AccueilLa UNEQui lui a soufflé ce genre de discours, plaintif et supplicateur ?

Qui lui a soufflé ce genre de discours, plaintif et supplicateur ?

Il y a presqu’une année, jour pour jour, le 1er juin 2023, il déclarait sur les ondes de Mosaïque fm, que « on ne peut pas gérer l’économie, selon le populisme… Il y a des normes qui doivent être suivies », commentant la réunion de Kais Saïed avec des universitaires pour discuter de la situation socioéconomique de la Tunisie.

Le 7 avril 2023 sur un autre site économique, Amel Belhaj Ali rapportait que « Fethi Nouri, économiste, s’est dit choqué par les déclarations du président de la République jeudi 6 avril ! Le projet sociétal du président ne présente aucune alternative ou programme économique, dit-il ». Et d’ajouter que « Il commente : « C’est une réponse politique à un dossier économique et à ce propos, le FMI pourrait demander des éclaircissements au gouvernement tunisien. Au cas où le dossier Tunisie est retiré du Fonds monétaire, le pays pourrait entrer dans une crise financière dont nous ne pouvons pas prédire les conséquences ». 

  • Dénigrer le FMI et les agences de notation, est-ce la solution ?

Depuis Saint-Pétersbourg, où il a participé, le 7 juin, à une discussion sur le « rôle du secteur financier dans la réalisation des objectifs stratégiques de développement » dans le cadre du Forum économique international de Saint-Pétersbourg, le Gouverneur de la BCT depuis le 13 février 2024, et qui n’a pas tenu conseil d’administration depuis le 22 mars 2024 alors que la loi stipule une intervalle maximale de deux mois (sic.), a beaucoup changé !

Et à l’entendre parler, alors qu’une délégation du FMI était déjà en Tunisie selon nos sources (certes pas pour négocier), la Tunisie qu’on croyait pays en développement (10ème pays africain le plus riche en avril 2024 selon un classement de la BAD), se retrouve dans « la galaxie des pays pauvres ». Et le gouverneur de la BCT de continuer que « je vous cite le cas de mon pays, la Tunisie, qui souffre de cette difficulté d’accès aux financements extérieurs. Je ne sais pour quelle raison. Ou nous sommes punis, pour je ne sais pourquoi, ou nous sommes privés de ces sources pour financer notre économie ».

Toute la Tunisie sait pourtant que c’est parce que son pays a refusé, et refuse encore, de faire les réformes qui rendraient l’économie tunisienne bancable, que ça traîne pour le crédit de 1,9 Milliard USD qu’elle demandait. Des réformes, sur lesquelles toute la sphère économique et financière s’accordait et disait même qu’on devait les faire de nous-mêmes sans attendre le FMI. Des réformes qui ressembleraient presque à ce que demanderait une banque commerciale à tout demandeur de crédit, ou ce qui serait demandé à une entreprise placée sous redressement judiciaire, même négocié !

  • Il savait pourtant qu’il y avait un problème de gouvernance

Et Fethi Nouri, qui avait été membre du CA de la BCT du temps des premières négociations avec le FMI sur ce même programme, de se poser encore la question de savoir « Qu’est-ce qu’on (nous) demande ? ». On le sait pourtant : le FMI avait accepté la feuille de route à la tunisienne, mise à jour par l’ancienne cheffe de gouvernement Najla Bouden et l’actuelle ministre des Finances Sihem Nemsia, avec le FMI qui l’avait acceptée et en demandait juste démonstration de faisabilité par la mise en application d’une ou deux mesures pour mesurer aussi le degré d’acceptation de la population tunisienne. Et c’est l’actuel président de la République tunisienne, qui mettra fin à ces négociations, sous couvert de souverainisme. 

L’économiste Fethi Nouri, qui rendait compte mardi de son périple russe à Ahmed Hachani, n’était pourtant pas complètement dans le faux. « Il faut créer de la richesse, et c’est très difficile dans les pays en développement. C’est un problème de manque de ressources, naturelles, ou financières, et surtout un problème de gouvernance », disait-il à Pétersbourg et devant le modérateur russe qui avait essayé à l’interrompre à deux reprises.

