AccueilLa UNETunisie : Une crise à forte résonance internationale !

Tunisie : Une crise à forte résonance internationale !

La Tunisie, à l’échelle mondiale, peut être regardée  comme  un pays d’importance mineure. Pourtant, c’est sur ses terres que, en l’espace d’une décennie, avait  commencé ce que l’on a appelé le printemps arabe et où, selon toute vraisemblance, il est en train de se terminer. C’est sous ces traits que le diplomate italien chevronné, Marco Carnelos,  décrit le parcours brièvement démocratique de la Tunisie.

Si la Tunisie semblait être la seule réussite du printemps arabe, tout a changé en juillet, dit-il, lorsque son président, Kais Saied, s’est arrogé  des pouvoirs extraordinaires après des mois de tensions croissantes dues au mécontentement économique et social à l’égard du gouvernement alors en place, et du parlement, présidé par le chef du mouvement Ennahdha.

Pendant ce temps, la tension interne  ne montre aucun signe d’apaisement. Mais les effets de la pandémie et de la crise économique, aggravés par un gouvernement faible et une corruption généralisée, ont signifié un parcours relativement facile pour Saied et ses partisans.

En termes géostratégiques, note le diplomate italien, l’évolution de la Tunisie s’inscrit dans le cadre d’une dégénérescence politique qui remonte à la longue division du monde arabo-islamique sur l’islam politique. Il y a eu des affrontements entre le président et ceux qui sont farouchement opposés à ses actions, l’opposition n’étant épargnée ni par les déclarations incendiaires ni par les décisions irritantes, comme la prolongation indéfinie des mesures d’exception. Saied a également proposé des solutions potentiellement polarisantes, telles que la suspension de la constitution et la convocation d’un référendum pour modifier le système politique.

Malgré tout cela,  déplore Marco Carnelos, la communauté internationale, et surtout l’Occident, qui selon ses valeurs revendiquées devrait se faire entendre dans ces situations, n’a offert que des réponses largement tièdes, voire un silence assourdissant.

Et pourtant, l’évolution de la situation en Tunisie pourrait s’inscrire dans le cadre d’une dégénérescence politique qui remonte à la division de longue date du monde arabo-islamique sur l’islam politique. Cette division voit la Turquie et le Qatar soutenir les Frères musulmans, tandis que les Émirats arabes unis, l’Arabie saoudite et l’Égypte s’y opposent vigoureusement ; une confrontation qui a trouvé dans le conflit libyen l’un de ses principaux champs de bataille.

En d’autres termes, la Tunisie pourrait être la pièce finale d’un règlement de comptes qui a déjà vu la large acceptation internationale du brutal coup d’État égyptien de 2013 qui a renversé le gouvernement démocratiquement élu du président Mohamed Morsi – également une expression des Frères musulmans.

Des revirements politiques

« Nous sommes peut-être aussi sur le point d’assister à des revirements politiques majeurs au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, le retrait américain d’Afghanistan et la chute du pays aux mains des talibans ayant déclenché un séisme qui s’est répercuté dans toute la région », souligne le diplomate.

« Mais indépendamment des discussions constitutionnelles, des faibles réactions au coup de Saied et de la nature de ses origines, la Tunisie mérite l’attention car nous assistons à un nouveau chapitre autoritaire dans une région où, l’histoire récente nous l’enseigne, de tels événements ont tendance à déboucher sur des crises plus explosives et difficiles à gérer », avertit-il.

Il estime qu’il est  assez difficile de voir une stabilité acceptable et durable dans ce que Saied est en train d’accomplir et qu’il est temps de mettre fin à la distinction entre « bonnes » et « mauvaises » dictatures que certaines démocraties occidentales déploient encore en fonction de leurs propres intérêts.

Pour les principaux acteurs internationaux et les pays du sud de l’Europe – avec notamment l’Italie en première ligne – les événements de Tunisie représentent également une complication supplémentaire pour la gestion de la complexe situation libyenne. Car la Libye fait désormais partie d’un Grand Jeu plus vaste en Méditerranée orientale : un carrefour d’intérêts contradictoires impliquant également la France, la Russie, l’Égypte, la Turquie, la Grèce, Israël, le Liban et certaines monarchies du Golfe, autour de la sécurité, des approvisionnements énergétiques et des migrations.

Gérer la situation en Libye en ignorant ce qui se passe chez son voisin occidental serait contre-productif, prévient le diplomate italien. Toute solution doit être globale et, surtout, fondée sur un déploiement résolu du soft power considérable, mais mal utilisé, de l’Union européenne.

Une double opportunité

Une solution à la crise tunisienne qui préserve les résultats de la dernière décennie est une condition préalable fondamentale pour mieux gérer la situation difficile en Libye et la situation sécuritaire plus large et menaçante dans l’ensemble de la région du Sahel.

Par conséquent, l’UE doit identifier ses principales menaces extérieures, en commençant par celles qui sont géographiquement proches de chez elle – essentiellement les flancs sud et sud-est de l’UE.

Enfin, l’UE, avec son importante population musulmane, a tout intérêt à s’assurer que la dynamique délicate entre l’islam politique et la démocratie de style occidental se consolide davantage par les urnes plutôt que par des coups d’État militaires. 

 La Tunisie, en définitive, offre cette double opportunité. Pour l’UE, ce qui s’y passe importe bien plus que toute stratégie indo-pacifique, souligne-t-il.

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