Près de 1 300 personnes issues de l’industrie, du monde universitaire, des gouvernements et des partenaires de développement ont participé à la récente conférence Aquaculture Africa (AFRAQ24) qui s’est tenue à Hammamet, en Tunisie, comme l’ont révélé les organisateurs, dans un bilan de ces assises livré par des experts sur Fishfarmingexpert. Les participants venaient de 74 pays du monde entier, la plupart d’entre eux d’Afrique.
La conférence avait pour thème « Blue Farming : Nouveaux horizons pour la croissance économique », l’événement a mis en évidence la manière dont les partenariats dans les domaines de la science, de l’éducation et des progrès technologiques peuvent contribuer à stimuler les innovations dans le cadre de l’agenda de l’économie bleue en Afrique.
Le ministre tunisien de l’Agriculture et de la pêche, invité d’honneur, côtoyait de hauts dignitaires de Tunisie, de Zambie, d’Algérie et d’Angola, ainsi que des invités de haut niveau et des spécialistes de l’Union africaine (UA), de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), de l’Union européenne, de la Banque mondiale et d’autres organisations, pour participer la conférence, organisée par la section africaine de la Société mondiale d’aquaculture (WAS-AC).
Le programme scientifique et technique de la conférence est très chargé, avec des sessions équilibrant les perspectives mondiales et africaines. Dans l’ensemble, le programme comprenait 41 sessions, 277 résumés, 46 posters et quatre ateliers de formation.
Outre les organisations de développement, plus de 100 acteurs de l’industrie et professionnels de Tunisie, d’Afrique et du monde entier ont participé à AFRAQ24. Parmi les principaux acteurs de l’industrie figuraient Nutrifish (sponsor or d’AFRAQ24), Aller Aqua et plusieurs autres entreprises d’aliments pour poissons, de production de poissons, de fourniture d’équipements et de conseil.
Le programme technique et scientifique a été complété par une grande foire commerciale internationale qui comprenait 55 stands d’exposition provenant de 22 pays. Le pavillon d’exposition de la Tunisie présentait l’industrie aquacole du pays et certains projets de soutien. Plusieurs entreprises aquacoles de Tunisie et de la région méditerranéenne étaient présentes dans ce pavillon.
En marge d’AFRAQ24, le conseil d’administration exécutif de la WAS-AC a convoqué la quatrième réunion annuelle du conseil d’administration du chapitre. Le WAS-AC a également organisé les sessions du programme des étudiants africains au profit de plus de 80 étudiants qui y ont participé physiquement. La deuxième session annuelle de la plate-forme WAS pour les pays de langue portugaise (PALOP) a également eu lieu.
La prochaine conférence africaine de la WAS est prévue à Entebbe, en Ouganda, du 24 au 27 juin 2025. Elle sera suivie par AFRAQ26, prévue à Dar-es-Salaam, en Tanzanie, au début du mois de décembre 2026, puis par World Aquaculture 2027, prévue à la fin du mois de novembre 2027 à Accra, au Ghana.
Nouveaux défis aquacoles
Parmi les raisons qui ont incité les organisateurs à choisir la Tunisie, figure sans doute la position géographique du pays, au cœur de la Méditerranée où l’aquaculture se développe rapidement, répondant à la demande croissante de poisson au niveau mondial. Cependant, cette croissance s’accompagne d’un certain nombre de défis qui affectent non seulement l’environnement, mais aussi l’écosystème de la pêche sauvage et le patrimoine génétique des espèces de poissons. Les daurades et les bars d’élevage, lorsqu’ils s’échappent des installations d’aquaculture, rejoignent les bancs sauvages, ce qui contribue à augmenter les captures et à modifier l’équilibre naturel de l’écosystème marin.
Une étude récente publiée dans Nature’s Scientific Reports a clairement démontré que, dans la mer Méditerranée, les évasions de poissons d’élevage affectent de manière significative les débarquements de pêche. En particulier, pour la daurade (Sparus aurata), il a été démontré que l’augmentation des captures était due à la biomasse des poissons d’élevage qui parviennent à s’échapper, ce qui génère un effet qui, dans de nombreux cas, masque l’état d’exploitation des populations sauvages. Bien que le bar ait initialement montré une tendance similaire, la mortalité après évasion et la difficulté de le capturer ont atténué cet effet au cours des dernières années.
Risques écologiques
Si l’aquaculture est une ressource essentielle pour garantir l’approvisionnement en poisson, elle n’est pas à l’abri des problèmes écologiques. Lorsque les poissons d’élevage se mélangent à leurs congénères sauvages, ils peuvent transmettre des maladies et des parasites et provoquer des variations génétiques. En Méditerranée, où les stocks sauvages sont déjà soumis à la pression de la surexploitation et des activités humaines, cette hybridation pourrait représenter un risque important pour la biodiversité locale et la résilience des écosystèmes marins.
Avec l’augmentation de la fréquence des phénomènes météorologiques extrêmes, tels que les tempêtes violentes qui endommagent les installations aquacoles, le risque d’évasions massives de poissons augmente, entraînant un impact cumulatif sur les populations de poissons sauvages. Bien que l’aquaculture de la dorade et du bar fasse désormais partie intégrante du secteur piscicole méditerranéen, la surveillance et la gestion des évasions sont désormais cruciales pour minimiser les effets négatifs à l’échelle de l’écosystème.
Pour relever ces défis, des plans de surveillance doivent être mis en œuvre pour identifier les poissons échappés et des mesures d’urgence doivent être prises pour réduire l’entrée des spécimens d’élevage sur le marché en tant que poissons sauvages. Cette stratégie permettrait de mieux gérer les ressources et de mieux contrôler la sécurité alimentaire. La recherche met en évidence la façon dont les poissons d’élevage peuvent modifier les équilibres marins et contribuer, de manière non planifiée, au « repeuplement » des espèces sauvages, soulignant l’urgence de développer des pratiques durables et des technologies de pointe pour contenir les évasions et sauvegarder l’écosystème méditerranéen.