AccueilLa UNELes Tunisiens lucides et sûrs d’eux-mêmes

Les Tunisiens lucides et sûrs d’eux-mêmes

Finalement, la Tunisie aura mis trois ans pour se tracer un avenir politique clair, largement convenu et fondateur d’une démocratie si vulnérable puisse-t-elle être. En se dotant d’une Constitution et d’un gouvernement de compétences et censément neutre, elle se met dans la posture d’un pays qui a réussi, contre vents et marées, à tirer son épingle du jeu, comparé aux autres nations dites du Printemps arabe, encore aux prises avec d’interminables convulsions. Et il n’y a qu’à voir ce qui est en train de se passer en Libye, en Egypte, en Syrie, et dans une moindre mesure au Yémen pour s’en convaincre.

C’est un épilogue d’autant plus patent qu’il doit être reconnu avec toute l’honnêteté intellectuelle qui y sied, car, il est rare de voir dans les annales des révolutions un exemple aussi probant d’un aboutissement de cette nature. La presse internationale été prompte à en prendre acte et même à s’en féliciter. Surtout, les Tunisiens ont trouvé la ressource de s’opposer à un pouvoir qui a tenté par tous les moyens de jeter son dévolu sur leur pays , de leur imposer un modèle de société qui ne réponde pas à leurs attentes, à leurs acquis et surtout à leur projet d’avenir. En chassant du pouvoir une coalition qui n’a pas réussi à avoir leurs faveurs, un parti islamiste qui s’est avéré être, en dernier analyse, un greffon qui n’a pas nullement vocation à tenir, les Tunisiens ont apporté la démonstration qu’ils peuvent être sûrs d’eux-mêmes, et capables de prendre en main leur propre destin, sans état d’âme ni concession.

Il ne faut pas se faire d’illusion, Ennahdha n’a pas quitté le gouvernement de son propre gré, le mouvement islamiste y a été poussé par une puissante et inaltérable volonté populaire. Mais , force est d’y ajouter la crainte qui habite les dirigeants islamistes de voir le scénario égyptien se rééditer en Tunisie. Cette appréhension n’a pas été suffisamment relevée et soulignée, mais, en fait, elle a joué un rôle déterminant dans la décision de Rached Ghannouchi et son état-major de jeter du lest , donnant aux processus prévus par le Dialogue national d’aboutir avec , il est vrai, les péripéties , volte-face que l’on sait et les tentatives finalement infructueuses de laisser les choses en l’état. Témoin, les amendements foncièrement « révolutionnaires » qui ont été apportés à maintes dispositions au projet de la Constitution, et d’abord son article premier dont a été expurgée la mention de la charia en tant que source de la législation dans le pays. On ne peut pas omettre non plus de citer sur ce registre la consécration de la parité homme-femme, il est vrai, dans les candidatures aux charges électives, mais une disposition qui continue de faire les tourments de bon nombre de dirigeants et de députés nahdhaouis.

Sans doute auraient-ils l’opportunité de revenir à la charge, lors du vote du texte de la Constitution dans sa totalité, ce qui requiert la majorité des deux-tiers, mais il est à espérer qu’ils auront toute la lucidité de ne pas le faire, car pareille démarche précipiterait le pays dans une crise dont on peut difficilement, à l’heure qu’il est, calculer les néfastes conséquences. Retenons tout simplement qu’un référendum ne serait pas pour faciliter les choses, tant par son coût (une trentaine de millions de dinars, selon de convergentes estimations) que par les perturbations qu’il provoquera s’agissant de la fin de la période de transition et des problèmes politiques qui s’en suivront.

Bien sûr, la Constitution ne sera pas promulguée dans les délais souhaités, c’est-à-dire le 14 janvier 2014, évidemment aussi, le texte de la Loi fondamentale pèche par plusieurs lacunes et incongruités qu’il sera indispensable de congédier, comme le préconisent en chœur tous les constitutionnalistes et experts qui ont eu à se prononcer sur la question, certes encore, il va être essentiel de définir avec toute la rigueur et la précision requises les dispositions transitoires qui régiront l’exercice du pouvoir en attendant l’organisation des prochaines élections et où logent des mines qu’il importe de désamorcer, mais tout cela doit vouloir dire que les manœuvres politiques et politiciennes doivent être un exercice proscrit, car porteur de bien des retournements de situation.

Mohamed Lahmar

- Publicité-

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

Réseaux Sociaux

108,654FansJ'aime
480,852SuiveursSuivre
5,135SuiveursSuivre
624AbonnésS'abonner
- Publicité -