AccueilLa UNETunis : L’UGTT désavoue déjà le gouvernement du Quartet.

Tunis : L’UGTT désavoue déjà le gouvernement du Quartet.

Nul doute que le pouvoir d’achat des classes sociales, les plus faibles et la moyenne, s’est érodé. Nul doute aussi que l’inflation n’a jamais grimpé si haut (6 %), depuis le départ de Ben Ali (4,4%). Il est enfin un fait indéniable que l’année 2013 s’était passée sans augmentations salariales et que c’était l’année des hausses des prix et celle de la contrebande par excellence. Mais 2013 fut aussi l’année de toutes les dépenses sociales, du peu de travail, de la baisse de la productivité et l’année surtout de tous les déséquilibres financiers et budgétaires.

Avant même qu’il ne prête serment devant le chef de l’Etat, la Commission Administrative de l’UGTT, principale centrale syndicale en Tunisie, appelait à l’ouverture d’un nouveau round de négociations sociales. Objet : une nouvelle augmentation salariale. Ce jeudi 30 janvier 2014 encore, le SG adjoint de l’UGTT, Hfaiedh Hfaiedh, le confirmait sur les ondes d’une radio privée.

Le jour même où l’ensemble du gouvernement prêtait serment, les syndicalistes de Sfax annonçaient une grève générale de deux jours. Le plus étrange est que l’objet de cette grève est la demande du respect de la feuille de route, tel que le rapporte la presse locale.

Le jour où le nouveau ministre des Domaines de l’Etat devait prendre ses fonctions, les employés du ministère débutaient une grève. Mardi 24 décembre 2013, les cadres et agents du ministère des Domaines de l’Etat et des Affaires foncières se sont mis en grève pour revendiquer la mise en exécution de l’accord relatif à la subvention incitative.

Une journée après que les nouveaux ministres ont été investis de leurs nouvelles fonctions, les instances régionales de l’UGTT à Médenine annoncent des grèves générales dans la région, le 10 février 2014, selon une déclaration du secrétaire général adjoint de l’UGTT de Médenine, Messaoud Labiadh à la TAP. Cette action vient en signe de protestation à des échos sur l’annulation ou la modification du projet d’implantation d’une faculté de médecine dans la région, comme cela a été décidé dans un conseil ministériel.

Ces quatre évènements sociaux n’ont peut-être aucun lien l’un avec l’autre. Ils n’en sont pas moins la preuve d’une nouvelle montée de la fièvre sociale à la veille de l’installation d’un nouveau gouvernement. Un gouvernement, pourtant issu d’une initiative politique de la centrale syndicale autour de laquelle s’était créé le Quartet et qui a donné lieu à la feuille de route qui a débouché sur un nouveau gouvernement.

Des observateurs avertis de la scène politique et sociale tunisienne, ainsi que plus d’un nouveau ministre que nous avons pu rencontrer, se posent cette question : «qu’est-ce qu’il lui prend à l’UGTT ?». L’un d’eux s’était demandé si «l’UGTT n’était pas en fait en train de saboter et de désavouer le gouvernement qu’elle a aidé à mettre en place».

Parti politique de gauche avant toute autre formation politique de ce genre, le rôle de la centrale syndicale ouvrière dans la révolution de janvier 2011, fait l’unanimité en Tunisie. L’UGTT a même été la couverture syndicale et le chapiteau qui a protégé toutes les personnalités et les formations politiques pendant les 20 dernières années du régime de Ben Ali. Force est cependant d’ajouter que «la révolution est montée à la tête» de l’UGTT qui s’est, depuis la révolution, transformée carrément en parti politique d’opposition sans le dire. Son rôle de moteur de toute contestation populaire, pendant les années de plomb et de sang du règne d’Ennahdha en a fait la pièce maîtresse de tout l’échiquier politique et social. Sa participation à la solution politique de la crise de 2013 où son image s’est gonflée démesurément en face du reste du Quartet, ont, à notre sens, fini par transformer l’UGTT, par essence une organisation syndicale, en une force sociale, courtisée par tous les partis politique, crainte par les deux gouvernements successifs d’Ennahdha.

L’UGTT est consciente de cette force, parfois trop. Comme Ennahdha, la centrale syndicale a aussi ses colombes, ses faucons et même ses loups. Comme l’ancien parti au pouvoir, elle ne tient toujours pas ses différentes ailes, et certaines, comme celle de Gafsa, lui échappent carrément. Il n’est pas faux de dire que ce sont ces « débordements de l’exercice du syndicalisme et la protestation et ses dommages collatéraux, qui ont précipité par exemple, la compagnie de phosphate de Gafsa dans l’état perte où elle se trouve ». Tout cela, dans un environnement où la Tunisie de l’après Ben Ali vit une crise économique grave et où des voix de plus en plus aiguës prônent la remise en question de certains choix économiques comme le libéralisme ou le rôle de l’investissement privé dans l’économie tunisienne. Tout cela nous fait dire que l’UGTT, c’est bien. En abuser, ça craint.

Khaled Boumiza

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