Un climat plus chaud entraîne un rendement imprévisible des céréales, notamment du maïs, tel est le verdict rendu par l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture. Lui emboîtant le pas, la Banque mondiale prévoit que, d’ici à 2030, plus de 130 millions de personnes à travers le monde seront poussées dans l’extrême pauvreté à cause du changement climatique.
Déjà, on cite l’exemple du Nigéria où, en 2020, la production de maïs a chuté de 13 %, passant d’une prévision de 11,5 millions de tonnes à neuf millions de tonnes, selon le ministère de l’agriculture des États-Unis.
Les épisodes de sécheresse n’y sont pas nouveaux, mais les scientifiques ont constaté que le réchauffement climatique a exacerbé les épisodes de sécheresse. Le portail climatique de la Banque mondiale montre que les précipitations annuelles au Nigeria entre 1941 et 2000 ont chuté de 8 mm, entraînant une diminution des pluies, une hausse des températures et une réduction de l’humidité des sols.
Ailleurs, à plus de 2 500 km de là, les agriculteurs tunisiens sont confrontés à des difficultés liées à la raréfaction de l’eau pour leurs cultures, le pays ayant connu environ sept sécheresses qui ont tari les eaux de surface au cours des dix dernières années, note l’ICIR ( International Centre for Investigative Reporting). Il cite un agriculteur de la région de Sidi Mahmoud dans le gouvernorat de Kairouan qui se plaint de devoir « aller de plus en plus loin pour trouver de l’eau » « Nous devons creuser jusqu’à 300 mètres pour trouver de l’eau. Même si trois ou quatre d’entre nous se réunissent, nous n’avons pas les moyens de couvrir le coût d’un creusement aussi profond. »
La rareté de l’eau a chassé de nombreux agriculteurs de Sidi Mahmoud, autrefois une référence alimentaire en Tunisie, en plein essor avec les produits d’olive, d’orange, de pastèque et de tomate. L’ICIR cite en particulier le cas de trois frères agriculteurs qui ont renoncé au travail de la terre et se sont installés en ville, tandis que la femme de l’un d’eux a trouvé un emploi en usine dans une autre ville, le laissant seul avec leurs deux enfants.
En 2016, les pertes agricoles liées à la sécheresse en Tunisie ont été estimées à 2 milliards de dinars, selon l’Union tunisienne de l’agriculture et de la pêche.
Un oléiculteur de Sidi Mahmoud est tout aussi frustré. « Ce qui me tourmente le plus, c’est que j’ai investi dans ces oliviers », dit-il. « Quand ils arrivent à l’âge de produire régulièrement et en bonne quantité, il n’y a plus d’eau pour les faire vivre ».
Des aliments moins nutritifs en raison de la hausse des températures
Selon une nouvelle étude, publiée en janvier dernier, la hausse des températures est à l’origine d’une alimentation plus pauvre dans les pays à faible revenu, les agriculteurs manquant de plus en plus de diversité dans leur régime alimentaire.
« Il est certain que les changements climatiques futurs ont été prédits comme pouvant aggraver la malnutrition, mais nous avons été surpris de constater que les températures plus élevées ont déjà un impact », a écrit Meredith Niles, auteur principal de l’étude et professeur adjoint de nutrition et de sciences alimentaires à l’université du Vermont.
Le Nigeria et la Tunisie sont tous deux signataires des objectifs de développement durable des Nations unies, qui visent à mettre fin à la malnutrition d’ici 2030.
Alors que le Nigeria n’a pas encore atteint ses objectifs en matière de retard de croissance, d’émaciation et d’insuffisance pondérale, la Tunisie est en bonne voie. Elle a progressé vers la réalisation de son objectif en matière de retard de croissance, bien que 8,4 % des enfants de moins de cinq ans soient encore concernés, ce qui est inférieur à la moyenne africaine de 30,7 %. Pour l’émaciation, 2,1 % des enfants tunisiens de moins de cinq ans sont touchés, contre 6 % en moyenne en Afrique.
Une nutritionniste basée à Tunis explique que le manque de nutriments essentiels qu’elle qualifie de « protéines nobles » fait défaut dans les repas d’une majorité de la population. « Nous recommandons aux gens de manger quatre fruits ou légumes par jour, mais ils ne sont pas accessibles aux citoyens », explique-t-elle. « Sans parler de la viande ou du poisson ou des protéines considérées comme nobles qui sont très importantes pour traiter l’anémie et en même temps pour répondre aux besoins de la population. »
Le rapport du Programme alimentaire mondial en 2022 confirme que la Tunisie est confrontée à des problèmes de nutrition qui se chevauchent, notamment des carences en vitamines et en minéraux.
Le pays est également accablé par une carence en fer pour environ 28 % des enfants de moins de cinq ans et des mères allaitantes. « Il est nécessaire de créer une dynamique pour une bonne nutrition à travers une bonne éducation nutritionnelle pour les citoyens afin d’éviter la consommation d’aliments riches en énergie. « La plupart de ces problèmes peuvent être résolus en orientant la consommation vers une nutrition bonne et diversifiée », affirme la nutritionniste.