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Tout ce qu’il faut savoir sur la convention polémique avec le Qatar

Deux projets de conventions commerciales internationales font actuellement polémique en Tunisie, tant ces conventions, pour leurs contradicteurs, contiendraient des privilèges qui pourraient être accordées à la Turquie et au Qatar, et qui toucheraient à la souveraineté même de la Tunisie. Une polémique, nourrie par l’absence des deux conventions sur le site de l’ARP qui demandait qu’on les adopte de façon urgente, et le peu de temps pris par la commission des finances de l’ARP pour les discuter.

Une absence aussi d’information, et même de haut responsable pour défendre le projet à l’ARP, pour un débat qui intervenait, pourtant, dans une conjoncture politique et politicienne, chargée d’arrière- pensées (certains diront d’accusations) et d’interrogations, en lien avec le rôle du Qatar et de la Turquie avec les évènements de la région, et avec les liens (véridiques ou supposés, du parti islamiste tunisien avec les dirigeants des deux pays.

Pourquoi Fakhfakh a-t-il demandé report et non retrait du PL avec le Qatar?

Pour le cas de l’accord avec le Qatar, il s’agit en fait d’une convention, ou accord de siège, portant création d’une filiale tunisienne du Fonds qatari de développement (QFFD). C’est, en fait, « un type de traité qu’une organisation internationale conclut avec un État qui l’accueille sur son territoire, afin de définir son statut juridique dans ce dernier. Il a notamment pour but de garantir l’indépendance de l’organisation et de ses agents, ce qui conduit l’État hôte à concéder des privilèges, tels que des immunités pour les agents de l’organisation, ou un statut d’extraterritorialité pour ses locaux ». Une convention, comme en a déjà souvent signé la Tunisie, avec des organisations européennes, américaines ou autres comme le PNUD, la Cnuced. La convention avec le Qatar avait été signée, pour la Tunisie par l’ancien ministre Zied Laadhari, le 12 juin 2019. Le « Qatar Fund for Development est une entité gouvernementale de l’État du Qatar, qui est responsable du développement international et de l’aide étrangère du Qatar; il a été créé par la loi 19 de 2002. Le QFFD coordonne également les institutions caritatives et de développement du Qatar et le directeur général est Khalifa Jassim Al-Kuwari ». Cette convention de siège ne sera transmise par le gouvernement Fakhfakh à l’ARP que le 28 janvier 2020. La polémique enflant sur cette convention, le gouvernement demande à l’ARP de suspendre l’étude du projet de loi y afférent. Le gouvernement Fakhfakh n’a cependant pas retiré ce projet de loi ; et pour cause.

Rappelons tout d’abord, que le QFFD avait participé à la fameuse conférence des donateurs, dite « Tunisia 2020 », et avait promis quelque 2,5 Milliards DT en aide au développement de la Tunisie, montant dont le Qatar a confié la gestion, ainsi que des projets à financer par ce fonds, à la QFFD. Retirer la convention de siège reviendrait donc à refuser les 2,5 Milliards DT par un gouvernement Fakhfakh aux abois en matière d’argent pour relancer le développement de l’après Coronavirus. Fakhfakh était, donc, entre le marteau et l’enclume, ce qui explique sa réaction de temporisation. Le report, et non le retrait complet ou le passage en force (si cela s’avérait nécessaire), dénote aussi d’un manque de courage politique du chef du gouvernement d’aller résolument dans un sens comme dans l’autre.

  • Démêler le vrai du fake dans cette affaire, devenue politiquement « QatarGate »

Selon ceux qui n’ont pas lu cette convention de siège, l’un de ses articles stipulerait une interdiction faite à la Tunisie de faire toute difficulté, directe ou indirecte, à tous les projets que financerait le fonds. Interdiction est aussi faite à la Tunisie de faire obstruction à tout projet, et dans le cas contraire, le pays du siège pourrait faire l’objet de plainte en justice pour dédommagement.

