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Avec un score brejnévien mais vrai, Kais Saied s’envole vers un quinquennat tumultueux !

Les Tunisiens viennent de porter au pinacle de leur Etat un citoyen qu’on aurait pris à s’y méprendre pour un « monsieur-tout-le-monde » , issu de la classe moyenne, qui sirote son breuvage matinal au café du coin, sans le moindre chichi, frais émoulu de la vie active comme professeur de Droit constitutionnel, se destinant à de paisibles jours de jeune retraité comblé et sans problèmes.

Un parcours presque sans aspérité comme on en voit sous toutes les latitudes mais un destin hors pair qui auréole le vainqueur du second tour de l’élection présidentielle anticipée tunisienne, Kais Saied, auquel personne ne pouvait prêter, voici quelques mois, des ambitions présidentielles ni de velléités politiques tout court. C’est comme si, à l’instar de Monsieur Jourdain pour la prose, Monsieur Saied faisait de la politique sans le savoir.

Et pour cause, il a progressivement déjoué tous les pronostics pour, enfin, remporter le scrutin à une très écrasante majorité. Un raz de marée dont on a jamais connu   de précédent en Tunisie, sauf dans les consultations électorales d’avant la révolution qui, pour les raisons que personne n’ignorait, se soldaient par des scores brejnéviens, autour de 99%. Il n’en demeurait pas moins que pour le second tour de l’élection présidentielle, avec une participation de 57,8%, plus d’un électeur sur deux s’était déplacé, pour accorder à Saied 72,71% des suffrages, alors que son concurrent, Nabil karoui, n’en récoltait que 27, 29%.

Saied pontifie ex cathedra

Pourtant, Il n’y avait rien dans sa gibecière qui pût le propulser à pareille destinée. Il n’avait ni parti politique, ni logistique dédiée, encore moins un programme électoral présidentiel. Des idées, il en avait sans doute, mais il les gardait sous le boisseau, ne s’en épanchant qu’en n’y étant obligé, dans des interviews aussi rares que triées sur le volet, ce qui lui a valu bien des inimitiés, où il pontifiait ex cathedra, se forgeant, sans vraiment le vouloir, une marque de fabrique à laquelle il n’a jamais entendu déroger.

Serait-ce encore le cas alors que le nouveau président de la République, qui se veut le chantre de la démocratie directe, et du pouvoir émanant de la base, sera bien en peine de se faire comprendre dans des contrées et territoires où ses talents oratoires ne feraient pas de sens ni trouver acquéreur. Dans le fond aussi, sa « boîte à outils » telle qu’elle se dessine serait de peu d’effet pour redresser des situations locales, par endroits, désespérantes, et d’autres, à l’échelle nationale, démesurément compliquées pour se prêter aux approches proposées.

C’est que l’élément central du dispositif que Kais Saied projette de mettre en place porte sur la refonte radicale de la démocratie telle qu’elle est entendue en Tunisie, en substituant aux structures traditionnelles des partis une « démocratie des individus ». Plutôt que le système actuel de députés élus au suffrage direct, Saied s’est fait le champion d’un modèle démocratique à trois niveaux. Selon ses propositions, les membres du corps législatif du pays seraient nommés par les conseils régionaux, eux-mêmes nommés par les petits conseils municipaux du pays, dont les membres seraient élus en fonction de leur caractère, plutôt que de leur appartenance politique ou idéologique.

Le courage qu’il faut !

Peu de gens doutent de la sincérité du nouveau président à cet égard. Toutefois, pour opérer les changements constitutionnels nécessaires à la mise en œuvre de son système, il aura besoin d’une majorité des deux tiers au Parlement récemment élu, où aucun parti ne s’est assuré une majorité définitive et où un gouvernement doit encore être formé.

C’est à se demander si Kais Saied est le meilleur profil pour le poste de président de la République. La question a été soulevée par le principal chercheur au Royal United Services Institute et au Carnegie Endowment for International Peace, Hisham Hellyer qui estime que la plupart des questions politiques sur lesquels les électeurs voudraient normalement en apprendre davantage sont encore inconnues. Mais Saied a certainement déjà gagné la confiance de différentes factions, dont Ennahdha, et le groupe centriste qui s’est montré engagé dans le processus politique en Tunisie, ainsi que de nombreux groupes de gauche. Mais c’est la performance qu’il va livrer dans les mois à venir qui déterminera s’il a le courage qu’il faut. De plus, il devra travailler avec un parlement et un chef du gouvernement qui ne représentent aucun parti à part entière. « Les défis à relever pour y parvenir, compte tenu notamment des problèmes économiques et de sécurité auxquels le pays est confronté, sont colossaux », constate le chercheur britannique.

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