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Le président savait-il réellement de quoi il parlait, en évoquant les médicaments et le fer ?

Montant hier, comme à son habitude  sur ses grands chevaux, le chef de l’Etat tunisien dénonçait devant la ministre du Commerce «  les marchandises qui ont disparu des marchés, dont le fer à béton, les médicaments, et qui sont stockés dans les dépôts des criminels qui veulent affamer le peuple  et s’adonnent à la spéculation, et veulent créer les crises pour gérer les crises », selon ses propos tenus  jeudi dernier devant la ministre qui ne pipait mot. Ne savait-elle pas la réalité du secteur ? Pourquoi n’en a-t-elle pas  parlé ? L’avait-il écoutée ? Son prédécesseur, qui connaissait le problème du fer à béton, avait été limogé !

–          Non, il n’y a pas de spéculation, mais des moyens financiers insuffisants pour la PCT

Peut-être que le chef de l’Etat ne savait pas que la PCT a le monopole de l’importation et de la distribution des médicaments en Tunisie, et qu’elle est l’acheteur national pour toutes les officines, les cliniques et les hôpitaux. En amont, il y a aussi la Direction de la Pharmacie et du Médicament qui  est une unité technico-administrative du ministère de la Santé publique. Elle gère tous les aspects administratifs liés à la pharmacie, au médicament et activités apparentées.

Les dettes de la PCT envers les laboratoires étrangers sont de l’ordre de 650 à 700 MDT. « Et au vu de cette situation, certains laboratoires nous fournissent au prorata des paiements. Les retards de paiements, et c’est une réalité que nous ne cachons pas, arrivent jusqu’à 2 ans. Cette dette était de seulement 100 MDT avant 2015, et s’était accrue en l’absence de solutions avec notamment les caisses sociales (Perte de 1,2 Milliard DT à la CNSSet les hôpitaux », disait le PDG de la PCT (Pharmacie Centrale) Béchir Yarmani sur un plateau TV, mettant ainsi directement le doigt sur le véritable problème de la pénurie des médicament.

Qu’il y ait véritablement spéculation des médicaments en Tunisie, comme ne le confirmait par ailleurs pas courageusement le PDG de la PCT sur une radio privée, ou vols de médicaments par des contrebandiers comme l’ont à plusieurs reprises confirmé les faits en Tunisie depuis 2011, il n’y a pour le chef de l’Etat, s’il en a la volonté et le pouvoir, qu’à décocher  ses missiles contre cette race de commerçants.

Pourquoi donc le chef de l’Etat préfère-t-il le populisme à la résolution des problèmes du médicament qui demande de l’argent ? Pourquoi a-t-il donné son accord à Nejla Bouden pour signer les augmentations avec l’UGTT au lieu d’injecter l’argent dans les caisses de la PCT ? Kais Saïed serait-il aussi mauvais gestionnaire ?  

–          Non, il n’y a pas de spéculation sur le fer à béton, mais un mauvais management des prix

Comme avec les médicaments, le chef de l’Etat tunisien avait aussi tempêté jeudi dernier au sujet du fer à béton, comme il l’avait fait en août dernier avec force menaces.

Peut-être que le chef, pourtant de tout l’Etat tunisien, ne savait-il pas que le pays qu’il dirige (Excusez le dysphémisme) n’a qu’une industrie de transformation et qu’il a depuis des lustres perdu les mines de fer, n’a que peu de pétrole, et que l’électricité dont le prix monte chaque année, tout comme les salaires qui grimpent  tout autant, sont des charges qui déterminent le prix final ?

Ne savait-il pas que les industriels du fer à béton importent la matière première (7,3 MDT en minerai métallurgique pour le seul mois d’octobre 2021), et que ces prix à l’importation augmentent ? Savait-il que le Dinar, s’il est pour l’instant officiellement stable, se déprécie lorsqu’il est exprimé en monnaie d’importation ? Connaît-il la règle économique du revenu à 100 + charges d’exploitation égales à 110 = un déficit de 10 %, et que les industriels du fer à béton doivent augmenter leurs prix pour préserver les emplois des salariés et leur éviter le chômage ? Saïed ne savait-il pas que même la ferraille, qui pourrait être une alternative, est exclusivement exportée par la société El Fouledh, une carcasse financière qui ne vit QUE de cela et n’a pas les moyens financiers pour le four qui transformerait la ferraille tunisienne en Tunisie.  

–          Des ministres terrorisés, et un président populiste qui ne discute avec personne

Ce que Africanmanager a pu savoir auprès de l’un des industriels du fer à béton, c’est que « le ministère a toujours été d’accord pour qu’on achète la billette au prix international, et qu’il rectifiera ensuite le prix local en conséquence », les cours mondiaux et leurs évolutions étant du domaine public. La même source nous assure que trois parmi les entreprises du secteur n’avaient pas acheté les billettes, pour cause de hausse des prix internationaux, et n’approvisionnent donc plus le marché. D’où, selon nous, la pénurie mentionnée par le chef de tout l’Etat, et incomprise par « Kais Saïed qui ne discute avec personne pour comprendre ce dont il parle », disent ceux qui le connaissent.

« Le problème, c’est que les ministères du Commerce et de l’Industrie n’osent pas prendre les décisions qui s’imposent et créent ainsi une pénurie qui dure depuis plusieurs semaines. Tous les ministres, y compris celui de l’Equipement savent que des  entreprises sont à l’arrêt. Il se trouve cependant que les ministres sont terrorisés, et n’osent plus prendre le taureau par les cornes et réviser les prix, quitte à bloquer l’économie », nous dit un opérateur qui préfère conserver l’anonymat dans un pays pour le président duquel homme d’affaires rime avec voleur et criminel et avec qui il refuse de discuter, « alors qu’il y a des réalités économiques, contre lesquelles personne ne peut rien » ajoute notre source. Une source propre à Africanmanager, qu’a par ailleurs déjà confirmée le président de la Chambre nationale des fabricants de fer, Hédi Ben Ayed, dans une déclaration vendredi dernier, à l’agence TAP.  

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