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GDA : Chacun tire l’eau à son moulin !

Bien des crises en rapport avec l’eau en Tunisie ont partie liée avec les groupements de développement agricole (GDA).Il s’agit de structures locales en charge de la gestion de l’eau et certaines ressources naturelles (forêts, pâturages, périmètres irrigués) et qui sont, à leur échelle, en proie à d’énormes difficultés d’ordre financier, dues aux impayés. Car, leurs recettes proviennent exclusivement, de la vente de l’eau. Or, le taux de recouvrement des factures d’eau ne dépasse pas 40% des volumes consommés par les agriculteurs.
Ce phénomène s’est aggravé depuis 2011, entraînant un endettement de plus en plus contraignant et affectant la capacité des GDA à assurer l’entretien des réseaux et l’approvisionnement en eau des adhérents, ont souligné des spécialistes dans une conférence en ligne organisée, récemment par l’Observatoire Tunisien de l’Economie en partenariat avec Observatoire Tunisien de l’Eau  » Association Nomad08 « , sur la gestion de l’eau dans le milieu rural, les problèmes auxquels font face les GDA et l’impact sur le secteur agricole.
Il n’y a pas que le volet financier qui entrave la bonne gouvernance de ces structures, mais aussi, le manque de transparence dans la gestion financière des GDA et la faible légitimité des conseils d’administration, souvent contrôlés par les autorités locales et les acteurs économiques influents, d’après les intervenants.
Un casus belli permanent
Chacun tire l’eau à son moulin, ce proverbe français résume une grande partie des problématiques qui agitent les GDA. En effet, lLes pressions croissantes qu’exerce l’explosion de la demande d’eau et l’aggravation des conflits opposant les usagers des différents périmètres irrigués, donnent lieu à des protestations régulières, de la part des bénéficiaires initiaux des eaux des barrages et des petits irrigants qui contestent la position influente de certaines associations d’usagers pour l’accès à l’eau.
« On va voir des blocages et des problèmes concernant l’eau dans toutes les régions. Des problèmes de transfert (Kairouan), des problèmes de pollution (Gabès et Gafsa), des problèmes liés à la pénurie des ressources (Kairouan) et d’autres liés à la gestion et la répartition des ressources. Il faut préparer les outils pour résoudre ces problèmes », prévient l’universitaire et Maître de Recherche en politiques agricoles et de développement rural, Mohamed Elloumi.
L’universitaire, qui est revenu sur l’historique et les difficultés auxquelles font face ces structures, a cité, entre autres, l’absence d’une démocratie locale, avant la révolution. »A partir de la révolution, le contexte a changé, mais il a une remise en cause qui va dans deux sens. L’un est positif, parce qu’il va dans le sens de la mise à profit d’une conjoncture marquée par la démocratie et l’autre est négatif, puisqu’il va dans le sens de la dérive et l’anarchie « , a-t-il développé.
La dictature des plus influents
Autre difficulté citée par Elloumi, l’absence de délimitation des nappes et des ressources. « Plusieurs GDA exploitent une seule nappe, donc on ne peut pas parler d’une gestion durable de la ressource, faute de coordination. Chaque GDA veut pomper plus, sans respecter le droit d’autres bénéficiaires ». Il s’agit également, de l’absence de règles et de sanctions sérieuses par rapport aux dépassements, dans la gestion commune et du pompage direct à partir des nappes qui encourage, indirectement, la dictature des plus influents.
« Il faut créer une autorité pour assurer le contrôle du pompage, la répartition équitable de l’eau pompée et le bon fonctionnement des GDA », recommande Elloumi. Les GDA devraient aussi être dotés, de cellules ou organes de gestion des conflits  » ce qui n’est pas le cas en Tunisie ».
Mohamed Salah Glaied, ingénieur et spécialiste en eau a évoqué, lui, une stagnation dans le fonctionnement des GDA qui date depuis des années.  » Ces structures sont restées sans développement. « Leur gouvernance n’a pas changé, depuis plus de 20 ans. Ce qui a donné lieu à plusieurs difficultés et problèmes, dont l’endettement, la corruption, la mauvaise gestion ».
Glaied a estimé qu’il est temps non seulement, de repenser la gouvernance des GDA, mais aussi, toute la politique agricole concernant les cultures irriguées en Tunisie. » Dans le contexte des changements climatiques, la pluviométrie va baisser de 25 à 35% en Tunisie. Les autorités devraient prendre cela en considération et adapter les cultures à cette nouvelle donne de manque de précipitations et de stress et pauvreté hydrique « .Pourquoi continuer à promouvoir des cultures spéculatives plus consommatrices en eau ?, se demande le spécialiste en eau, prenant l’exemple des cultures des tomates destinées à l’exportation et des fraises au Cap Bon, des courges à Sidi Bouzid et d’autres légumes de saison qui nécessitent de grandes quantités d’eau.
Un réseau hydraulique vétuste
L’évolution de ce genre de cultures a non seulement pour conséquence d’augmenter les besoins quantitatifs en eau, mais également, d’étendre la période de pointe de la demande en eau, qui s’étale désormais de mai à septembre. » Il faut revoir les cultures et les adapter au contexte du changement climatique et lutter contre le gaspillage de l’eau et revoir le tarif de l’eau dans le milieu rural et urbain « , préconise Glaied. Il estime qu’il est temps, aujourd’hui de repenser l’eau potable dans le milieu rural, parce que cette ressource vitale y est un pilier de développement, dans la mesure, ou elle aide à préserver les élevages et à sédentariser les populations rurales. Bassem Ben Taher, dirigeant du GDA « Sahl Rouman » à Dhehiba (Tataouine), a fait état d’un problème de gestion qui  » n’est pas financier « , mais qui réside dans l’absence totale de l’administration, depuis plus d’une année.  » Notre groupement était à l’arrêt, le réseau était en panne. Nous avons dépensé, nous groupe de jeunes, de notre propre argent pour le réparer « .Le problème de ce GDA du sud de la Tunisie n’était pas, du tout, la pénurie de l’eau, selon le responsable. C’est plutôt la vétusté du réseau hydraulique et l’inexistence des pièces de rechange. En effet, sur un total d’environ 2500 GDA en Tunisie, seulement 44% sont considérés actifs (disposant de contrats de gérance), en ce qui concerne la gestion participative de l’eau potable en milieu rural et de l’irrigation.
Source : TAP

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