AccueilLa UNEFitch-Tunisie : Sans fausse note, ou si peu !

Fitch-Tunisie : Sans fausse note, ou si peu !

Après une longue série de dégradations et de remises en cause, la note souveraine de la Tunisie semble amorcer un cercle un tant soit peu vertueux, l’agence Fitch ayant a relevé sa note de défaut émetteur (IDR) à long terme en devises à « CCC+ “, contre ” CCC- » auparavant.

Dans son « exposé des motifs », l’agence de notation souligne tout d’abord « la position extérieure plus forte de la Tunisie qui lui permet de maintenir ses réserves internationales à un niveau suffisant pour faire face aux paiements extérieurs courants et aux obligations de la dette ». Et ceci ne dispense pas que s’expriment de « besoins de financement toujours élevés, un accès limité au financement extérieur, l’incertitude quant à la capacité et à la volonté du secteur bancaire d’assumer d’importants volumes de dette intérieure et un budget qui reste vulnérable aux chocs extérieurs ».

Il n’en demeure pas moins, constate Fitch, que « la capacité de la Tunisie à faire face aux obligations de la dette extérieure en 2024-2025 s’est améliorée, avec un déficit du compte courant (CAD) plus faible, renforçant les réserves internationales au-delà des attentes précédentes ». A cet égard, l’agence de rating prévoit que les réserves en devises resteront supérieures à trois mois de paiements extérieurs courants jusqu’en 2026, ce qui permettra à la Tunisie de continuer à assurer le service de ses obligations au titre de la dette extérieure, soutenue par des flux continus de financement extérieur, malgré l’absence d’un programme du FMI. Il est rappelé, au demeurant, que la Tunisie a un euro-obligation d’un milliard de dollars qui arrive à échéance en janvier 2025 et un euro-obligation de 700 millions d’euros qui arrive à échéance en juillet 2026.

Quant aux besoins de financement budgétaire, hors amortissements à court terme, ils s’élèveront à 18 % du PIB en 2024 et resteront supérieurs à 14 % du PIB sur la période 2025-2026. Ce chiffre est bien supérieur à la moyenne de 9 % pour la période 2015-2019 et se situe parmi les niveaux les plus élevés des pays pairs notés « CCC+ » ou moins. Les besoins de financement élevés découlent de la persistance de déficits budgétaires importants et des échéances élevées de la dette intérieure et extérieure à long terme, qui s’élèvent à environ 11 % du PIB en 2024, ajoute Fitch.

S’agissant des sources de financement extérieures, elles demeurent « limitées mais persistantes », juge-t-elle, assurant que le soutien extérieur persistant, combiné à la baisse des amortissements extérieurs, devrait permettre à la Tunisie d’équilibrer son financement extérieur net d’ici 2026.

Une capacité de financement saturée

Le gouvernement a besoin de 10 % du PIB en financement intérieur à long terme en 2024, et de 10 % à 12 % en 2025 et 2026, prévoit l’agence de rating qui estime les emprunts intérieurs nets à court terme à 0,6 % du PIB en 2024. Ses hypothèses reflètent une loi adoptée début 2024 autorisant la banque centrale à financer le budget à hauteur de 7 milliards TND en 2024 (4,3 % du PIB). Une partie de ce financement direct a permis de rembourser une obligation de 850 millions d’euros (2,9 milliards de TND) qui arrivait à échéance en février 2024. Fitch ne prévoit pas d’autres financements monétaires directs, mais des risques subsistent et cela pourrait nuire à la discipline budgétaire, à la monnaie et à la stabilité des prix.

Dans cette configuration, le secteur bancaire national pourrait aider à répondre aux besoins de financement de l’État, car la croissance des dépôts et la faible demande de crédit soutiennent la liquidité du secteur. Néanmoins, cela augmentera l’exposition des banques au secteur public, qui représente déjà environ 20 % du total des actifs du secteur bancaire, ce qui nécessitera un refinancement des banques locales par la banque centrale. L’on s’attend à ce que les banques publiques assument une plus grande part de la charge financière en raison de la prudence de certaines banques privées.

Pour ce qui est des déficits budgétaires, Fitch pense que la réduction de la masse salariale, des dépenses d’investissement et des subventions devrait permettre de ramener le déficit budgétaire à 6,4 % du PIB en 2024, 5,3 % en 2025 et 4,7 % en 2026, contre 7,1 % en 2023. Elle ne prévoit cependant pas une de réforme du système de subventions, « en raison de l’opposition politique à l’augmentation des prix réglementés des produits alimentaires et énergétiques », explique-t-elle. Toutefois, la baisse des prix internationaux devrait réduire les coûts des subventions de 1,7 point de pourcentage du PIB d’ici à 2026.Il est prévu également que la masse salariale diminuera à 12,9 % du PIB d’ici 2026, contre 14,3 % en 2023, en raison d’augmentations salariales inférieures à l’inflation.

La masse salariale, les intérêts et les subventions absorberont 87 % des recettes totales, hors dons, en 2026, contre 95 % en 2024. Le coût budgétaire des subventions reste vulnérable aux chocs de prix sur les marchés internationaux ; par exemple, un prix du pétrole Brent de 80 USD le baril en 2026, contre 65 USD selon les prévisions, augmenterait le déficit budgétaire de 0,7 point de pourcentage du PIB.

Une dette élevée, vulnérable aux chocs

Fitch dit prévoir que la dette publique restera supérieure à 80 %, à 83,4 % en 2024, 82,2 % en 2025 et 80,8 % en 2026 (2023 : 83,9 %). La trajectoire de la dette est très sensible à la dépréciation de la monnaie et aux chocs budgétaires, dans un contexte de forte vulnérabilité à la volatilité des prix internationaux des matières premières. Une gestion et une réglementation rigoureuses du marché des changes et des réserves internationales solides ont permis de maintenir le taux de change stable en 2022-2024.

Cette stabilité devrait se poursuivre, assure l’agence de notation, mais des risques pourraient résulter de la diminution du financement extérieur et du financement monétaire du déficit. Une dépréciation plus marquée augmenterait la dette/PIB, compte tenu de la part élevée de la dette en devises étrangères, mais une part élevée de la dette du secteur public bénéficie de conditions de financement favorables.

Le déficit du compte courant (CAD) diminuera à 2,4 % du PIB en 2024, contre 2,7 % en 2023, car les exportations dépassent les importations et les envois de fonds restent importants. Le CAD est passé de 9,0 % en 2022 à une moyenne de 7,9 % sur la période 2010-2022, à la suite d’un rebond des exportations de services et d’une baisse des importations. Fitch prévoit que la baisse des prix de l’énergie et des matières premières maintiendra le CAD à 2,9 % du PIB en 2025 et à 3,5 % en 2026. Cela devrait atténuer la chute des réserves à 3,4 mois de paiements extérieurs courants d’ici 2026, contre 4,2 mois en 2024, grâce à la stabilité des entrées nettes d’investissements directs étrangers et à la modération des autres flux de financement.

Pour ce qui est enfin des risques politiques, Fitch évoque une « faible probabilité de tensions sociales ou de troubles autour de la prochaine élection présidentielle, mais certains candidats ont été empêchés de participer au processus et des litiges juridiques sont en cours ». L’agence s’attend à ce que le président sortant soit réélu et à ce qu’il y ait une continuité politique après les élections. La gouvernance, telle que mesurée par les indicateurs de gouvernance de la Banque mondiale (WBGI), est un point fort par rapport à ses pairs, bien que les récents développements posent un risque de baisse, conclut Fitch

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