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Tunisie : Les déboires d’un peuple qui passe de Ben Ali à Jbali, de Charybde en Scylla !

L’affaire Baghdadi Mahmoudi aura fini par briser l’entente préfabriquée de la troïka. Comme deux enfants qui se disputent des jouets ou des fournitures scolaires, le Chef du gouvernement Hammadi Jbali et le chef de l’Etat Moncef Marzouki, se retrouvent chez la Constituante pour les départager au lieu de continuer à plancher sur la nouvelle Constitution. L’un comme l’autre, refusent de démissionner ou de reconnaître un quelconque échec à bien gouverner.

Jbali et Marzouki refusant jusqu’ici d’entendre parler de tout bilan de leurs 100 jours de mauvaise gouvernance, quand bien même viendrait-il de l’étranger, il est temps, à notre sens, que le peuple tunisien, dresse son propre bilan des 100 jours de gouverné.

– Les Tunisiens voulaient un Constituante pour la Constitution, ils ont eu une Constituante pour gouverner. Dès les premières réunions, il y a presqu’une année, de la Constituante, cette dernière se donne le droit de tirer un trait sur tout ce qui l’ précédée, s’érige en autorité suprême, met en place un gouvernement qui s’aperçoit, jour après jour, qu’il est incapable de gouverner. Une agence de notation le lui rappelle et il se fâche. La Constituante oublie la Constitution, discute de ses privilèges, questionne les institutions économiques sur de prétendus dérapages, ne décide aucune date officielle pour les prochaines élections et se retrouve à jouer le médiateur entre deux «grands enfants» [Jbali et Marzouki], qui se disputent les jouets du pouvoir.

– Les Tunisiens ont chassé Ben Ali pour le retrouver sous un autre visage. Ils ont fait la Révolution pour rompre avec les pratiques du passé, ils se retrouvent avec un président qui n’a aucune prérogative et un chef d’Etat qui dépasse Ben Ali dans ses prérogatives. Dès la mise en place de ce que les Nahdhaouis avaient appelé la «petite Constitution», tous les pouvoirs de l’ancien Président Z.A. Ben Ali, avaient été concentrés entre les seules mains de Hammadi Jbali, nouveau Chef de gouvernement. Toute la presse avait dénoncé cela. Les trois parties gouvernantes, y compris et surtout le CPR de Moncef Marzouki, y avaient souscrit, et certains des ministres CPRistes, comme Mohamed Abbou, avaient défendu cela devant la Constituante. La dernière anecdote qui circule dit que les prérogatives de Moncef Marzouki ne lui permettent même pas de démissionner.

– Les Tunisiens voulaient un gouvernement d’union, ou d’unité, nationales, ils ont un gouvernement de désunion qui n’a rien à voir avec le nationalisme. Avec l’affaire Baghdadi Mahmoudi, éclate au grand jour la division qui a toujours régné entre trois partis gouvernants sur une multitude d’affaires, depuis celle du niqab à la faculté des lettres, à l’indépendance de la BCT, en passant par la réconciliation économique, l’exclusion des anciens RCDistes, les grands choix économiques et même le choix des amis de la Tunisie. Tout divisait les trois composantes d’une troïka que n’unissaient que la course aux fauteuils et la revanche par le pouvoir. La troïka a quand même fini par imploser. A la manière des plus religieux d’entre nous, on pourrait dire «Que Dieu ait pitié de la Tunisie » ou en langue arabe  حسبنا اللّه و نعم الوكيل فيكم

– Les Tunisiens avaient fait la Révolution pour la dignité, ils ont un président qui se fait traiter de tous les noms indignes de son rang. La dignité a été un élément fondamental pour un peuple qui s’était toujours senti humilié, diminué, maltraité par un président et une caste économique de nouveaux parvenus. Ils se retrouvent avec un Président qui se fait traiter de tous les noms, par les agences et sur sa propre page Facebook. Des insultes qui devraient le toucher dans sa dignité, mais qui ne semblent avoir de l’effet que pour le peuple qui ne l’a pas élu. Jamais, de mémoire de tunisien, l’image d’un gouvernement tunisien n’avait été aussi malmenée et n’avait atteint de si bas niveaux.

– Les Tunisiens ont fait la Révolution pour l’emploi, ils ont presqu’un million de chômeurs.

Ils étaient plus de 500 mille avant la Révolution. Quelques semaines après le 14 janvier 2011, la Tunisie découvrait que leur nombre dépasse les 700 mille et culminera bientôt au million. C’est, cependant, toujours les grèves, les sit-in, les arrêts de travail, les coupures de routes et les interdictions faites aux non-grévistes de rejoindre leurs postes de travail. Pis encore, c’est le refus du travail auquel le Tunisien de l’après Révolution préfère et revendique la prime, quel que soit son nom, pourvu qu’elle ne signifie pas travail.

– Les Tunisiens ont fait une Révolution pour éliminer les Trabelsi, ils se retrouvent avec, presque tout un peuple qui n’a rien à envier aux Trabelsi. Dès la fin de la Révolution, se met en place la nouvelle cohorte de nouveaux parvenus sur le dos de la Révolution. Des trafiquants de tous genres, de simples citoyens qui reviennent sur des accords et cherchent à spolier même l’Etat, des gueux qui s’emparent du domaine public et y construisent des propriétés, des hommes d’affaires qui cherchent à récupérer à leur bénéfice ce que les Trabelsi avaient arraché de l’Etat tunisien. La Révolution n’a pas annulé les privilèges. Elle en a seulement changé les bénéficiaires.

– Les Tunisiens vont chercher le financement de leur budget à l’extérieur et mettent leurs propres, soit derrière les barreaux, soit sous interdiction de voyage. Sitôt l’ancien-nouveau budget mis en place, les héritiers du gouvernement Ben Ali s’étaient mis à la recherche de nouveaux financements créateurs d’emplois. De l’Arabie Saoudite à la Turquie, en passant par l’inévitable Qatar, Hammadi Jbali avait fait le tour de tous ceux qui avaient promis d’aider la nouvelle révolution. L’argent existait pourtant tout près, en Tunisie. Les deux dernières entreprises qui se sont cotées sur la Bourse de Tunis, en avaient administré la preuve irréfutable. L’argent existe aussi chez tous ceux auprès de qui le marché des coffres-forts florissait depuis la Révolution et le retrait d’au moins 650 MDT des circuits bancaires aux premiers jours de la révolution. Jbali et ses comparses ont, de leur côté, veillé à mettre une grosse liste d’hommes d’affaires, soit sous les verrous, soit derrière l’interdiction de voyager, soit encore sous la menace constante des poursuites judiciaires.

– Les Tunisiens ont créé un second ministère pour une justice dite transitionnelle et alignent les procès, par contumace, contre leur ancien Président, sans oser fermement revendiquer qu’on le leur ramène. A la première occasion, leur gouvernement qui avait toujours vécu en réfugié à Londres à Paris et ailleurs, livre un réfugié à ses bourreaux. Questionné un temps sur Ben Ali et l’Arabie Saoudite, Hammadi Jbali avait alors déclaré que Ben Ali ne saurait détruire les bonnes relations tuniso-saoudiennes. Questionnés sur les soupçons d’une transaction financière dans l’affaire Baghdadi, des responsables de son gouvernement nient, sans convaincre.

Khaled Boumiza.

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