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Tunisie : Déjà au pied du mur, que peut faire le tandem Marzouki et Jbali pour sauver l‘économie ?

Alors que filtrent déjà les noms de ceux qui composeront le nouveau gouvernement provisoire tunisien et que s’accomplit l’installation, préméditée et attendue, de Moncef Marzouki au Palais de Carthage où il ne veut pas loger et de Hammadi Jbali à la Kasbah, se pose déjà la question de savoir ce qu’ils pourront désormais faire pour un pays dont ils se sont partagé les pouvoirs ?

La Tunisie sera, à la fin de cette année, dans la récession économique avec une croissance zéro du PIB et devra faire face à un million de chômeurs. Ce sont là les deux urgences du prochain gouvernement de la nouvelle période transitoire, si elle se termine ce dont doute désormais plus d’un observateur en Tunisie. Deux urgences générées par une conjoncture internationale très difficile, notamment face à une Europe en très grande perte de vitesse et prise de court par les dégradations en cascade des notations souveraines de plus d’un de ses membres.

Ce qu’ils feront dans l’immédiat, c’est de terminer le partage du trésor de la Révolution où ils avaient brillé tous par leur absence. Cela passera aussi par l’attribution de quelques sièges aux proches parents, comme semble le confirmer Reuters qui cite le nom de Rafik Abdessalem, l’époux de l’une des filles de Rached Ghannouchi, leader du parti au pouvoir en Tunisie, pour le poste de ministre des Affaires étrangères. C’est, pour l’instant, le seul prochain ministre dont on connait désormais le lien de parenté avec le parti au pouvoir. Un cas qui rappelle d’autres du temps de Ben Ali. Les observateurs s’attendent à ce que cela puisse se renouveler lors des prochaines distributions des postes de PDG d’entreprises publiques, une distribution entre les seules mains du prochain chef du gouvernement, Hamadi Jbali qui avait déjà fait l’objet de semblables soupçons à propos du poste de gouverneur de la BCT.

Avant cela, le gouvernement Jbali devra obligatoirement étudier et adopter le budget de l’Etat et la loi des Finances pour l’exercice 2011. A ce stade, et pressé par le temps qui ne lui accordera pas le temps de sortir sur le marché international de la dette, le prochain gouvernement aura deux choix.

– Le premier sera de faire des coupes dans le budget, ou au moins de nouveaux arbitrages dans le budget économique 2012, pour donner la priorité à la gestion du défi du chômage. Il pourrait, ainsi, faire recruter plus de jeunes par l’administration, continuer d’accorder les 200 DT de prime de chômage à d’autres et ouvrir certains grands chantiers pour faire travailler les chômeurs. Sa politique économique aura ainsi un très fort relent social et il sera obliger de renvoyer aux calendes grecques les problèmes structurels de la situation économique dégradée de l’héritage de la Révolution.

– Le second sera de faire des coupes dans les dépenses, de serrer la ceinture et peut-être d’aller jusqu’à annoncer un budget de rigueur, reformer les ressources de l’Etat, les utiliser à bon escient en privilégiant le long terme et le traitement des dossiers des réformes structurelles qui devraient permettre à l’économie tunisienne de rebondir. Le prochain gouvernement privilégiera ainsi un traitement, économique et financier, de la crise dans laquelle s’enfonce la Tunisie.

Dans les deux choix, Ennahdha sera, selon plus d’un spécialiste de la situation politico-économique tunisienne, toujours perdante, tant elle n’arrivera pas à contenter les uns et les autres et, ainsi, risquera de perdre le pari des prochaines électorales, surtout municipales.

Dans la seconde hypothèse, Ennahdha et le chef du gouvernement doivent arriver à mettre la centrale syndicale ouvrière de leur côté. Hamadi Jbali a déjà rencontré le secrétaire général de l’UGTT. Cette dernière est cependant déjà en période électorale pour un nouveau SG, et Ennahdha pourrait être tentée d’y placer un des siens, pour s’assurer son appui au parti au pouvoir et qu’il ne lui livre pas une «guerre sociale» en grèves et en sit-in. Dans la première hypothèse, le parti leader de la troïka devra s’assurer le soutien inconditionnel du patronat qui devra ainsi accepter de continuer à travailler sous la pression syndicale, sans les réformes structurelles et sans les aides gouvernementales. Déjà en division, la première centrale patronale, l’Utica, prépare aussi son prochain congrès. Ajoutez à cela l’émergence d’une nouvelle caste d’hommes d’affaires proches d’Ennahdha, tels qu’on en a vus aux dernières journées de l’IACE (Institut Arabe des Chefs d’Entreprise) à Sousse, le scénario d’une prise de pouvoir du patronat par Ennahdha n’est plus une simple vue de l’esprit.

Entre les deux hypothèses et les deux choix qui s’offrent au gouvernement Jbali, il peut y avoir, certes, une troisième voie, celle que certains appelleront certainement la voie tunisienne. Il nous semble cependant que le temps est désormais trop court pour la trouver. On attendra 2013, peut-être ! Mais n’est-ce pas ce que recherche la troïka dont le président Marzouki, qui a préféré le burnous (sorte de manteau traditionnel tunisien) avec col de chemise ouvert à la redingote et le nœud papillon, pour sa première apparition en tant que chef d’Etat, n’a jamais renoncé à un mandat au-delà d’un an !

Khaled Boumiza

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