Toujours selon ses détracteurs, la convention donnerait aussi droit au fonds qatari en Tunisie de nouer partenariat avec toute partie étrangère qu’elle voudrait pour ses projets tunisiens, et le droit aussi de prendre conseillers et fonctionnaires de toute nationalité de son choix, sans que l’Etat tunisien puisse refuser de leur accorder autorisation de travail ou de résidence, ou puisse avoir un quelconque contrôle sur le personnel employé par ce fonds. 1 of 12

Or, comme le démontre le document de ladite convention, dont Africanmanager a pu obtenir copie que nous publions in extenso, elle ne fait que définir les conditions de l’ouverture de ce bureau du QFFD en Tunisie, et mettre noir sur blanc les droits et les devoirs de chacun. Et il est dit, dès l’article 3, que « le bureau coopèrera et consultera avec le gouvernement tunisien pour ce qui concerne l’appui technique et le renforcement des capacités pour les projets qu’il financera. Le choix de ces projets se fera en concertation avec les autorités tunisiennes, et le QFFD aura le doit de suivi et de direction » de ces projets. Ces derniers concerneront, selon le texte de la convention, les secteurs de l’énergie, l’éducation, la formation, la recherche scientifique, l’agriculture, la pêche, les ressources naturelles, l’industrie, l’habitat, le tourisme, les TICS et les compétences économiques. Chaque projet fera étude à part, de concert, et qui déterminera le financement et les parties prenantes, comme l’Etat tunisien ou autres parties étrangères. Le tout de concert avec les autorités tunisiennes.

Le QFFD informera les autorités tunisiennes des identités des responsables qui seront recrutés, pour que le gouvernement tunisien puisse leur accorder les autorisations de résidence et de travail en Tunisie, « conformément aux lois en vigueur », et comme il le fait pour toutes les institutions semblables ayant des bureaux à Tunis. La convention stipule même que « il ne sera pas permis que le siège puisse servir de refuge à toute personne objet de recherche, ou objet de mandat d’arrêt ou de rapatriement, émis par les autorités tunisiennes ».

Il est vrai que le texte de ladite convention de siège stipule aussi que « il est permis au bureau du QGGD d’avoir recours à des fonctionnaires et consultants de diverses nationalités, avec autorisation de travail si besoin ». Mais cela est aussi le cas de pareilles représentations étrangères, européennes notamment, et aussi le siège de la BAD lorsqu’elle était à Tunis. Comme toutes les banques étrangères et autres, le bureau du GFFD sera autorisé à rapatrier ses bénéfices, dans la devise de son choix, tout comme ouvrir des comptes en devises ou en dinars convertibles. Et il est encore stipulé, dans l’article 9, « l’obligation faite à ce bureau de tenir compte des recommandations et remarques faites par le gouvernement tunisien ».

  • Quelques hics tout de même !

En fait, et pour la faire courte, la convention de siège objet du tollé politique soulevé, est semblable à tout contrat entre deux parties. Il y a les droits et les obligations de chacun. Le QFFD devant investir dans des projets, à but commercial, il est d’usage international qu’il puisse bénéficier d’avantages, fiscaux et douaniers, pour ses projets et son personnel, sauf le personnel local et étranger résidant en Tunisie.

On n’a trouvé dans le texte de cette convention aucune référence à la possibilité de prendre crédit auprès des banques tunisiennes, ou une référence à des procès pour dédommagement, sauf toujours le recours à l’arbitrage international ou indoor.

Petit hic, peut-être, l’article 4 qui stipule que « les financements du fonds ne sont soumis à aucun impôt, taxe, contrainte, droit fiscal ou douanier, y compris les intérêts reçus par le fonds en recouvrement des crédit ». Le QFFD ne paiera donc rien et ne sera soumis à rien, comme s’il était extra-terrestre. Une condition qui pourrait, sinon devrait, être mieux négociée. Sinon, peut-être aussi, une mauvaise rédaction de l’alinéa 10 de l’article 7 qui engage l’Etat tunisien de « ne prendre aucune mesure susceptible de faire obstruction, de quelque manière que ce soit aux projets dans lesquels le fonds prendra participation ». Un article qui donne la nette impression que le QFFD sera au-dessus de l’Etat, une impression inacceptable par un public tunisien, qui n’a pas toujours que de bons sentiments vis-à-vis d’un Emirat, dont le poids économique en Tunisie n’arrive encore pas à couvrir le « Dark Side » de la politique étrangère et médiatique.

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