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Gaza : La guerre souterraine

La guerre qui se déroule actuellement à Gaza a été théoriquement déclenchée pour venger la mort des 3 jeunes israéliens, enlevés le 12 juin, puis retrouvés sans vie le 30 juin à Hébron en Cisjordanie. Après son déclenchement le 8 juillet 2014, il a été assigné à cette guerre d’autres objectifs: détruire les tunnels et décapiter l’organisation islamiste « pour que le conflit ne se répète pas avec un Hamas plus fort à l’avenir, et que toute velléité de s’attaquer à Israël soit une décision difficile à prendre », selon l’expression des responsables israéliens.

Depuis la dernière opération israélienne d’envergure contre le Hamas en décembre 2008-janvier 2009, plusieurs choses ont changé dans la région. Tout d’abord, l’avènement du Printemps arabe qui a permis au Hamas, dans le cadre de la montée de l’islamisme dans la région, de se doter d’une grande marge de manœuvre , de moyens humains et financiers énormes et d’une capacité militaire jamais égalée. L’arsenal du Hamas comprend désormais des roquettes (entre 9 000-10 000 roquettes, selon les estimations israéliennes) de plus grande portée pouvant atteindre le nord d’Israël( et même l’Aéroport Ben Gourion comme cela a été le cas, ces derniers jours), un grand réseau de tunnels sous la bande et entre Gaza et les frontières avec l’Egypte et Israël, pour s’approvisionner et mener des opérations militaires et des bunkers pour garantir la sécurité des hauts dirigeants des organisations palestiniennes et même des cadres moyens des branches militaires souvent visés par des attentats.

Sur le plan politique, la situation est plutôt mitigée, car l’alignement du Hamas sur l’islamisme des Frères Musulmans, lui a aliéné à peu près tout le monde : les Syriens, les Iraniens, les Saoudiens et les Emiratis. Et depuis juillet 2013 avec la perte des Egyptiens, le Hamas a perdu ses arrières dans un pays incontournable dans tout arrangement diplomatique. Seuls la Turquie d’Erdogan et l’Emirat du Qatar apportent encore au Hamas un appui inconditionnel.

Evidemment, cette conjoncture n’a pas empêché les troupes de Hamas de s’activer. Ils ont creusé tunnels et bunkers, mais en face, Israël a aussi préparé un système anti-missile « le Dôme de fer », un système qualifié par ses experts d’efficace entre 75 et 90%.

Mais dans les faits, cette guerre déclenchée depuis 3 semaines et qu’Israël présentait comme gagnée d’avance a pris un nouveau tournant. L’armée israélienne s’est aperçue, depuis lundi 21 juillet, que les combats seront durs et les pertes énormes (53 soldats sont tombés et 130 autres blessés dont plusieurs gravement, selon les chiffres de mardi 29 /7/2014). Mais pour compenser ces défaillances, Benjamin Netanyahu, commence à insister sur le caractère politique de ses objectifs. Il a annoncé son intention de décapiter les organisations islamistes et surtout le Hamas, en visant la maison de son dirigeant (Ismaël Haniyeh) et en tuant le chef local du Jihad islamique, après s’en être tenu, au départ, à la destruction des 40 tunnels. Et profitant de la radicalisation sans précédent des Israéliens qui s’opposent à 86 % à un cessez-le-feu permanent, Netanyahu s’adresse aux unités militaires israéliennes en action pour leur dire que l’opération « Bordure Protectrice » peut durer encore longtemps.

Les temps ne sont plus à la modération ni à la nuance. Les informations en provenance des hôpitaux de Gaza indiquent qu’ils reçoivent quotidiennement des vagues successives de blessés à raison de 150 à 200 dont une bonne moitié de femmes et d’enfants. Les témoignages livrés par des urgentistes de Médecins Sans Frontières(MSF) au Monde.fr, révèlent que les femmes et les enfants constituent la moitié des 7000 blessés recensés jusque-là. Particulièrement les enfants sont complètement choqués, traumatisés, et « quand on entend un enfant pleurer aux urgences, c’est rassurant pour nous, plutôt que de le voir complètement mutique, et les femmes crient pour extérioriser leurs souffrances et traumatismes  » soulignent les médecins de MSF interrogés par le site français.

