AccueilLa UNEOù va ainsi la Tunisie ?

Où va ainsi la Tunisie ?

Les juges sont en grève. Ils demandent beaucoup de choses … matérielles, refusent l’hôpital spécial magistrats, et proposent un timbre à 10 DT (3 €) à verser au profit du secteur de la justice, qui demande par ailleurs une augmentation salariale. Leurs clercs les suivent et se mettent  à la place des juges dans une salle d’audience.

Source photo : Réseaux sociaux

Les journalistes sont « en colère », brassard rouge au bras et coups de gueule à la Kasbah. Un des distributeurs de pétrole, Agil, annonce une grève de deux jours [ar], et l’unique distributeur d’électricité, la Steg, le suivra. El Kamour menace de refermer la vanne du pétrole, les travailleurs du phosphate ont déjà presque tout arrêté. D’autres secteurs dans d’autres régions de la Tunisie, ont déjà trouvé d’autres types de vannes à séquestrer et à fermer en guise de pression sur le gouvernement de Hichem Mechichi. Partout, des régions s’embrasent du brandon des mouvements sociaux, soit pour signer leur refus des mesures prises par le chef du gouvernement pour calmer leurs colères, comme à Gafsa, soit pour demander d’être traités comme Tataouine et son Kamour

Le chef du gouvernement tunisien a ouvert la vanne des dépenses sociales, sur des fonds qui sont déjà saignés à blanc par les salaires de la fonction publique (plus de 20 Milliards DT en 2021), et sans daigner baisser le niveau de vie de l’Etat et ses dépenses. Les budgets du gouvernement (+5 %) et de la présidence de la République (11 % sans les frais du Sommet de la Francophonie) ont augmenté. A même été augmenté le budget de la nourriture des gardes du corps de la nomenklatura politique tunisienne. Les salaires des fonctionnaires aussi, et pas que de peu, et les prix également pour les services et les marchandises.

A tous ceux qui demandent quelque chose, Hichem Mechichi donne et signe, sans compter ni se préoccuper des possibilités des caisses de l’Etat et de leur état. Il avait commencé par El Kamour à Tataouine, et le reste des gouvernorats a suivi, demandant pareil. La Kamourocratie a ses limites et elle les a démontrées.

–          A la contestation sociale grandissante, on propose le retour au « الحمار الوطني»

Mechichi avait en fait ouvert, volets béants, la boîte de Pandore et peine désormais à la fermer. Kairouan et Béja se mettent en grève générale [ar], Même chose à Rdeyef et Oum-Larayes. A Kasserine, c’est le champ pétrolier du Douleb [ar] qui est pris en otage, sur fond de demandes sociales et d’emploi, et Skhira et Sfax suivent [ar] en faisant sit-in à l’entrée d’un autre champ pétrolier en protestation contre le manque de bouteilles de gaz domestique, pris en otage dans une autre région du pays. Bien avant, le Kef avait organisé une marche de protestation, toujours pour appuyer  les mêmes demandes sociales et en réaction à l’accord d’El Kamour signé par Hichem Mechichi.

Le pays s’embrase presque en protestations. Et ça et là, se font entendre des voix proposant l’organisation d’un dialogue national pour sortir de la crise. Certains politiciens, le veulent politique pour arriver à changer le régime et au moins organiser de nouvelles élections. Soucieux de rester au fauteuil du pouvoir, le mouvement Ennahdha voudrait faire de ce dialogue national un dialogue économique et social.

–          Petit rappel du Hiwar, qui a créé la crise qui sévit depuis 2014

Pour rappel, le 17 septembre 2013, le quartet UGTT, UTICA, ONAV et LTDH esquissait  une ébauche de consensus entre les partis politique en place, qui est adoptée sur un compromis permettant aux partis de pouvoir commencer la négociation.

Ce projet de feuille de route est composé de quatre points : la démission du gouvernement et son remplacement par un gouvernement de technocrates, le choix de dates fermes pour la fin des travaux de l’Assemblée constituante et des élections présidentielles et législatives, la préservation de l’identité nationale dans la nouvelle Constitution et la négociation des procédures nécessaires pour la transition finale et certaine d’un régime transitoire à un régime démocratique ainsi que les délais pour la création d’instances indépendantes.

La feuille est signée par 21 partis politiques et la première session est organisée le 5 octobre. Durant cette session, Abdessattar Ben Moussa, le président de la Ligue tunisienne des droits de l’homme, commet un lapsus célèbre, en ce sens qu’à la place  de Ḥiwar (dialogue), il prononce le mot Ḥimar (âne), provoquant  une crise de rire de la part de l’audience, y compris Rached Ghannouchi d’Ennahdha.

–          Abdessattar Ben Moussa avait finalement raison

La Tunisie en été sortie avec Mehdi Jomaa au poste de chef du gouvernement, qui n’aura pour tâche que de faire réussir les législatives de 2014 et qui échouera ensuite aux présidentielles de 2019. Seul gagnant, le Quartet, organisateur du Ḥiwar, ou Ḥimar, en retirera par la suite le Prix Nobel de la paix. Et depuis, c’est une crise politique qui s’installe dans ce qui a été appelé la transition politique. Une crise qui a laminé beaucoup de partis politiques, mais pas encore le parti islamiste tunisien que tout le monde, ou presque, voudrait voir partir du podium du pouvoir. Depuis aussi, c’est une instabilité, politique et gouvernementale récurrente qui a déjà soufflé tous les gouvernements ou projets de gouvernement. Une instabilité, désormais doublée par des crises, économique et financière, aggravées  par une crise sanitaire et une incompétence de gestion aux plus hauts niveaux de l’Etat, une incompétence toute aussi récurrente, devenue structurelle.

Voici dressés  en une centaine de lignes, les résultats du « Ḥiwar » qui s’est finalement bien révélé être un « Ḥimar » national, et qu’on propose de nouveau en guise de perspective pour les Tunisiens, les investisseurs étrangers qu’il appelle de tous ses vœux et les bailleurs de fonds qu’il regarde, d’un œil torve et récalcitrant, mais aussi au secours appelant !

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