Le 30 décembre 2020, le conseil d’administration de la BCT résumait la situation de l’exercice économique Covid en Tunisie, en indiquant qu’au « niveau national et en dépit des signes d’une reprise progressive après la levée du confinement sanitaire, l’activité économique continue de subir les effets de la pandémie sur la demande intérieure et extérieure, au vu des restrictions imposées de nouveau par les principaux pays partenaires, ce qui entrave le redressement des secteurs industriels orientés à l’exportation et du secteur des services, en particulier le tourisme et le transport aérien, outre les fluctuations de la production des industries extractives en relation avec le climat prévalant sur le plan intérieur ».
– Le Coronavirus, le mal suprême et l’ultime remède
L’économie tunisienne n’allait déjà pas bien depuis 2011, mais sa crise financière et sa sinistrose sociale s’étaient accrues en 2020, avec les effets globaux du Coronavirus. La Tunisie n’est pas la seule dans ce cas. La crise a en effet quasiment soufflé des économies, nettement plus puissantes, et qui injectent, depuis, des milliards d’euros dans leurs économies. A la différence que la France, l’Espagne, la Grèce ou l’Italie ont l’Europe à leurs côtés. L’exception est la Grande-Bretagne. Elle vient, de façon définitive, de faire le Brexit.
Le Royaume-Uni s’est essayé à toutes sortes de confinements qui n’ont pas marché, mais a fini par comprendre que tout cela n’était qu’un placébo, et qui lui fallait le remède de cheval qu’est désormais le vaccin, et a été le 1er pays à le faire. Restée dans l’UE, l’Allemagne l’a semble-t-il compris et enregistre désormais le plus haut taux de vaccination. Lieu de naissance du Covid-19, la Chine a déjà lancé des campagnes de vaccination depuis le 19 décembre dernier. L’Europe, principal partenaire de la Tunisie, reste encore à la traîne et patauge toujours dans la crise économique, où elle entraîne de fait ses partenaires économiques, dont la Tunisie. Toujours est-il que le France, par exemple, parle depuis quelques semaines de vaccination. La Tunisie, toujours pas !
– 2020, fin de la récréation « طارت السكرة و حضرت المداينية »
En Tunisie, l’année 2020 s’était achevée sur un goût de cendre, d’une véritable crise qui ne faisait que commencer. Avec une année 2021 où le tourisme, et tous les sous-secteurs d’activité qui l’accompagnent, seront complètement à genoux, si ce n’est complètement détruits. Avec une industrie dont les exportations continuent de chuter, tout comme l’importation qui n’est qu’une exportation en perspective. « Au cours du mois de novembre 2020 et aux prix constants, les importations ont enregistré une baisse de (-3,3%) et les exportations de (-0,6%) comparées au même mois de l’année dernière. Les prix des produits échangés sont en diminution de 5,7% au niveau des importations et de 0,2% au niveau des exportations », confirment en effet les chiffres de l’INS. Le Dinar se stabilise à plus ou moins 3 euros, mais c’est juste un effet de baisse des importations qui gonfle presqu’artificiellement les réserves en devises non dépensées en importation (160 jours au 31 décembre 2020).
« D’habitude, j’évite les mauvaises nouvelles ou les anticipations inquiétantes, mais les prévisionnistes sérieux prévoient un retour à la hausse des prix du pétrole. Je crains le retour à 60-65 $ le baril à partir du mois de mai 2021 ; on annonce un déficit important entre l’offre et la demande de brut (pétrole). Oui on est le 3 janvier 2021 », écrivait samedi dernier l’expert en pétrole Fethi Zouhair Nouri. L’inflation reste proche des 5 %, les prix augmentent toujours, mais à moindre rythme. Avec tout cela, 2021 devrait apporter un autre type de chômeurs, ceux qui perdront leurs emplois sous l’effet de la crise qui touche de plus en plus leurs entreprises. Des chômeurs aussi, qui perdront le filet social et familial et appauvrira plus de familles. L’effet Covid-19 sur TOUTE l’économie tunisienne, n’en a pas encore fini avec la Tunisie. Le pire, nous le pensons comme plusieurs experts, reste malheureusement à venir.
– La vaccination pour un statut économique de pays « CovidSafe »
Et pourtant, on ne parle qu’épisodiquement du vaccin. Le directeur général de l’Institut Pasteur, Hechmi Louzir a dernièrement indiqué à la TAP, que la Tunisie « disposera d’un potentiel initial de 2 millions de doses de vaccins Pfizer/BioNTech contre la Covid-19. Elles lui seront remises de la part de la firme pharmaceutique américaine et son partenaire allemand à partir du deuxième trimestre de l’année 2021 ». Ce dernier a également précisé que le vaccin ne sera pas obligatoire et sera administré en premier aux patients atteints de maladies chroniques ainsi que les personnes travaillant dans des secteurs vitaux.
Et à supposer que les commandes aient été réellement faites, pas ou peu de mots sur la logistique nécessaire à cette vaccination. Des préparatifs comme l’achat des appareils de réfrigération des vaccins et le planning de vaccination, et dont on ne sait toujours rien.
Mais ce qu’on ne voit surtout pas, c’est cette conviction sérieuse du gouvernement Mechichi et du chef de l’Etat, que la sortie de crise, et la relance de l’économie, passent obligatoirement par une vaccination de masse, non pas facultative, mais obligatoire. La conviction que le vaccin est aussi une urgence économique et sociale, et la volonté politique de traduire cette conviction en investissement urgent dans la vaccination, comme le font les Marocains et les Algériens, n’existe point en Tunisie.
Vacciner la majorité de la population, devient en effet une urgence économique, à l’heure où comme dans d’autres pays , rien ne marchait pour endiguer l’expansion de la pandémie chez une population qui, poussée par les besoins de la vie et de l’économie, baissait de plus en plus la garde comme ce qui se passe à Sfax où le coronavirus explose carrément, et dans un pays où les chiffres officiels démontraient leurs limites devant le réel que soulignent les campagnes de dépistage du Covid-19.
Une vaccination, massive et obligatoire, nous semble en effet le meilleur investissement pour une réelle tentative de relance de l’économie. Une vaccination, massive et obligatoire, sauvera certainement la prochaine saison touristique, au moins, si ce n’est plus. Une vaccination, massive et obligatoire, fera de la Tunisie un pays « CovidSafe », pour l’investissement aussi, et évitera que le chômage ne pourrisse une situation sociale déjà très tendue.