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Tunisie : Les cours mondiaux du blé explosent. Du pain sur la planche pour le gouvernement !

L’économie de la Tunisie et a fortiori ses finances n’ont nullement besoin de pareille nouvelle : les cours mondiaux du blé ont terminé la semaine sur une hausse de 6% vendredi, après avoir frôlé jeudi les 220 euros, à 219,75 euros. Trouver cette flambée est fâcheuse, ce serait peu dire. La juger déstabilisatrice conviendrait beaucoup plus à la réalité des choses et aux lendemains qui seront ceux de la balance alimentaire du pays et à la facture de ses importations de céréales dont les appels d’offres sur le marché mondial s’enchaînent à une cadence mensuelle voire hebdomadaire. C’est en tout cas une donnée qui doit être prise prioritairement en compte dans le projet de la loi des finances 2018 en cours d’élaboration, déjà assailli par la hausse des prix du baril de pétrole, tous deux produits subventionnés, si fortement qu’ils grèvent dans une très large part le budget de l’Etat et creusent d’autant son déficit que le gouvernement espère le ramener à 3,9% à la fin de l’exercice en cours.

La principale raison derrière cette flambée des cours mondiaux des céréales tient à la météo en ce sens que la moisson mondiale de blé a été plus faible qu’attendu, parfois dans des proportions importantes. Celle de maïs, pas encore réalisée, est aussi menacée. La sécheresse a particulièrement frappé l’Europe du nord, la Pologne, les pays baltes, la Suède et l’Allemagne, grands producteurs de céréales, mais encore les pays de la Mer noire, l’Ukraine et la Russie qui satisfont une part significative des besoins de la Tunisie, notamment en blé meunier ou tendre et en orge fourragère où le service météorologique russe confirme attendre une baisse de production de céréales de 15 à 20% en Russie, pays devenu premier exportateur mondial de blé l’an passé devant les Etats-Unis, selon le cabinet de courtage ODA.

Les inquiétudes viennent aussi d’Allemagne, où la première organisation de producteurs DBV a corrigé vers le bas mercredi ses prévisions de récolte, qui étaient déjà en baisse par rapport à l’an passé. Au lieu de 41 millions de tonnes de céréales attendues, l’Allemagne ne devrait en engranger que 36. En France, où les experts attendent un peu plus de 34 millions de tonnes de blé contre 36,6 MT en 2017, la hausse des cours réjouit pourtant les agriculteurs céréaliers qui ont le moral en berne depuis plusieurs années. 40% d’entre eux sont dans le rouge.

Un corollaire détestable

Comme les prix montent, les pays pauvres et en développement vont souffrir si les gouvernements ne subventionnent pas davantage le pain ou les nourritures de base, avertit un courtier spécialiste en matières premières agricoles qui requiert l’anonymat. Néanmoins, celui-ci ne prévoit pas de conséquences comparables aux émeutes de la faim de 2007-2008 ni aux révoltes des « printemps arabes » qui ont suivi, souvent parties de mauvaises récoltes et de hausses des matières premières agricoles de base sur fonds de baisse des stocks mondiaux. « En 2010, les prix étaient montés aux alentours de 300 euros la tonne de blé, on n’en est pas à un stade critique au point de déstabiliser un gouvernement, et les stocks mondiaux sont confortables », se rassure cet analyste: « On n’est pas du tout dans la même configuration ».

La symbolique tyrannique du pain

Il n’en demeure pas moins que les conséquences économiques sont d’un autre ordre et impacteront sérieusement les comptes de l’Etat qui se trouve continuellement mains et poings liés chaque fois qu’il est question de relever les prix des dérivés du blé, notamment le pain auquel s’attache une tyrannique symbolique, les pâtes alimentaires et la semoule. D’autant que la production céréalière, au demeurant fluctuante, enregistre un déficit chronique de l’ordre de 50% en moyenne par rapport aux besoins d’une population sans cesse croissante, selon une étude de la FAO et l’Observatoire national de l’agriculture (ONAGRI). De ce fait, la majorité des besoins annuels sont assurés par les importations, ce qui a conféré à la Tunisie un taux de dépendance vis-à-vis des céréales importées de 33% pour le blé dur, 85.3% pour le blé tendre et 71,3% pour l’orge, soit un taux moyen de 63.33% pour le total des céréales.

Ainsi, le secteur céréalier demeure un secteur fragile très dépendant du marché mondial ; son importance stratégique est source d’un interventionnisme excessif, au point que tout est fixé du prix de la semence comme intrant aux prix du pain et des pâtes alimentaires, produits de consommation finale. Les marges de tous les intervenants : producteurs, collecteurs, stockeurs, transporteurs, transformateurs de différents niveaux et distributeurs sont fixées par les pouvoirs publics, ajoute l’étude.

La stabilisation des prix à la consommation à des niveaux bas a conduit l’Etat à intervenir à tous les stades de la filière par la mise en place de mécanismes de compensation. Toutefois, face à la faiblesse des rendements et à la forte variabilité de la production céréalière nationale, malgré les efforts déployés dans un objectif d’autosuffisance, l’Etat a eu recours de façon accrue aux importations pour satisfaire la consommation, alors que les prix mondiaux des céréales connaissent une tendance à la hausse. C’est là où le bât blesse et blessera encore avec une tonne de blé à 220 euros. Sauf complications !

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