L’office tunisien des céréales a lancé un appel d’offres international pour l’achat d’environ 50 000 tonnes de blé dur et 50 000 tonnes d’orge destinée à l’alimentation animale, ont indiqué mardi des négociants européens. La date limite de soumission des offres de prix dans le cadre de l’appel d’offres est fixée au mercredi 10 janvier.
Ce serait la dernière en date des sorties de la Tunisie sur le marché céréalier international, une décision qui intervient alors que le pays cherche à assurer un approvisionnement suffisant en céréales pour la consommation intérieure durant la période janvier-février.
En augmentant ses importations de céréales, la Tunisie espère maintenir la stabilité du marché intérieur et remédier à toute pénurie potentielle. L’importateur public de céréales du pays joue un rôle crucial dans la gestion de la chaîne d’approvisionnement en céréales et dans la garantie de la sécurité alimentaire de la population.
La décision de la Tunisie d’acheter un volume important de blé dur et d’orge reflète l’importance de ces céréales dans la cuisine et l’agriculture locales. Le blé dur est un ingrédient clé des aliments traditionnels tunisiens tels que le couscous et les pâtes, tandis que l’orge est utilisée dans l’alimentation animale et la brasserie.
L’appel d’offres international devrait donner lieu à un processus compétitif, les fournisseurs de céréales se disputant l’opportunité d’obtenir un contrat avec la Tunisie. Les soumissionnaires retenus bénéficieront non seulement de la vente de leurs céréales, mais contribueront également aux efforts déployés par la Tunisie pour répondre à ses besoins alimentaires, soulignent maints experts internationaux.
Des enjeux considérables
Au demeurant, les enjeux liés aux céréales sont considérables du fait de leur poids dans l’alimentation de la population, dans la production agricole et agro-alimentaire et dans l’ensemble de l’économie, d’une façon générale. C’est pourquoi l’intervention de l’Etat a toujours été importante dans la filière céréales. La politique céréalière menée depuis l’indépendance présente une évolution, passant d’un volontarisme étatique visant l’intensification et la modernisation de la production et le contrôle de la filière, à une économie distributive en faveur des consommateurs, puis à un «libéralisme protectionniste» dont la régulation de la filière reste encore en grande partie gérée par l’Etat .

Selon une étude de la FAO, la production céréalière participe en moyenne pour une part de 13% à la valeur ajoutée agricole, sa contribution au PIB reste très minime de l’ordre de 1,44% en moyenne sur les 10 dernières années. La céréaliculture occupe près de 33% de la superficie agricole utile (SAU) et mobilise environ 248500 exploitations agricoles (50% du nombre total des exploitations) dont à peine 11542 de plus de 50 ha (5% des exploitations, détenant 40% des superficies) alors que les exploitations de moins de 10ha ne représentent 63% de l’effectif total. Elle assure une part importante de l’alimentation des bétails et alimente la chaîne de transformation de l’industrie agroalimentaire à travers les minoteries et les semouleries.
Ceci pour ce qui est de l’économique, sur le plan social, ce secteur joue un rôle important dans la fixation de la population rurale et la préservation de l’emploi agricole. La céréaliculture offre annuellement 2,5 millions de journées de travail, soit 9% de l’emploi agricole total.
Un secteur fragile et dépendant du marché mondial
La céréaliculture en Tunisie est essentiellement pluviale. Seuls près de 100 milles ha bénéficient de l’irrigation en cas de sécheresse. Ainsi, les emblavures, les rendements et le ratio superficies récoltées / superficies emblavées sont largement dépendants des aléas climatiques, principalement de la pluviométrie. Malgré une nette évolution de la production, celle-ci demeure fluctuante, enregistrant un déficit chronique de l’ordre de 50% en moyenne par rapport aux besoins de la population.
En conséquence, la majorité des besoins annuels sont assurés par les importations, ce qui a conféré à la Tunisie un taux de dépendance vis-à-vis des céréales importées de 33% pour le blé dur, 85% pour le blé tendre et 71% pour l’orge ; soit un taux moyen de 63% pour l’ensemble des céréales. En valeur, les importations céréalières représentent une part qui se situe entre 40 et 50% des importations alimentaires.
Face à ce constat, le secteur céréalier demeure un secteur fragile très dépendant du marché mondial qui connaît de plus en plus une fluctuation et une volatilité croissante des prix, sous l’effet des changements climatiques, des bouleversements politiques et économiques des pays, de la croissance démographique et économique mondiale et de l’expansion de la demande, notamment celle des pays émergents de l’Asie, nouveaux consommateurs de céréales.
D’ailleurs, la Tunisie figure parmi les pays les plus vulnérables à un choc de prix durable sur les denrées alimentaires, d’après la que Mondiale. Aussi est-elle amenée à revoir régulièrement sa politique céréalière compte tenu de l’importance stratégique et opérationnelle de l’organisation des flux des produits notamment en termes de coût et de qualité dans une approche de sécurité alimentaire, menacée par les nouveaux comportements de gaspillage des consommateurs.