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Tunisie : Pendant ce temps Ennahdha entame la reconquête du pouvoir par les municipales

Le samedi 6 août 2016,  s’est déroulée une cérémonie ô combien importante mais qui est passée presque inaperçue, complètement engloutie par le brouhaha autour de la formation du gouvernement d’union nationale : La cérémonie de clôture du cycle de formation des formateurs d’Ennahdha, dans la perspective des élections municipales. Le président du mouvement, Rached Ghannouchi, qui a bien compris toute la portée et toute la symbolique de la chose, a fait le déplacement. Cette manifestation qui ne payait de mine, notamment à un moment où tous les regards des acteurs de la scène politique sont cristallisés par les intenses négociations et le ballet incessant autour du nouveau chef du gouvernement, Youssef Chahed, est pourtant, il ne faut pas s’y tromper, la première pierre dans la stratégie de reconquête du pouvoir. Les autres challengers d’Ennahdha, en premier Nidaa Tounes, auraient tort de ne pas tiquer après ce coup de semonce.

Certes la tâche est ardue et le chemin encore long pour se refaire une virginité politique. En effet, le bilan d’Ennahdha au pouvoir et surtout les errements et tâtonnements au sommet de l’Etat, que les citoyens ont payés très cher, parfois au prix du sang (les assassinats politiques), sont encore trop frais dans les têtes pour espérer un retour en grâce à court terme. Mais Ennahdha, il n’y a aucun doute là-dessus, saura se montrer patient, comme exactement l’AKP en Turquie, même s’il faut souhaiter à la Tunisie un autre destin que le triste et horrible spectacle que nous offre le président turc en ce moment. Mais si on veut être honnête deux secondes, on reconnaitra aisément qu’Ennahdha a déjà fait un bon bout de chemin vers sa rédemption.

Voilà un parti qui avait été éjecté du pouvoir il y a peu, à coup de manifestations monstres devant le Parlement et de pressions tous azimuts, et qui est revenu au devant de la scène politique par un concours de circonstances dont l’artisan est le parti sorti majoritaire des élections législatives, Nidaa Tounes. Ennahdha peut dire un grand merci au parti du président de la République (il ne faut pas le crier sur les toits, il n’est plus à sa tête officiellement, même si personne n’est dupe), qui a un don exceptionnel pour le sabordage, au point de se retrouver deuxième force politique à l’ARP après une scission organisée de main de maitre par l’ex-secrétaire général du parti et le fils du chef de l’Etat. Il fallait quand même le faire ! Résultat des courses : Après avoir été évincé par la porte, Ennahdha est revenu par la fenêtre, comme si de rien n’était. Une vraie prouesse, tout de même. Il est partout maintenant, à toutes les tables qui président aux destinées du pays. Par moment il s’autorise même à parler plus fort que le vainqueur officiel des législatives. Etrange retournement de situation.

Le mouvement doit beaucoup à Rached Ghacouhi, fin stratège devant l’Eternel, animal politique par excellence (l’autre étant le locataire du palais de Carthage, Béji Caid Essebsi), qui a bien compris tout le bénéfice qu’il pouvait tirer de la posture de partisan de l’unité nationale, pour le bien de la nation, enfin selon les déclarations. Depuis leur fameuse rencontre à Paris, Ghannouchi et Essebsi ne se quittent plus. Au point qu’il est devenu extrêmement difficile faire le distinguo entre les deux, de mettre la main sur des divergences de point de vue. Bien malin celui qui pourra nous en dégoter une, je veux dire sur un sujet majeur. Il y en a pas. La tactique de Ghannouchi a tellement bien fonctionné que les turpitudes d’Ennahdha durant le court règne de la Troïka se sont estompées dans les esprits d’une bonne partie des Tunisiens.

Reculer pour mieux sauter

Quand le nouveau secrétaire général du mouvement et ministre de l’Emploi, Zied Ladhari, a déclaré qu’il n’était pas tabou d’envisager que le fauteuil de chef du gouvernement soit occupé par un nahdhaoui, vu qu’ils étaient devenus majoritaires à l’Assemblée des représentants du peuple, Ghannouchi a fait mine de lui taper sur les doigts en déclarant qu’ils n’avaient pas de candidat à ce poste. Certains observateurs avaient alors avancé que les propos de Ladhari n’étaient qu’un ballon d’essai. Sauf que le même Ghannouchi est revenu pour dire qu’il ne voyait aucun inconvénient à ce qu’une personnalité issue des rangs de son parti soit propulsée au palais de la Kasbah. Là les ténors de Nidaa Tounes, pour calmer les ardeurs du chef de file d’Ennahdha, ont dû dégainer le texte de la Constitution, lequel dit que le parti sorti vainqueur des élections a la main sur la désignation du président du gouvernement. Argument imparable.

Contraint de reculer, Ghannouchi et les siens se rabattent sur les négociations autour du gouvernement d’union nationale. Il se dit qu’Ennahdha, à la faveur de son nouveau statut de premier de la classe, a réussi à arracher à Youssef Chahed 6 portefeuilles ministériels clés. Peut importe le nombre in fine, ce qui est certain c’est qu’ils en auront beaucoup. En tout cas plus que dans le gouvernement Essid. C’est pas mal tout de même pour un parti qui n’a pas été à l’origine de la disgrâce de Habib Essid, qui l’a même soutenu à un moment, mais qui a vite compris le bénéfice qu’il pouvait tirer de sa chute, et l’a donc lâché très opportunément.

La suite ce sont les municipales, que le parti prépare soigneusement. Que fait Nidaa Tounes pendant ce temps ? Ses ténors ont l’oeil rivé sur Chahed, rêvant d’un maroquin ministériel. Quid des prochaines échéances électorales ? Rien… Ou pas grand chose. Une faute politique que le parti piloté par le fils du président de la République, Hafedh Caid Essebsi, pourrait payer très cher…

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