AccueilLa UNELe ministre qui ose parler sans qu'il ne soit renvoyé

Le ministre qui ose parler sans qu’il ne soit renvoyé

Force est de constater qu’il est actuellement presque le seul homme d’Etat de l’après dite révolution qui fait l’exception, et qui tient convenablement son rang de ministre. A 66 ans, ce Centralien de Paris et ancien de l’ATB, qui a longtemps roulé sa bosse dans le domaine des finances arabes, s’était illustré à la tête de la STB par un conflit avec l’ancien chef de gouvernement Youssef Chahed qu’il a dû quitter.

Samir Saïed rebondit ensuite à la tête de l’opérateur téléphonique historique en Tunisie, pour se retrouver ministre de l’Economie et de la planification où il est depuis octobre 2021, choisi à ce poste par Kais Saïed qui ne le recevra ensuite presque jamais en audience individuelle.

Direct et toujours droit dans ses bottes et ses positions, le ministre de l’Economie ose dire à haute voix ce que ses collègues savent pertinemment et ne disent pas, dans un gouvernement où le silence est une directive. Et on se rappelle comment l’ancienne ministre de l’Energie avait été débarquée sans ambages, lorsqu’elle avait osé affirmer que l’Etat lèvera la compensation sur les produits pétroliers, ce funeste (Pour elle et qui lui fit perdre certaines de ses amies) jeudi 4 mai 2023.

Ce jour-là, le chef de tout l’Etat tunisien disait que « aucune partie en Tunisie n’a non plus le droit d’agir à l’encontre de la politique déterminée par le Président de la République » et que « celui qui pense encore travailler sous l’ancienne constitution (…) vaut mieux qu’il n’assume aucune responsabilité ».

–          L’exception dans un gouvernement muet et sage comme une image

Ce ministre n’a pas sa langue dans la poche, et ose rappeler à son président ce qu’il refuse de croire et réfute même. Solennellement et devant l’ARP,  Samir Saïed a ainsi déclaré, vendredi 28 juillet 2023, où il prenait part à une plénière sur le projet de loirelatif à l’approbation de l’adhésion de la Tunisie à l’accord sur la création de l’Africa Finance Corporation (AFC), que « s’il n’y avait aucun accord conclu que ce soit avec le FMI ou avec l’alternative que nous n’avons pas actuellement, notre note souveraine serait abaissée ». Selon l’ancien financier qu’est Samir Saïed, en tout cas « la Tunisie ne pourra pas recourir aux marchés internationaux pour emprunter. L’accord est nécessaire pour disposer des ressources nécessaires à la mise en œuvre du plan de développement ». Et d’ajouter comme en guise de défi à tous ceux qui prétendraient autrement, que « celui qui a une alternative au FMI n’a qu’à la proposer ». A qui s’adressait-il ? On ne le saura pas !

Les propos de Samir Saïed rompent d’abord le silence, du gouvernement et de la BCT, à propos du sort du fameux prêt de 1,9 Milliard USD, depuis l’obtention du SLA (Staff Level Agreement) en octobre 2022. Et les déclarations, plusieurs fois répétées par le chef de tout l’Etat tunisien lui-même sur son refus du « Diktat » du FMI n’arrangent pas les choses malgré les tentatives de médiation des Italiens.

Et c’est la 1ère fois depuis octobre dernier qu’on apprend que la Tunisie tente encore d’arrondir les angles entre les refus de Kais Saïed du Diktat et les exigences du FMI. « Nous avons fait des propositions et nous les améliorerons et les orienterons dans la direction demandée par le président de la République. Nous espérons parvenir à un accord avec le FMI le plus rapidement possible », a ainsi dit le ministre de l’Economie et de la planification, la semaine dernière devant l’ARP, prétendant cependant que le gouvernement a déjà commencé à mettre en œuvre ces réformes en adoptant une approche qui prend en compte les catégories à faible revenu. Et on ne sait pas pourquoi il a dit cela, le chef de tout l’Etat ayant fait de presque tous les prérequis du FMI à son crédit de 1,9 Mds USD, des lignes rouges comme l’avait fait avant lui Noureddine Tabboubi de l’UGTT.

–          Il défonce une autre ligne rouge présidentielle. Tiendra-t-il longtemps ?

En fait, ce ministre qui ose aussi dire devant députés que « la société tunisienne consomme depuis longtemps plus que ce qu’elle ne produit », n’en était pas à sa première. En effet, le 26 décembre 2022 déjà, l’homme d’Etat qu’est ce Saïed, disait déjà que « le gouvernement tunisien n’a pas d’alternative à un accord avec le FMI. On n’a pas de plan B par rapport au FMI, je l’ai dit. Le seul plan B qu’on a est plus de fiscalité, moins d’investissements publics ».

Constant dans ses positions, à propos de l’évolution de la situation économique et financière dans son pays, Samir Saïed disait déjà aussi la vérité sur la situation économique de la Tunisie, et il l’a répété devant les députés de l’ARP de Kais Saïed. « La situation économique en Tunisie souffre de nombreux dysfonctionnements (…) et le déficit commercial [Ndlr : Plus de 8, 686 Milliards DT en juin 2023] qui peut affaiblir le dinar ».

Défonçant ensuite une autre ligne rouge présidentielle, celle des entreprises publiques à propos desquelles le chef de tout l’Etat exclut toute privatisation, le ministre de l’Economie et de la Planification, Samir Saïed, déclarait aussi samedi dernier, qu’en ce qui concerne les entreprises publiques, il n’est pas possible pour l’Etat de continuer à payer leurs dettes au détriment des investissements et des investissements sociaux, et elles doivent être une source de revenus pour l’État et non l’inverse. « Une entreprise publique qui est incapable de rivaliser avec le secteur privé, on n’en a pas besoin, et elle doit être vendue, privatisée ou fermée (ar), et ses revenus utilisés dans des projets plus réalisables, et l’exploitation des ressources humaines dans des projets à plus haute viabilité, et fournissant des revenus à l’État afin que nous n’ayons pas recours à l’emprunt pour couvrir les pertes » disait témérairement Samir Saïed dans un commentaire sur les interventions des élus sur la question des réformes. Tiendra-t-il longtemps en assenant de telles vérités que nul autre dans le gouvernement n’avait osé ?

- Publicité-

2 Commentaires

  1. Tel que je l’ai connu et discuté avec lui, trois fois depuis l’été dernier, c’est un Saaïed d’un autre calibre.
    Il a adopté sans la moindre réserve le « Programme pilote Innov’Administration » que j’ai préconisé parmi les grandes réformes structurelles, et il l’a fait approuvé parmi les quelques 229 mesures avalisées par le conseil des ministres du 27 déc. 2022.
    C’est vous dire, …

  2. Cette situation nous fait perdre nos capitaux humains et financiers à la faveur des pays plus développés, plus riches et plus stables.
    Dommage qu’il faille réapprendre aux tunisiens l’amour de leur patrie avec l’éveil nécessaire et le minimum de sacrifices pour sortir du trou.

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

Réseaux Sociaux

108,654FansJ'aime
480,852SuiveursSuivre
5,135SuiveursSuivre
624AbonnésS'abonner
- Publicité -