Point d’orgue de sa première visite officielle aux Etats-Unis, le président de la République, Béji Caïd Essebsi a été reçu, ce jeudi, à la Maison Blanche, par le Président américain Barack Obama, un entretien qui devrait insuffler une vitalité nouvelle aux relations déjà ancestrales entre les USA et le berceau du Printemps arabe où est en train de mûrir la première vraie démocratie dans la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord.
A l’issue de cet entretien, le président Obama a annoncé qu’il a l’intention de désigner la Tunisie comme un allié majeur non-membre de l’OTAN des États-Unis, soulignant les progrès démocratiques du pays après le soulèvement du Printemps arabe.
Obama a également dit qu’il sera important d’essayer de stabiliser la Libye et qu’il il n’y a donc pas un vide de pouvoir qui menace la Tunisie.
Uniquement un nombre limité de pays ont ce statut spécial comme un allié non-membre de l’OTAN. Il permet à un pays d’être éligible à certains privilèges à l’appui de la coopération en matière de défense et de sécurité, mais ne prévoit pas d’engagement en matière de sécurité dans ce pays.
S’exprimant au terme de la rencontre consacrée à l’instabilité en Libye et dans la région, le chef de l’Exécutif américain a indiqué que les Etats-Unis vont fournir une aide à court terme à la Tunisie afin de lui permettre d’achever les réformes économiques.
Le chef de l’Exécutif américain avait peu auparavant donné le la de ce que devrait être l’architecture de la coopération entre Tunis et Washington en apportant son soutien à la transition de la Tunisie vers la démocratie. Dans une tribune conjointe publiée jeudi sur les colonnes du Washington Post, les deux présidents ont affirmé que « cette rencontre soulignera les progrès réalisés par la Tunisie et approfondira leur partenariat « pour aider la nouvelle démocratie tunisienne à assurer une plus grande prospérité et de la sécurité que ses citoyens méritent ».
« La Tunisie démontre que la démocratie est non seulement possible mais aussi nécessaire en Afrique du Nord et au Moyen-Orient », écrivent-ils.
Le Tunisie a émergé comme le success story de la région, avec ses citoyens se rendant aux urnes dans le cadre de plusieurs élections libres et le pays adoptant une nouvelle constitution qui défend la liberté religieuse et garantit les droits de l’homme et l’égalité pour tous, y compris les femmes et les minorités, déclarent Obama et BCE.
Le gouvernement d’union nationale comprend des laïcs et des islamistes, « ce qui prouve que la démocratie et l’islam peuvent prospérer ensemble», écrivent-ils.
Les deux dirigeants ont affirmé que la Tunisie peut compter sur le soutien continu des États-Unis alors que les Tunisiens s’emploient à construire la plus jeune démocratie du monde arabe.
S’exprimant à l’Institut américain pour la paix devant un parterre d’universitaires, de penseurs et de responsables dans le gouvernement américain, Béji Caïd Essebsi, tout en concédant que l’expérience de la transition démocratique en Tunisie, est semée d’embûches et risquait de s’enliser durant certaines étapes, a affirmé qu’il s’agit de l’expérience la plus réussie dans les pays ayant connu des révoltes. En témoignent la fin de la polarisation politique pour donner lieu à la rédaction d’une Constitution pionnière à caractère civil, les élections législatives et présidentielle transparentes et la formation d’un gouvernement représentant une grande partie de la classe politique, et la désignation d’un chef de gouvernement en dehors du parti vainqueur des élections avec la participation du mouvement Ennahdha.
Deux écueils majeurs !
Le président de la République a, toutefois, signalé que l’absence des opportunités d’emploi et les disparités de développement entre les villes côtières et les régions intérieures, principaux facteurs ayant permis le déclenchement de la révolution en 2010, perdurent toujours.
« Les gouvernements successifs n’ont pas réussi à résoudre ces questions », a-t-il dit, précisant que « la régression de l’économie ces dernières années résulte des difficultés inhérentes à l’étape de transition. »
L’autre écueil est la lancinante question du terrorisme. A cet égard, BCE a estimé que la lutte contre ce phénomène international est tributaire d' »une volonté politique régionale et internationale sérieuse. » « La Tunisie compte aller de l’avant pour améliorer le potentiel de ses forces armées, développer les mécanismes des renseignements, sécuriser ses frontières et promouvoir la coopération régionale et internationale dans ce domaine », a-t-il dit.
Pour l’heure, la visite a produit son premier effet tangible sous la forme de la signature d’un mémorandum d’entente de coopération à long terme entre la Tunisie et les Etats-Unis en présence de Béji Caïd Essebsi et du secrétaire d’Etat américain John Kerry.
Il prévoit de nouveaux mécanismes en vue d’un partenariat stratégique à long terme entre le deux pays, régissant les domaines économiques, éducatifs, culturels, sécuritaires et la défense.
« Les acquis de la Révolution tunisienne et de la transition démocratique en Tunisie constituent une opportunité, sans précédent, pour instaurer un partenariat plus solide et diversifié entre la Tunisie et les Etats-Unis », lit-on dans le document. Le mémorandum affirme aussi l’engagement des deux parties à assurer la sécurité dans les deux pays et l’engagement des Etats-Unis à renforcer le potentiel sécuritaire et de défense de la Tunisie.
Il s’agit aussi de soutenir la coopération dans le domaine de la lutte anti-terroriste à travers des programmes de financement pour l’acquisition d’équipements militaires et l’organisation de programmes de formation militaire et dans le domaine de la sécurité.
Le document prévoit aussi de renforcer la coopération en matière d’enseignent supérieur et dans les domaines scientifiques et culturels ainsi que la création d’une commission économique associant les secteurs public et privé dans les deux pays. La commission est appelée à tenir des réunions périodiques à Tunis et à Washington pour examiner les moyens d’impulser les échanges commerciaux au plan bilatéral et pour promouvoir l’investissement.
Mohamed Lahmar