En réaction à cette situation, le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon, a exhorté, lundi 28 juillet, au nom de l’humanité, toutes les parties à arrêter la violence, mais n’a pas été entendu par les dirigeants israéliens. Et même le secrétaire d’Etat américain John Kerry qui a affirmé, mardi, que Netanyahu lui a demandé d’aider à sceller une trêve, et s’est conformé à l’esprit des consultations internationales en cours, a été dénoncé par les autorités israéliennes qui l’ont traité de traître. Kerry a fait contre lui l’unanimité du groupe, pourtant disparate de dirigeants politiques israéliens – de Naftali Bennett et Avigdor Liberman de la droite, à YairLapid et Tzipi Livni du centre-gauche, en passant évidemment par Netanyahu. Le plan proposé par Kerry porte sur la démilitarisation de Gaza contre la levée de son bouclage et sa reconstruction, formule qui rappelle sur un aspect l’accord sur la destruction des armes chimiques en Syrie en août 2013 , et sur l’autre l’équation « Pétrole contre Nourriture » entre l’ONU et l’Irak dans les années 1990. Considéré par les dirigeants israéliens comme un homme hypocrite et dangereux, d’aucuns ont prétendu que la proposition de Kerry a été rédigée pour Khaled Meshaal lui-même.

Fixés sur les tunnels, les Israéliens considèrent que les attaques qui sont préparées par leur biais sont un réel danger, et appellent à la reconquête de Gaza pour éviter leur reconstruction. D’ailleurs, les 5 soldats tués lundi 28 juillet étaient tombés hors des frontières de Gaza et étaient surpris par des commandos du Hamas sortis d’un tunnel. Les autorités israéliennes prétendent que le coût de la construction du réseau des tunnels est estimé à 1 million de dollars, affirmant que ces tunnels sont le plus souvent bétonnés et assez grands pour permettre à des commandos de passer, alors que ceux des frontières égyptiennes sont simples et pas coûteux.

La directrice d’un institut de sondage israélien résume le sentiment général en disant: » L’opinion publique, qui était très divisée au début de l’opération terrestre dans la bande de Gaza, a totalement basculé, lorsque les images vidéo de l’armée ont montré une dizaine de terroristes sortir d’un de ces tunnels en territoire israélien avant d’être éliminés. Le danger est devenu tangible pour de nombreux Israéliens qui voient déjà des islamistes surgir au beau milieu de leur salon ».

La riposte israélienne a été conçue également par le biais du Dôme de fer, destiné à intercepter et neutraliser les roquettes tirées depuis la bande de Gaza. La première batterie de ce système a été installée en mars 2011 près de la ville de Beersheva dans le sud, à 40 km de la bande de Gaza. D’autres batteries ont ensuite été déployées le long de la frontière avec Gaza, puis à la frontière entre Israël et le Liban, afin de prévenir les tirs de roquettes du Hezbollah.

Le système détecte les tirs dans un rayon de 4 à 70 km grâce à un radar mobile, quelle que soit la météo. Il identifie ensuite le type de missile et analyse sa trajectoire, afin de calculer le point d’impact. Si une zone habitée est menacée, le système, qui peut intercepter simultanément plusieurs engins, se met en branle et abat la cible en plein vol, en quelques secondes.

Les experts israéliens évoquent un taux de réussite des interceptions entre 75% et 90%. Mais outre son coût élevé (un missile coûte environ 50.000 dollars), son efficacité a été mise en doute et les roquettes palestiniennes ont atteint l’Aéroport Ben Gourion, provoquant l’annulation par de grandes compagnies internationales de dizaines de vols pendant plusieurs jours.

Les observateurs s’attendaient depuis des mois au déclenchement de cette guerre. Israël et le Hamas voulaient revoir les termes des accords passés entre eux depuis 2009. Mais on s’aperçoit que les accords précédents portaient, à chaque confrontation, sur la cessation des bombardements israéliens contre l’arrêt des tirs des roquettes, sans alléger le bouclage de la bande de Gaza, instauré depuis avril 2007, date de la mainmise du Hamas sur la zone. Mais maintenant, on commence à parler d’un accord global qui portera sur la reconstruction de l’agglomération et l’ouverture des points de passage frontalier de Gaza, contre une démilitarisation totale des organisations palestiniennes.

Aboussaoud Hmidi

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