La candidate d’extrême droite à la présidence française, Marine Le Pen, fait l’objet de vives critiques pour ses commentaires lors d’une récente interview radiophonique, confondant d’anciens présidents de Tunisie et d’Algérie.
Participant à l’émission matinale de France Inter dans le cadre de sa campagne politique visant à devenir la présidente « de tous les Français », elle s’est employée à défendre sa promesse de campagne d’une interdiction totale du hijab dans les rues de France, rappelant les mesures du président Habib Bourguiba dans les années 1980, lorsqu’il a interdit les « accoutrements radicaux » dans son pays.
Se prenant les pieds dans le tapis, elle a déclaré : « Bourguiba a fait [une interdiction] en Algérie ». L’animatrice de radio franco-libanaise Léa Salamé lui a rétorqué : « Oui, mais ce n’est pas le cas aujourd’hui. »
Elle semble ainsi ignorer que Habib Bourguiba a été le premier président de la Tunisie après l’Indépendance de la Tunisie. Il parcourait les rues de Tunis en dévoilant des femmes enveloppées de hijab local (sefsari) dans le cadre de son action d’émancipation de la femme tunisienne. Une œuvre qui a suscité l’admiration de l’Occident qui l’a présenté comme un vigoureux défenseur des droits des femmes dans le monde arabe.
Eric Zemmour, le soi-disant « Le Pen le plus radical », a également utilisé l’exemple de Bouguiba pendant sa campagne présidentielle pour justifier une politique similaire d’interdiction du voile islamique, bien qu’il ait correctement noté que Bouguiba était tunisien.
Le hijab est déjà interdit dans les écoles et les administrations françaises, mais Le Pen promet d’étendre l’interdiction dans les rues et les transports publics.
Les partisans de Macron ont font leur choux gras
La déclaration apocryphe de Mme Le Pen a suscité de nombreuses réactions sur les médias sociaux, dont certaines de la campagne d’Emmanuel Macron, son adversaire au second tour.
« Non contente de vouloir stigmatiser [le hijab] en interdisant le voile, Marine Le Pen a expliqué ce matin qu’il a été interdit en Algérie par Habib Bourguiba, ancien président de….la Tunisie ! Toujours aussi incompétente », a tweeté Ambroise Méjean, responsable des « Jeunes avec Macron », l’aile jeunesse officielle de la campagne de Macron.
« C’est un exploit mais elle l’a fait: Marine Le Pen ment 2 fois en 20 secondes. D’abord, Bourguiba a interdit le voile seulement dans les écoles et les administrations, pas dans l’espace public. Ensuite il était tunisien », écrit, quant à elle, la députée européenne et ancienne ministre Nathalie Loiseau.
« Bourguiba et l’Algérie: Marine Le Pen ne connaît ni l’histoire, ni sa géographie », souligne, de son côté, le député LREM Bruno Questel. Cet épisode intervient la veille de la présentation du volet international du programme de Marine Le Pen, domaine dans lequel la candidate RN a multiplié les affirmations hasardeuses.
Pour sa part, Macron a prévenu que l’interdiction du foulard islamique proposée par Marine Le Pen « divisera le pays », mais il a dit espérer que les femmes « lâcheront le voile elles-mêmes. »
Plusieurs internautes ont fait valoir que « l’erreur » de Le Pen était enracinée dans le discours colonial français qui a toujours envisagé les pays d’Afrique du Nord comme un « Maghreb » monolithique, sans aucun soin ni sensibilité envers leur diversité et leur héritage historique.
« D’après elle, ils sont identiques. [Il n’y a pas de différence entre la TUNISIE et l’ALGÉRIE. Au final, ce sont deux pays de colonies. Quel malheur ! », a tweeté un utilisateur tunisien en français.
L’ancien conseiller de Matignon, essayiste et consultant d’origine tunisienne Hakim El Karoui avait en premier sorti la séquence sur les réseaux sociaux mardi, en se fendant d’un « Incroyable ». L’auteur de L’Islam, une religion française, est connu pour sa défense d’un islam de France.