Le décret-loi relatif à la réglementation des jeux de hasard, d’argent et de paris a provoqué un tollé dans les milieux tunisiens, qu’ils soient sociaux, sportifs, et même politiques. A un point tel que les professionnels du secteur ont exprimé leur rejet de ce texte le jugeant constitutif d’atteinte aux libertés et « une faveur dont est gratifiée une partie déterminée affiliée à l’Etat ».
Le président du groupement interprofessionnel national des sociétés de paris sportifs et de jeux en ligne relevant de Connect, Walid Balti, a qualifié le texte de « scandale » qui rogne les droits et libertés, contrairement à ce qui était affirmé dans l’ordonnance présidentielle n° 117 concernant les mesures exceptionnelles, qui interdit dans son article 4, toute atteinte aux acquis au titre des droits de l’homme et des libertés garantis par l’arsenal juridique national et international.
Balti a indiqué dans une interview à African Manager que le ministère de tutelle, représenté par celui de la Jeunesse et des sports, est en train d’élaborer un projet de décret-loi sans en référer aux professionnels du secteur pour solliciter leurs avis dans ce domaine, soulignant qu’ils ont de nombreuses propositions qui contribueront à réguler le secteur sans exclusion.
Il a, également, indiqué que les entreprises du secteur comptent mettre en place un nouveau concept appelé « pari responsable », qui tente de faire de ces jeux une activité de divertissement, soulignant qu’elles disposent d’un système sophistiqué encadré par de nombreux diplômés universitaires dans le domaine des algorithmes informatiques.
Une ordonnance au service de « Promosport » !
D’autre part, le responsable a révélé que ce texte été rédigé dans une large part en faveur de la Société de Promotion Sportive (Promosport) afin que l’activité des paris sportifs soit un monopole exercé par cette dernière, contrairement à ce qui était énoncé dans le décret de 1974 qui réglemente cette activité, soulignant que la justice s’est prononcée sur la question du monopole de l’État sur l’activité des paris sportifs au travers d’une jurisprudence mettant fin à ce monopole, dans le cadre d’une précédente affaire.
Le président du groupement a déclaré que le nouveau décret-loi annule complètement la présence de toutes les sociétés actuellement en activité, dont le nombre est estimé à une trentaine, et ce en attendant la création d’une autorité nationale des jeux de hasard, d’argent et de paris, conformément à ce qui est indiqué à l’article 3 du décret-loi.
En outre, l’article 21 du même texte stipule qu' » est créé aux termes de ce décret-loi un établissement public jouissant de la personnalité morale et de l’autonomie administrative et financière, dénommé ‘Autorité nationale des jeux de hasard et paris, et a son siège à Tunis ».
Excès de pouvoir !
Dans le même contexte, Balti s’est étonné que leur activité soit soumise à l’approbation d’une partie qui monopolise l’activité, considérant ce qui était indiqué dans les prérogatives de cette autorité comme un danger pour l’ordre public, puisqu’elle s’est vue confier la mission de police judiciaire , ce qui enfreint la loi tunisienne, l’article 34 du décret-loi reconnaissant à l’autorité la prérogative de fermer les sites et plateformes électroniques sans délais ni autorisation judiciaire, selon ses dires.
« Le décret-loi habilite le gouverneur à exercer les fonctions de police judiciaire, et cela dans son article 47, qui stipule qu’il autorise le ministre chargé de l’intérieur et les gouverneurs, à compter de la date d’entrée en vigueur du présent texte et jusqu’à la mise en place de l’organe mentionné à l’article 21 et le lancement de son activité, à prendre toutes mesures dans le cadre du contrôle administratif y compris la fermeture sans préavis de tous les établissement opérant dans lle domaine des paris sportifs et des jeux de hasard sans autorisation », a-t-il ajouté.