une condition juridique !

Il a appelé à faire la distinction entre un nouveau gouvernement et un remaniement ministériel. L’hypothèse qui doit être retenue, aujourd’hui, est celle d’un remaniement ministériel où le chef du gouvernement et un certain nombre de ministres resteront en place, tandis que d’’autres ministres vont changer. Dans ce cas, la décision revient au Chef du gouvernement qui est appelé à informer, seulement, le Président de la République, selon Iyadh Ben Achour.

Du côté politique, Iyadh Ben Achour, a expliqué que Hamadi Jebali n’est pas obligé d’obtenir l’accord de l’ANC. « Il vaudrait mieux avoir l’accord de l’ANC, ce n’est pas une condition juridique mais plutôt politique ».

S’agissant de l’autre cas, à savoir, la constitution d’un nouveau gouvernement, Iyadh Ben Achour a expliqué que cela ne peut se faire qu’à la suite de nouvelles élections ou de la démission du Chef du gouvernement. Dans ce cas, la procédure prévue est celle de la loi du 16 décembre 2011. « Cette procédure est un peu complexe et engage la participation du président de la République, le nouveau Chef du gouvernement et le Président de l’Assemblée nationale constituante »,a-t-il dit.

Khadija Taboubi

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