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Les Tunisiens sont les plus mécontents au monde de la crise de l’eau, selon un sondage Gallup

La Tunisie est connue au Moyen-Orient et en Afrique du Nord sous l’appellation de « Tunis al Khadraa », « Tunisie la verte ». Mais la plupart des Tunisiens craignent que cette réputation ne soit compromise. En 2022, 85 % des Tunisiens étaient mécontents des efforts déployés pour préserver l’environnement dans leur pays, ce qui les place, avec les Libanais, au premier rang des mécontents dans le monde. Telles l’une des principales conclusions d’un sondage réalisé par le célèbre institut américain Gallup.

Le mécontentement à l’égard des efforts déployés par le pays pour préserver l’environnement a considérablement augmenté depuis 2010 (28 %), année où la « révolution de jasmin » a donné le coup d’envoi aux soulèvements qui allaient se propager à travers le monde arabe l’année suivante.

Dans le contexte de la crise de l’eau qui sévit dans le pays, la satisfaction à l’égard de la qualité de l’eau a atteint un niveau record de 19 % en Tunisie en 2022. C’est le niveau le plus bas que le World Poll ait mesuré au niveau national dans le monde entier depuis 2005.

Les Tunisiens sont donc beaucoup moins satisfaits de la qualité de l’eau que toute autre population de la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord (MENA), où l’insécurité de l’eau est généralisée et l’insatisfaction élevée. Aucun autre pays de la région MENA – ou même du monde – n’arrive à la cheville de la Tunisie en matière d’insatisfaction vis-à-vis de l’eau.

Plusieurs facteurs expliquent le mécontentement des Tunisiens à l’égard de leur eau, selon les auteurs de l’étude qui rappellent que la Tunisie est l’un des pays les plus secs d’Afrique. Après trois années de sécheresse, la pénurie d’eau s’est aggravée vers la fin de l’année 2022, qui n’a connu que 20 % du volume normal de précipitations entre septembre et décembre. La pénurie d’eau devrait devenir un problème encore plus aigu dans la région au cours des prochaines années en raison du changement climatique, d’après les prévisions des climatologues.

Les barrages se vident et les cultures périclitent, ce qui menace l’industrie agricole. La production d’olives et de blé est réduite. Le gouvernement a récemment commencé à couper l’approvisionnement en eau la nuit dans plusieurs régions. Autrefois grenier à blé de l’Empire romain, la Tunisie est confrontée à la menace de ne plus pouvoir nourrir correctement sa population.

La frustration à son comble dans le Sud

Le Sud de la Tunisie offre une illustration frappante de la crise de l’eau dans le pays. En 2022, seuls 7 % des habitants de cette région étaient satisfaits de la qualité de leur eau, soit le taux le plus bas au monde. Il s’agit d’une chute rapide par rapport à 2015, lorsque près de la moitié (48 %) des Tunisiens du Sud étaient satisfaits de leur eau.

Le sud est une région agricole clé, mais il abrite également le golfe de Gabès et d’importantes réserves d’un produit d’exportation tunisien crucial : le phosphate.

Les déchets industriels issus de l’extraction du phosphate – le phosphogypse – ont entraîné une augmentation des taux de cancer, de stérilité et de fausses couches dans la région. Autrefois réputés pour leurs écosystèmes marins florissants, les stocks de poissons se sont effondrés. Les eaux souterraines ont été polluées et les réserves pour les ménages diminuent.

Selon une enquête réalisée en 2020 par Gallup et l’université Northwestern – l’échelle IWISE (Individual Water Insecurity Experiences) – un peu plus d’un quart (27 %) des Tunisiens du Sud s’inquiètent presque chaque mois de ne pas avoir assez d’eau pour subvenir à leurs besoins, ce qui est beaucoup plus élevé que dans le reste du pays.

En juillet 2022, les Nations-Unies ont demandé d’urgence à la Tunisie d’améliorer la qualité de son eau en mettant fin à l’exploitation des aquifères et en donnant la priorité à une eau de qualité pour la boisson, et non pour l’irrigation des cultures ou la production de phosphate.

Une double crise : L’économie contre l’environnement

L’appel de l’ONU touche au cœur du défi auquel la Tunisie est confrontée : la nécessité de protéger à la fois son environnement et son économie.

Pour tenter d’enrayer la crise de l’eau et le malaise économique général, le gouvernement a augmenté le prix de l’eau pour les plus gros consommateurs et a exhorté les agriculteurs à cesser d’irriguer les cultures légumineuses pour se concentrer sur les exportations de céréales. En conséquence, les prix des légumes ont fortement augmenté, contribuant à une forte inflation.

Dans ce contexte, les Tunisiens sont profondément pessimistes quant à l’état de leur économie. Ils sont trois fois plus nombreux à penser que l’économie se dégrade au lieu de s’améliorer (63 % contre 18 %). Moins d’une personne sur dix (9 %) pense que c’est le bon moment pour trouver un emploi.

Le pessimisme concernant l’état de l’environnement naturel et de l’approvisionnement en eau en Tunisie est étroitement lié au paysage politique et économique plus large.

De nombreux Tunisiens ont pris en main leur mécontentement croissant. Les troubles liés à la pollution industrielle ont entraîné la fermeture des sites de production de phosphate de Redeyef et d’Oum Larayes en 2020.

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