En 2022,, le conseil central du patronat agricole Utap avait retiré sa confiance de l’ancien président Abdelmajid Ezzar, et au 17ème congrès de l’organisation, les agriculteurs tunisiens ont voté et confirmé Noureddine Ben Ayed à la tête de l’Utap.
Présidant dernièrement le conseil national de l’UGTT, Noureddine Tabboubi qui règne depuis 2017, s’était excusé d’avoir amendé l’article 20 du règlement intérieur de l’organisation, pour se donner le temps d’un 3ème mandat. Une opération qu’il considère désormais comme une erreur dont il porte la responsabilité, et la centrale syndicale ouvrière évoque désormais un nouveau congrès électif anticipé.
Depuis 2018, la Tunisie a fait tomber tout un régime, celui d’Ennahdha, organisé une présidentielle, une législative, une municipale, une régionale, deux consultations nationales et s’apprête à organiser les secondes présidentielles, chacune en temps et en heure. Même le syndicat patronal sans droit de représentativité qu’est le Conect d’un ancien même du BE de l’ancienne Utica, avait fini par pousser son créateur à organiser congrès et Tarak Chérif à laisser sa place à Aslan Berjeb. Mais l’Utica pas encore, sans peur de vivre et d’exercer dans « l’illégalité ».
– Les intouchables de 2018
Depuis 2018, l’organisation patronale tunisienne dont le mandat de président a toujours été de 5 ans, garde le même président. Son mandat a pourtant expiré depuis plusieurs mois. Ceci, alors que le congrès électif d’un nouveau président du patronat n’a toujours pas été décidé. Et ce sont ainsi quelque 20.000 responsables patronaux qui resteront des intouchables, dans les 2.327 indécrottables structures patronales, nationales, régionales et locales, qui sont maintenus dans l’état d’abstentionnistes, interdits de voter pour un quelconque changement dans tout le corps patronal, ou même de décider démocratiquement le statu quo. Mais, au contraire, de se ranger en silence forcé derrière un BE qui ne défend rien et personne.
Toutes ces structures devaient être renouvelées depuis fin 2023, dans un processus qui devait s’étaler sur plusieurs mois et se terminer par un congrès national qui devait élire un nouveau bureau exécutif lequel devait élire lui-même, à son tour, un nouveau président, un nouveau patron des patrons qui aurait la légitimité de recevoir, de représenter, de discuter et de signer au nom de toutes les structures patronales.
– La grave lettre du patronat BTP
Le 25 juin 2024, après une première lettre en date du 8 février 2023, le président de la fédération du BTP prenait son courage à deux mains et envoyait une lettre à tous les membres du Conseil National de l’Utica, rappelant la fin du mandat électoral et les risques de non tenue du congrès du patronat. La lettre évoquait l’organisation d’une consultation à travers un bureau spécialisé.
Cette dernière aboutit à mettre le doigt sur la responsabilité directe du président de l’Utica et son Conseil national dans la non-organisation du 17ème Congrès, un retard qui n’a aucune cause légale, et que « les textes en vigueur ne permettent pas de prolonger le mandat » de Samir Majoul, « en l’absence de causes légales, comme le cas de force majeure ou de menace imminente ». La même consultation conclut pour le BE que « continuer son activité le met hors-la- loi, et ses activités dénuées de toute légalité ».
Pour les chambres syndicales et les fédérations, elles doivent se limiter, selon le résultat de la Consultation, à la gestion des affaires courantes, ne prendre aucune décision ou engagement. La lettre de la fédération du BTP met en cause la gestion des finances de l’Utica, qui serait contraire à certains articles de la Cour des Comptes et des associations, et dit vouloir éviter le recours à la justice, rappelle que les présidents, de l’Utica, des Unions Régionales, n’ont plus droit à un autre mandat.
– « Hors- la- loi », de Bizerte à Tataouine
Une situation, telle que décrite dans cette lettre, dont Africanmanager a pu consulter copie, somme toute délétère, et qui jette beaucoup d’ombre sur ce qui se fait dans les couloirs de l’Utica et son dernier étage. Une situation, qui ne semble embarrasser personne, ni les patrons et leur président, ni les hauts responsables qui les reçoivent toujours avec les honneurs dus aux légalement élus, ni les partenaires, locaux et étrangers, qui signent avec l’actuel patronat « hors-la- loi » selon les termes de la lettre en question, accords et PV de réunions, qui risqueraient de devenir caducs.
Président de cette Utica, Samir Majoul fait jusque-là comme le président tunisien qui ne réagissait pas aux marches de protestation qui avaient battu le pavé des rues de Tunis la semaine dernière. Et si Kais Saïed semble ne pas craindre le verdict des urnes, Samir Majoul les refuse de fond en comble. Car, sauf existence d’une information contraire non publiée par l’Utica, cette dernière n’a pas encore sonné le glas du mandat de son actuel président, ni lancé le branle-bas pour le renouvellement de l’ensemble de ses structures, de Bizerte à Tataouine !