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Kais Saïed, le chef d’Etat qui découvre ses limites, et semble s’y résoudre

Cela fait 75 jours que le chef de l’Etat tunisien est installé à Carthage, avec résidence à Mnihla, dans le fauteuil du chef d’Etat sans grandes prérogatives. Une position contre laquelle on l’avait mis en garde, et où il s’enlise sans y prendre garde. Saïed ne se déplace qu’en voiture, délègue ses voyages à l’étranger à Youssef Chahed, et rate les funérailles d’Etat du général algérien Gaïd Salah et va certainement manquer des rendez-vous internationaux importants pour la Libye. Il fait beaucoup de terrain, et pousse parfois un coup de gueule, comme pour rappeler qu’il est toujours là.

Deux faits essentiels, dans ce début de mandat de Saïed, viennent d’avoir lieu. D’abord, un chef d’Etat qui se rend à l’évidence qu’il a trop peu de pouvoirs, pour pouvoir changer les choses en Tunisie, et abandonnerait presque son «idée». Il n’avait pas de programme, comme il l’avait dit depuis le 1er tour des présidentielles de 2019, et le voilà qui baisse manifestement les bras par rapport à sa fameuse idée de tout changer par le bas, et surtout par le biais d’une révision de la constitution.

Rached Ghannouchi a en effet relevé, dans une déclaration à l’issue de sa rencontre lundi avec Kais Saïed, que «le président La République tient à la réussite du gouvernement Jemli et à ce qu’il obtienne le vote de confiance sans conduire à une alternative constitutionnelle, ou à ce que l’on appelle le gouvernement du président, en raison de cette inaction et de cette perte de temps». Or, c’était justement ce levier, suivi d’une possible dissolution de l’ARP si «son» gouvernement ne passait pas, qui devait le mettre en position de changer les choses et concrétiser son «idée» comme il l’appelait.

On pourrait, peut-être, objecter que c’est là une réaction d’un véritable homme d’Etat, qui se rend compte que son pays irait à la dérive, si le gouvernement Jemli ne passait pas. Ce dernier n’est pas ce qui est arrivé le mieux à la Tunisie, mais ne peut disposer du temps qui veut, et la Tunisie n’en a pas les moyens financiers. La Tunisie est dirigée, depuis le 15 novembre 2019, par un gouvernement de gestion des affaires courantes, dont les prérogatives, aussi, ont des limites.

L’hypothèse d’un Kais Saïed assagi, et qui se rend compte après 75 jours, qu’il est de plus en plus impossible, comme le disait Youssef Chahed lors des dernières Journées de l’Entreprise de Sousse, de changer la Constitution, n’en reste pas moins valable.

Ensuite, c’est un chef d’Etat pan-arabiste, et qui s’investit dans un bourbier où il ne maîtrise rien. Faute de libérer la Palestine, comme il le promettait en campagne électorale, il tente de prendre la main dans le conflit libyen. Très vite, il se retrouve seul à vouloir le pays pour un pays avec lequel les ambitions internationales et régionales n’en avaient pas encore fini.

On ne sait pas si c’est parce qu’ils connaissent qu’il ne peut voyager (Aérodromophobie ou manque de passeport ?), ou parce qu’il n’est d’aucune utilité, ou encore parce qu’il n’était plus un «non-aligné» depuis qu’il avait reçu le président turc Erdogan. Mais le fait est qu’il n’a pas été invité pour les deux plus importantes réunions internationales sur la Libye (Allemagne et Egypte). Un sujet qu’il essayé de faire sien, car relevant de la sécurité nationale, et de la diplomatie qui lui revient de la Constitution.

De toute évidence, Kais Saïed n’est pas Béji Caïed Essebssi, et Palerme où BCE avait pu jouer le facilitateur et le pacificateur, n’est pas Berlin qui s’apprête à réunir les parties concernées par la crise libyenne, et dont la Chancelière s’était limitée à un entretien téléphonique avec le chef de l’Etat tunisien, sans qu’elle ne lui lance une invitation officielle pour la réunion de Berlin, mais uniquement pour une visite d’Etat qu’il n’honorera probablement pas de sitôt.

On comprendrait, après tout cela, que le chef de l’Etat adopte une communication sans relief aucun, seulement réactive. Une communication où il ne communique rien. D’abord, par effet de faciès avec son visage sans expression, sauf grosse colère et emportement et très rarement souriant. Ensuite, par la voix d’une respectable journaliste qui n’a cependant rien d’une femme de média, et qui reste dans la Com défensive et réactive de son patron, avec des communiqués de presse, plats, incolores, inodores, et qui ne donnent rien du réel contenu des audiences, et des images préfabriquées dans les studios de la Présidence, destinées aux journaux télévisées . Un style de communication d’un autre siècle, renforcé par l’absence de toute possibilité de communication directe avec la chargée de Com, sauf à travers un ligne Fax, et en l’absence de toute plateforme média interactive à la disposition de la presse, autre que les radios privées, à toute heure et sur tout sujet. Le néolithique du journalisme, en somme !

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