AccueilLa UNELe Code des eaux, toujours aussi clivant!

Le Code des eaux, toujours aussi clivant!

L’Assemblée des représentants du peuple a repris, jeudi , sa plénière consacrée à l’examen du projet de loi organique n° 66/2019 du code des eaux, soumis par la commission parlementaire de l’agriculture, de la sécurité alimentaire, du commerce et des services annexes, le 17 juin dernier. La séance plénière avait été levée, mercredi soir, suite à une altercation verbale entre la députée du Parti Destourien Libre (PDL) et d’autres du Mouvement Ennahdha.

La nouvelle version du projet du code des eaux comporte 123 articles, dont 98 ont été modifiés. La qualifiant de « révolutionnaire », certains députés ont souligné l’importance de ce projet de loi dans ce contexte sanitaire délicat, marqué, notamment, par des coupures répétitives dans plusieurs régions. Des élus, à l’instar de Ameur Laaryedh, du mouvement Ennahdha ont appelé à intervenir en urgence afin de mettre fin à ces coupures d’eau. De son côté, le député de Qalb Tounes, Jawhaer Mghirbi a suggéré de reporter l’examen de ce projet de loi, afin de connaître les opinions de toutes les parties.

L’ancien code des eaux remonte à 1975. Selon les experts, cette version ne répond plus aux exigences du contexte socio-économique actuel de la Tunisie qui souffre d’un stress hydrique. La ligne de la rareté des eaux à l’échelle mondiale est fixée à 500 m3 par individu/an alors, que la moyenne en Tunisie ne dépasse pas la barre de 400 m3, un chiffre qui devrait, encore baisser à l’horizon 2030, pour atteindre 350 m3, selon des estimations mondiales.

Le projet du code de l’eau a été proposé par le gouvernement de Youssef Chahed depuis 2018. Depuis, il a fait l’objet de plusieurs modifications.

 Un projet « hautement stratégique »

L’adoption du nouveau code des eaux, actuellement discuté en plénière à l’ARP, constituerait  un tournant dangereux pour le pays, selon Raoudha Gafraj, experte en ressources en eau et changements climatiques.

Gafraj souligne dans un post sur facebook que le nouveau code témoigne de l’incapacité du ministère de l’Agriculture, des ressources hydrauliques et de la pêche à gérer ce secteur. Cette experte et universitaire bien connue dans le domaine, pointe du doigt des contradictions dans le nouveau projet de code, notamment entre l’affirmation de la mainmise de l’Etat sur les ressources en eau et la régularisation de la vente de l’eau par des privés, laquelle constitue selon ses propos, une forme de privatisation.

L’assainissement des eaux, objet de concession depuis 2008, constitue selon ses propos, un second exemple de privatisation, étant donné que les eaux assainies peuvent être réexploitées.

S’agissant de la garantie de l’égalité de l’accès à l’eau et à l’assainissement, que le projet du nouveau code tend à réaliser, Gafraj estime qu’elle serait impossible étant donné que les coûts du raccordement des agglomérations rurales de moins de 3000 habitants au réseau d’assainissement sont trop chers et non rentables, d’autant que les projets de raccordement sont généralement, financés par des bailleurs de fonds internationaux.

Elle estime, en outre, que le nouveau projet n’a pas traité, d’une manière approfondie, le rapport entre les ressources en eau et les changements climatiques, notant que la création d’un conseil supérieur de l’eau, présidé par le chef du gouvernement ne fait qu’alourdir les charges de l’équipe aux commandes de la Kasbah.

Cet avis n’est pas cependant, partagé par le Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux (FTDES) qui a participé aux négociations sur le projet du nouveau code des eaux.

Le forum avait au début critiqué la version soumise à l’ARP, estimant qu’elle reflète une tendance vers la marchandisation de l’eau et une volonté par ses auteurs à se plier aux exigences des bailleurs de fonds internationaux.

Il a, ensuite, estimé que le projet approuvé par la commission de l’agriculture, constitue un premier pas sur le chemin de la réalisation de la durabilité des ressources et de la justice hydrique.

Le département de la Justice environnementale du Forum a exprimé, en juin dernier, sa satisfaction quant au contenu du nouveau projet qui correspond à sa vision en matière d’amélioration des services de l’eau et de préservation de cette richesse nationale de laquelle dépendent la souveraineté nationale et la paix sociale.

Il a, également, appelé à soutenir les propositions de la commission relatives à la suppression du système des groupements hydrauliques et l’instauration de l’obligation d’établir l’égalité entre les villes et les zones rurales en matière de services d’assainissement.

Il a formulé l’espoir de voir un changement des politiques hydrauliques et agricoles conformément aux nouvelles propositions, souhaitant que les fonds nécessaires à ce changement soient mobilisés pour que le nouveau code ne reste pas lettres mortes.

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