La Tunisie vit depuis la révolution une période de transition, où la justice reste encore au cœur de l’évènement. D’anciens politiciens et des hommes d’affaires attendent que justice leur soit rendue, à l’instar des martyrs et des blessés de la Révolution, et d’une façon générale, tous ceux qui s’estiment victimes de répression, de spoliation et de vol.
Beaucoup a été dit au sujet de la justice transitionnelle, mais peu a été fait. Le fait est que nombreux sont ceux qui demeurent incarcérés dans les prisons, alors que d’autres sont frappés de l’interdiction de voyager et d’investir.
C’est de tout cela que nous avons parlé avec Samir Dilou, ministre de la Justice transitionnelle, à l’occasion de la première phase de la conférence nationale sur le lancement du dialogue sur le processus de la justice transitionnelle qui a débuté, samedi 14 avril 2012 à Tunis. Les réponses étaient laconiques et d’ordre général. Qua cache encore Dilou ? Interview :
Comment inculquer l’esprit de la justice transitionnelle chez les Tunisiens ?
Pour inculquer l’esprit de la justice transitionnelle, nous avons besoin de la collaboration du gouvernement, de la société civile, des médias…Nous comptons sur les manifestations organisées par le gouvernement, et les associations pour enraciner ce principe. Nous confirmerons, par la suite, que le processus tunisien est un bon exemple de réussite en matière de justice transitionnelle.
Bien évidement, cette conférence nationale est une première étape qui sera suivie d’autres jusqu’au parachèvement de la première phase par l’adoption de la loi relative à la justice transitionnelle par la Constituante.
Il est donc primordial d’assurer le consensus national entre toutes les parties politiques au sein du gouvernement, de l’opposition et de la société civile, autour de la justice transitionnelle.
Nous souhaitons mettre en place un processus qui traduise un consensus national et qui soit à l’abri des tractations politiques, de la logique de la majorité et de l’opposition et qui garantisse la participation de l’ensemble des parties pour parvenir aux meilleures propositions sur cette question.
Lors de son intervention, Moncef Marzouki n’a pas cessé d’accuser l’ancien gouvernement, qui selon lui, a mis des obstacles pour entraver le processus de la justice transitionnelle, en quoi consistent ces obstacles ?
Je ne veux pas commenter les propos du président de la République, mais ce que je peux dire, c’est que les obstacles que nous avons trouvés sont naturels, étant donné que la Révolution a été caractérisé par son aspect sensible, donc nous devons travailler ensemble pour nous attaquer aux problèmes sur tous les plans.
Quelle est votre réaction à la lettre de Belhassen Trabelsi ? Est-ce que cette lettre sera concernée par le processus de la justice transitionnelle ?
Nous ne souhaitons pas inclure les affaires à vocation politique ou autre dans le processus de la justice transitionnelle. Nous nous engageons à traiter Belhassen Trabelsi, beau-frère du président déchu, dans le respect de la loi et à lui assurer un procès équitable. Tout tunisien demeure un citoyen tunisien, même s’il fait l’objet de poursuites judiciaires.
Il reste à confirmer que tous ceux qui sont impliqués dans des affaires de corruption, de malversation et d’abus de pouvoir, seront sanctionnés. Personne n’échappera de la justice.
Plusieurs associations ont récemment déclaré que la torture existe encore dans les prisons même après la Révolution. Avez-vous reçu des plaintes à ce sujet?
Je n’en suis pas au courant, mais nous avons reçu des plaintes au sujet de pratiques de tortures dans les centres de détention. Le ministère des Droits de l’Homme et de la Justice transitionnelle envisage de créer une commission ayant vocation à traiter ce sujet.
Vous avez accusé deux dirigeants de partis d’opposition d’avoir exploité le dossier des blessés de la Révolution, qui sont exactement ces deux personnes et avez-vous vraiment des preuves tangibles concernant leur implication ?
Je n’ai jamais dit cela, et je ne veux pas revenir sur ce sujet.
Béji Caïd Essebsi est- il vraiment impliqué dans l’affaire de la torture des Yousséfistes ?
Je ne veux pas parler de procédures à vocation judiciaire, nous ne pouvons pas inclure dans une affaire d’essence purement judiciaire dans le processus de la justice transitionnelle.
Beaucoup de réseaux sociaux ont rapporté des informations sur l’attribution de 750 millions de dinars au profit des anciens prisonniers politiques, plus précisément les Nahdhaouis. Qu’en pensez-vous?
C’est de l’intox. Que dieu pardonne celui qui a propagé cette rumeur. Que dieu pardonne celui qui m’a posé la question.
L’Etat d’avancement du dossier des blessés de la Révolution ?
Ça avance bien.
Nadia Ben Tamansourt