L’hémophilie, longtemps considérée comme une maladie exclusivement masculine, affecte également les femmes, particulièrement sous forme de menstruations abondantes ou prolongées chez les jeunes filles, a alerté dimanche la professeure Emna Gouider, spécialiste en hématologie.
« Des saignements menstruels dépassant sept jours peuvent être un signe d’hémophilie », a déclaré la spécialiste lors d’une journée scientifique organisée par la Cité des Sciences de Tunis en partenariat avec l’Association Tunisienne de l’Hémophile (ATH), sous le thème « Les femmes et les filles saignent aussi ».
Cette maladie rare du sang, qui empêche sa coagulation normale, touche environ 1140 Tunisiens selon les statistiques de 2023, mais seulement la moitié d’entre eux suivent un traitement, a indiqué Chedia Aroua, présidente de l’ATH.
L’hémophilie se caractérise par l’absence totale ou partielle d’une protéine essentielle à la coagulation, a expliqué Pr Gouider. Bien que généralement héréditaire, la maladie apparaît dans un tiers des cas dans des familles sans antécédents.
Les personnes atteintes saignent plus longtemps en cas de blessure et peuvent souffrir d’hémorragies internes spontanées, notamment dans les articulations comme les genoux, les chevilles et les coudes, provoquant leur détérioration progressive et parfois des complications mortelles.
Les patients peuvent recevoir des traitements dans trois centres spécialisés en Tunisie : le Centre des Hémophiles de l’Hôpital Aziza Othmana à Tunis, le Service d’Hématologie de l’Hôpital Universitaire Farhat Hached à Sousse et le Service d’Hématologie de l’Hôpital Universitaire Hedi Chaker à Sfax.
Le traitement standard consiste en des injections intraveineuses trois fois par semaine du facteur de coagulation manquant. Un nouveau médicament innovant, administré par injection sous-cutanée une fois toutes les deux semaines, est désormais disponible en Tunisie, mais n’est prescrit qu’à certains cas complexes en raison de son coût élevé.
Si la Caisse Nationale d’Assurance Maladie (CNAM) prend en charge les coûts pour ses affiliés, de nombreux patients non assurés et à faible revenu peinent à accéder aux soins nécessaires.
L’ATH négocie actuellement avec la CNAM pour une prise en charge du nouveau traitement, ainsi qu’avec les laboratoires pharmaceutiques étrangers pour une baisse des prix.
« Avec un traitement précoce et approprié, les patients peuvent mener une vie normale et productive », a souligné Pr Gouider, alors que sans traitement, la maladie peut causer des douleurs intenses, des dommages importants aux articulations, une incapacité fonctionnelle, un isolement social et des saignements potentiellement mortels.