AccueilLa UNEUne femme à la tête du gouvernement a-t-elle changé la Tunisie?

Une femme à la tête du gouvernement a-t-elle changé la Tunisie?

La Tunisie a connu un changement d’attitude marqué à l’égard des femmes leaders politiques depuis que Najla Bouden est devenue la première femme  cheffe du gouvernement du monde arabe. Cependant, cela ne signifie pas que la vie des femmes tunisiennes se soit radicalement améliorée, constate BBC News Arabic.

Il n’en demeure pas moins  que la Tunisie connaît actuellement un changement d’attitude significatif à l’égard des femmes en position de pouvoir, plus que dans d’autres parties du monde arabe.

Une nouvelle enquête, réalisée par Arab Barometer pour le compte de BBC News Arabic, a révélé que la Tunisie a connu la plus forte baisse du nombre de personnes affirmant que les hommes sont de meilleurs dirigeants politiques que les femmes.

Depuis 2018, il y a eu une baisse de 16 points de pourcentage – de 56% à 40% – chez ceux qui sont d’accord avec l’affirmation selon laquelle « en général, les hommes sont meilleurs en matière de leadership politique que les femmes ».

L’enquête a été menée à peu près au moment où la Tunisie  a accédé au rang de premier pays arabe dont le gouvernement est présidé  par une femme en la personne de la géologue Najla Bouden, nommée à ce poste par le président Kais Saied en octobre 2021.

Cela montre l’effet de modèle, explique Amaney Jamal, cofondateur du Baromètre arabe et doyen de l’École des affaires publiques et internationales de Princeton, basée aux États-Unis.

« Nous n’avons pas vu un changement radical de l’opinion publique  concernant les droits des femmes, avant cette nomination », dit-elle, ajoutant que cela « a permis aux gens de dire : « Devinez quoi, les femmes peuvent être tout aussi efficaces en tant que leaders politiques que leurs homologues masculins ». »

Kenza Ben Azouz, chercheuse au sein du groupe de campagne mondial Human Rights Watch, affirme que les militantes tunisiennes des droits des femmes avec lesquelles elle s’est entretenue ne pensent pas que la nomination de NajlaBouden ait conduit à une quelconque « réalisation concrète ».

« Il n’y a eu absolument aucun ajout en termes de droits obtenus pour les femmes », dit-elle.

Une « nomination de pure façade » !

Les militants des droits des femmes craignent que le président de la République tunisienne, Kais Saied, ne se serve de la façade de l’émancipation féminine pour atténuer le choc de ses actions autoritaires, notamment la dissolution du parlement et l’exercice du pouvoir par ordonnances et décrets .

Saied est connu pour ses opinions conservatrices sur les droits des femmes. Il  continue de s’opposer à l’égalité des sexes en matière d’héritage, et les hommes tunisiens sont toujours reconnus légalement comme le chef de famille. L’héritage en Tunisie est basé sur la loi islamique de la charia, qui stipule qu’un fils survivant a généralement droit à deux fois la part d’une fille survivante.

Saied a provoqué l’indignation le mois dernier lorsqu’il a limogé 57 juges après les avoir accusés d’un large éventail d’infractions, notamment de « corruption financière et morale ».

Parmi eux, une femme juge a vu des détails sur sa vie privée divulgués en ligne, notamment des allégations selon lesquelles elle aurait commis l’adultère, un crime en Tunisie, et aurait été forcée par la police à passer un test de virginité.

Condamnant la campagne de dénigrement, la présidente d’honneur de l’Association des juges tunisiens, Rawdha Karafi, aurait déclaré : « Qui va réhabiliter cette dame si le plus haut niveau de l’État a porté atteinte à sa dignité ? ».

L’enquête a également révélé que la Tunisie comptait le plus fort pourcentage de personnes – 61% – qui estiment que la violence à l’égard des femmes a augmenté au cours de l’année dernière, malgré la législation adoptée en 2017 pour la combattre.

Mais comme les hommes restent les chefs de famille selon la loi tunisienne, les aides sociales leur reviennent et les survivantes de violences conjugales ne peuvent pas accéder à un soutien financier.

« Le pouvoir économique reste entre les mains du mari », explique Ben Azouz qui se dit, néanmoins, « très optimiste », notamment grâce au travail des groupes de défense des droits des femmes et à leur « regain de créativité ».

L’activiste politique et ex parlementaire Bochra  Belhaj Hmida affirme que les efforts pour rendre la Tunisie plus « vivable, libre et libératrice » doivent se poursuivre, et qu’ils doivent  être déployés « non pas par une seule personne, mais par tous ceux qui croient que ce pays mérite mieux ».

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