AccueilLa UNELe «super» ministre rêve debout, dans un gouvernement menacé par K. Saïed...

Le «super» ministre rêve debout, dans un gouvernement menacé par K. Saïed !

Après moins de six mois, le gouvernement Mechichi se réveille enfin à l’urgence financière pour son mandat. Du coup, ce sont quatre projets de lois sur des crédits bilatéraux qui dormaient dans les tiroirs de plus de deux ans qui sont réchauffés et renvoyés d’urgence à l’ARP.

Et c’est dans une atmosphère tendue de complète cacophonie, où les députés du PDL d’Abir Moussi tentaient par tous les moyens (Y compris de refaire ce que lui a fait un autre député) d’arrêter la tenue de l’AG que l’ARP s’empressait, mardi 2 février 2021, de faire adopter 3 projets de lois pour des crédits, sous le titre du renforcement des capacités de l’économie, celles du secteur bancaire et le secteur public. Trois crédits, d’un montant global de quelque 400 M€, à des taux variant entre 0,9 et 1 %, et remboursables sur une période de 30 ans.

Cela, alors que le chef de l’Etat donnait un coup de frein à toute l’activité du gouvernement Mechichi auquel il refuse le dernier remaniement, et s’allie à l’UGTT pour faire entrer tout le pays dans une nouvelle crise constitutionnelle, qui pourrait très bien handicaper le chef du gouvernement qui voudrait négocier un nouvel accord de crédit avec le FMI et un nouvel accord de garantie avec les USA. Une perspective d’une nouvelle phase d’instabilité gouvernementale, qui pourrait renvoyer tout cela aux calendes grecques.

  • Le « super-ministre » savait-il de quoi il parlait ?

    Un vote, où même le « super-ministre » de l’Economie a été chahuté et a préféré quitter la salle sans parler du projet de loi. Et c’est dans une atmosphère économique et financière tout aussi tendue et impossible à jauger pour manque d’informations à jour données par un ministère des Finances qui ne publie que des données financières obsolètes, que le super-ministre de l’Economie s’apprête à s’engager dans un long et pénible processus d’endettement international. Le « super-ministre » voudrait emprunter plus de trois milliards USD sur les marchés financiers internationaux et compter recourir à une garantie américaine pour endetter la Tunisie.

    Mais le peut-il, et la situation financière et économique de la Tunisie, le peut-elle ? Et de se demander même si ce « super-ministre » avait bien lu le dernier communiqué du FMI, et les préalables qu’il posait, même d’une façon indirecte, pour repartir sur un nouvel accord avec la Tunisie ? On se demande aussi si le « super-ministre » vivait bien en Tunisie et avait bien les pieds sur terre ? Et on se poserait même la question de savoir si ce « super-ministre » savait de quoi parler lorsqu’il annonçait son intention de lever 3 Milliards USD sur les marchés internationaux, ou lorsqu’il évoque la recherche d’une nouvelle garantie américaine ?
  • L’UGTT, la 1ère à mettre des bâtons dans les roues du « super » ministre

    « Nous renouvelons notre refus de céder les entreprises publiques et notre attachement à les sauver en revoyant leurs gouvernances, en réformant leur gestion, en soutenant leur financement, en remboursant leurs dettes envers l’État, et en offrant toutes les conditions d’efficacité, de concurrence et de leadership.

    Nous appelons le gouvernement à mettre en œuvre les accords signés avec de nombreux secteurs (…) et appelons à l’ouverture de négociations sociales dans son volet financier, pour la fonction publique, conformément à l’accord de février 2019 et dans le secteur public par la mise en œuvre de l’accord signé le 22 octobre 2018, ainsi que dans le secteur privé, selon l’accord signé le 19 septembre 2018 (…). Les négociations s’accompagnent de mesures sociales et économiques pour réduire les charges pesant sur les femmes et les hommes tunisiens, qu’elles soient liées aux prix, à la fiscalité, aux équipements publics ou aux services sociaux en termes d’éducation, de santé et de transport
    ».

    Est-ce avec « un déficit estimé à 11,5 % du produit intérieur brut l’année dernière et une dette publique de 90 % du PIB », et cette réponse cinglante de la centrale syndicale que le « super » ministre compte avoir les moyens de faire les réformes qu’il dit, pour réduire la masse salariale et la compensation élevée et pour restructurer les entreprises publiques peu performantes ?
  • Taoufik Rajhi dubitatif

    La réponse est dans cette déclaration d’un ancien ministre qui en sait long sur ce long processus des négociations avec les bailleurs de fonds, et le FMI en particulier. « La question fondamentale est d’obtenir la clef qui ouvre l’opportunité d’accéder aux marchés financiers internationaux, la garantie américaine ou autre et les appuis budgétaires des institutions financières internationales. Cette clé est entre les mains du FMI et celui-ci ne la cèdera pas, ni n’accordera son feu vert que lorsque le gouvernement se dote d’un programme macroéconomique, sans trous, robuste et convaincant et porte sur les réformes de la compensation des hydrocarbures et la fonction publique en plus des entreprises publiques budgétivores. Or aujourd’hui, on est loin du compte », commente l’ancien ministre en charge des Réformes et principal négociateur avec le FMI, Taoufik Rajhi pour Africanmanager.

    Concernant la garantie américaine, il nous déclare aussi que « c’est une décision éminemment politique, qui relève du travail de la diplomatie tunisienne, en l’occurrence le ministre des Affaires étrangères et notre Ambassade à Washington ». Et Rajhi d’ajouter que « l’obtention de l’accord du gouvernement américain pour la première garantie a pris plus de trois ans avant d’arracher l’accord du Congress et aujourd’hui ça demandera aussi du temps ». Il rappelle encore i que « l’administration Trump était contre cet outil et n’a accordé aucune garantie pendant les cinq dernières années même pas à la Jordanie et Israël qui en avaient fait la demande ».

    Concernant le lien entre la garantie et le FMI, il précise que « même si la garantie est une décision politique [Ndlr : Et on ne sait pas quelle contrepartie politique pourrait donner la Tunisie aux USA], le Trésor américain a son mot à dire, et celui-ci est catégorique : l’octroi de la garantie doit être précédé par le feu vert du FMI par un programme en cours ou une revue réussie, sinon il s’oppose ».

    Dans son commentaire sur la déclaration du « super » ministre tunisien de l’économie, Rajhi ajoute que « l’objectif économique du Trésor américain en accordant la garantie, est surtout d’aider le pays à accéder au marché financier et l’aider surtout à s’affranchir de sa garantie et compter sur ses propres moyens de discussion ».

    Taoufik Rajhi a aussi expliqué que « la garantie n’est pas gratuite, et coûte entre 30 et 35 millions de dollars, qui est ponctionnée de l’aide qu’accorde l’USAID à la Tunisie, et c’est la raison pour laquelle le Trésor est réticent, car il préfère accorder une aide directe plutôt que la garantie d’un crédit ».
- Publicité-

Réseaux Sociaux

108,654FansJ'aime
480,852SuiveursSuivre
5,135SuiveursSuivre
624AbonnésS'abonner
- Publicité -