Sans conteste, le « Startup Act » promulgué en 2018 est l’acte fondateur de « tout un écosystème est né autour de l’ambition de transformer le pays en hub technologique régional ».Il s’agit d’un « dispositif complet et cohérent , de la labellisation jusqu’au financement, avec des mécanismes adaptés et opérationnels. Aujourd’hui, il faut juste accélérer la marche et lever quelques obstacles pour que le rêve devienne réalité », estime le binôme Alaya Bettaieb, Directeur Général de « Smart Capital », l’entité en charge de l’implémentation du programme national « Startup Tunisia » et Zied Ben Othman, Directeur du Fonds de Fonds « ANAVA ».
« Avec, à ce jour, 952 startups labellisées sur un objectif de 1000 startups d’ici 2024, 60 incubateurs accélérateurs et 90 coworking spaces créés, le fonds de fonds « ANAVA », d’une taille cible de 100 millions d’euros, structuré et qui a déjà approuvé sa participation dans 6 fonds sous-jacents (sur un objectif de 13) et deux acquisitions historiques en 2023, de « Instadeep », et « Expensya », nous pouvons affirmer qu’un nouvel écosystème est en train de voir le jour pour une nouvelle économie et qu’un nouveau « mindset » (état d’esprit) est en train de naître pour une nouvelle génération d’entrepreneurs bâtisseurs. Il va falloir juste huiler la machine », a déclaré Bettaieb dans une interview à TAP.
2021 a vu le lancement effectif du fonds de fonds « ANAVA », premier du genre libellé en euros qui vise à booster l’écosystème du capital risque en Tunisie, à travers la création de 13 Fonds sous-jacents à l’horizon 2024 pour répondre aux besoins d’investissement des startups dans leurs phases d’amorçage, de croissance et d’expansion internationale », a-t-il rappelé .
Et d’expliquer : « Comme pour tout nouveau projet nécessitant de nouveaux mécanismes, la collaboration avec l’administration a pris plus de temps que prévu. Pour avancer, il y a nécessité de trouver des solutions, même temporaires, pour résoudre certaines questions juridiques complexes, dont celles relatives à la réglementation des changes. Ceci nous a contraint à prolonger la phase de mise en œuvre opérationnelle du fonds de fonds, de la création des fonds sous-jacents, et du déblocage des fonds destinés aux startups surtout celles résidentes ».
Des ambiguïtés juridiques et des solutions temporaires
Sur ce point, le premier responsable d' »ANAVA », Zied Ben Othman, a précisé que « sur les 13 fonds sous-jacents programmés, 7 fonds seront dédiés à la phase d’amorçage des startups, 4 à la phase de croissance et 2 à la phase d’expansion ».
« ANAVA a pu souscrire, au cours du 1e semestre de 2022, dans deux fonds sous-jacents : « 216 Capital Fund I » et « Badia Impact Squared ». La même année, nous avons approuvé 3 autres fonds non encore opérationnels. En octobre 2023, le fonds de fonds a effectué une 3e souscription de 5 millions d’euros dans un troisième fonds « Titan Seed Fund I » pour soutenir les startups dans le secteur de la Deep Tech en Tunisie. Ce qui donne au total, 6 fonds approuvés, dont 3 opérationnels, 30 millions d’euros engagés et environ 15 millions investis. Trois autres fonds passeront bientôt devant le comité d’investissement. A ce rythme-là, je pense que nous assumons bel et bien notre mission et nous approchons de notre objectif » a-t-il dit dans la même interview.
Toujours selon lui, « l’objectif ultime de la levée de fonds par des fonds sous-jacents est d’orienter le financement vers les bénéficiaires finaux, les start-ups. Mais cette orientation du financement ne se fait pas au rythme voulu par notre fonds, elle est loin des attentes des startups en phase d’amorçage dont le nombre de celles labellisées frôle aujourd’hui les 1000 startups. La loi exige des autorisations quand il s’agit d’investissements en devises de fonds résidents dans des startups résidentes. Une solution temporaire a été mise en place grâce à une autorisation préalable de la Banque centrale de Tunisie pour permettre ces opérations en monnaie étrangère. Cependant, une révision du Code des changes est nécessaire pour systématiser ces autorisations quitte à les supprimer pour les startups labellisées pour commencer « .
L’autre obstacle, a-t-il ajouté, concerne l’ambiguïté juridique entourant l’avantage de dégrèvement fiscal au profit des fonds d’investissement spécialisés (FIS).
La tentation de l’exode
A la question de savoir si l’écosystème national des startups est suffisamment favorable pour qu’une jeune pousse puisse grandir, sans être contrainte à quitter le pays, surtout après l’acquisition des startups tunisiennes « Expensya » (spécialisée dans l’automatisation du processus de gestion des dépenses des entreprises) et « InstaDeep » (spécialisée en intelligence artificielle), par des groupes mondiaux », respectivement « Medius » et « BioNTech », le DG de « Smart Capital » a répondu « nous voyons souvent, des startups de toutes les nationalités s’installer à New York ou à Silicon Valley. Il ne faut pas s’inquiéter quand nos startups quittent vers des horizons plus grands. Au contraire, c’est ce qu’il y a de meilleur pour leur avenir, d’autant plus que ces dernières gardent souvent des antennes en Tunisie. Pour votre information, ANAVA conditionne ses investissements dans des fonds régionaux qui investissent dans des startups tunisiennes voulant ouvrir des filiales à l’international, à l’exigence d’avoir 50% de l’effectif total de la startup, basé en Tunisie ».
« La Tunisie est en effet un petit marché, qui n’offre pas de grandes opportunités en termes de financement en devises et ni assez de flexibilité pour recruter des talents internationaux et dont le cadre légal et administratif présente encore certains contraintes. Les startups d’une certaine taille choisissent ainsi, de basculer vers l’international pour pouvoir évoluer ».
« Cela fait aussi partie de notre mission de mettre en contact nos startups avec des partenaires internationaux de manière à leur donner l’opportunité de grandir, en Tunisie ou ailleurs », a-t-il assuré