Tarak Arfaoui
Au fur et à mesure que le temps passe, deux ans après l’investiture du président Saied qui a été plébiscité par une écrasante majorité des électeurs et au vu des récents événements qui ont marqué la scène politique nationale il m’arrive de plus en plus de me poser la question quant aux véritables projets de Mr Saied , de l’efficience de son action et ses résultats sur le terrain .Mr Saied a eu le courage d’avoir ôté la chape de plomb qui pesait sur la vie politique qui était à la dérive menant le pays vers l’asphyxie sociale et économique ce dont tout le monde lui est reconnaissant.
La Tunisie peut se targuer d’avoir un président atypique mais patriote, sincère, honnête droit dans ses bottes qui a fait de la lutte contre la corruption et seulement la corruption son cheval de bataille politique mais il ne peut pas se vanter d’avoir tranquillisé ses concitoyens depuis plus de deux ans et trois mois après les décisions courageuses du 25 juillet. Une certaine désillusion semble s’installer, tant il s’est montré dans ses discours et ses actions comme un chef de clan ou de parti n’obéissant qu’à ses convictions,opaque a tout dialogue contradictoire, surfant sur un populisme primaire touchant la fibre sensible des catégories sociales précaires. Ses diatribes en arabe châtié ,venu d’ailleurs , à mille lieues de notre bon vieux dialecte tunisien dont Bourguiba ou Caïed Essebssi en ont fait une arme de communication redoutable, ses apparition médiatiques dans des monologue où les menaces le disputent aux admonestations , ses sempiternelles litanies contre les trafiquants et les voleurs , aussi sincères soient elles , ne constituent pas moins un programme politique pour tout président qui respecte sa fonction et dans lequel le citoyen peut se projeter . Les descentes musclées avec ses escouades sécuritaires dans les usines et les dépôts se sont soldés par un fiasco aboutissant à l’effet inverse de celui attendu ; les accusations gratuites contre les hommes d’affaires qui frisent parfois le ridicule , les discours enflammés à la mode de ‘radio le Caire des années soixante’ devant un auditoire muet qui ne fait que hocher la tête ne font que diviser les tunisiens .Par ses interventions il a réussi à se mettre sur le dos tous les partis avec qui il refuse de dialoguer , et une majeure partie des organisations nationales et de la société civile sans oublier certains pays amis . Le projet de démocratie populaire directe, obsolète, sortie des archives des mouvements pan arabiques et islamiques de gauche avec son corollaire de populisme de régionalisme et de tribalisme sera une catastrophe pour le pays.
On est en droit de se demander vraiment dans quel bateau veut nous embarquer notre président et quelle est sa véritable vision politique pour l’avenir du pays .Il n’a pas un service de presse digne de ce nom ni de porte-parole comme tous les présidents et quand il s’exprime je ne l’ai jamais entendu parler sereinement en s’adressant à tous les citoyens sans exclusion sachant qu’il est le président de tous les tunisiens qu’ils soient honnêtes patriotiques ou malfrats et magouilleurs et qu’il n’est ni un procureur ni un magistrat pour jouer les justiciers .L’avenir du pays a besoin d’un consensus et d’une vision politique claire et un programme économique urgent et réaliste pour résoudre les graves problèmes auxquels fait face la Tunisie .
Malgré tous ces travers j’ose espérer après la désignation du nouveau gouvernement que Mr Saied et sa garde rapprochée auront l’opportunité de se ressaisir pour permettre au gouvernement mis en place qui est composé de compétences, apparemment apolitiques, de faire avancer le pays sans grosses interférences du sérail