Et force est de confirmer, comme il l’avouait lui-même, que la gouvernance des ressources budgétaires tunisiennes, servant à hauteur de plus de 44 % aux salaires (Chiffres fin mars 2024), contre des dépenses d’investissement (0,631 Milliard DT) étaient en baisse de 8,3 % au 1er trimestre 2024. De fait donc, et à la fin du 1er trimestre dernier, l’Etat tunisien récoltait plus de 12 milliards DT en ressources et en dépensait à peine plus de 5,2 % pour créer les richesses que déplorait le gouverneur de la BCT !

  • Le « mendiant râleur »

« Aller chercher de l’argent auprès du FMI. Là, je ne vous apprends rien de nouveau, les relations entre cette institution et les pays en développement sont très tendues. On ne se comprend pas peut-être », dit le représentant officiel de la Tunisie auprès du FMI et 1er financier d’un pays qui tarde à se soumettre, comme tous les pays du monde, à l’article VI.

Et de tancer directement « le FMI (qui) a toujours promu un seul type de croissance, celui des pays riches, que les pays pauvres devraient imiter au détriment de leurs propres besoins. En outre, il assure le montage financier, et décide si un prêt doit être accordé ou pas, pour mettre la confiance dans les autres bailleurs de fonds. Ndlr : N’est-ce pas la même chose chez les banques tunisiennes, contrôlées par la BCT, pour le citoyen lambda ?

Toujours aussi plaintif, et pourtant fin connaisseur des pratiques du FMI et de l’impact international de ses avis, Nouri se demande pourtant, comme s’il aurait un écrit dans ce sens « pourquoi cette condition d’avoir un accord avec le FMI pour que les autres bailleurs de fonds acceptent de donner de l’argent pour financer votre économie ? Et si on n’a pas un tel accord, pourquoi nous priver de l’accès aux marchés internationaux ? ». Plaintif, et selon nous, faussement orgueilleux, il se laisse aller à un « nous sommes un pays souverain », tout en se demandant, désemparé, « comment voulez-vous que mon pays soit capable de relever le triple défi, de la viabilité de la dette, des impacts climatiques, et de la transition énergétique, sans accès au financement extérieur multilatéral, sachant que les conditions du marché financier sont exorbitantes et contraignantes ».

Candide, il reprend ensuite le discours officiel qui avait abouti à la rupture avec le FMI, en proposant que « il faut revoir la politique du FMI avec beaucoup de pays du tiers-monde pour être plus équitable et plus juste, et que tout le monde puisse profiter de cette masse d’argent qui circule aujourd’hui à l’échelle internationale ». Or, rien de nouveau dans ce sens, car justement une décision de redistribution des DTS (droits de tirages spéciaux) des pays «  riches » aux autres membres du FMI fait son chemin depuis un bon moment.

Et de décocher ensuite une flèche contre les agences de notation, dont un exemple tunisien exerce déjà sans compter les sociétés de crédit-bureau pour le scoring des entreprises, pour  accuser leurs notations de « cacher des positions politiques, selon la nationalité de l’agence. Avec cette conditionnalité, les taux d’intérêts aujourd’hui pour la Tunisie, sont de 12 % contre ce qui est ailleurs entre 1 et 2 %, et ça fait mal ». Des paroles, qui ne vont rien arranger pour la Souveraine tunisienne que la BCT espère améliorer, et on sait que l’une d’elles a refusé d’améliorer la notation d’une assurance tunisienne, malgré ses bons résultats, sous prétexte non déclaré, de la mauvaise note souveraine de la Tunisie.

  • Les incohérences d’un supplicié supplicateur

Pour les prêts bilatéraux, « vous savez tous, que pour qu’un pays puisse donner de l’argent à un autre, il faut s’aligner sur la politique du donateur. S’aligner sur sa politique étrangère, dans un monde qui change vite. Ou bien vous êtes mon ami, et vous suivez ma politique étrangère, et je vous donne de l’argent, et si vous n’êtes pas mon ami, ne suivez pas ma politique et ma stratégie, je vous donne pas de l’argent. Cette condition d’alliance ne peut être en faveur des pays du tiers-monde », dit Fethi Nouri, un peu trop supplicateur, selon certains observateurs.

Comment comprendre sinon, au moins l’un des derniers crédits saoudiens pour remédier au transport ferroviaire du phosphate ? Ou encore, la tournée-visite qu’effectue actuellement Éric Meyer, secrétaire d’Etat adjoint au Trésor américain lors de laquelle il a rencontré au minimum, le Gouverneur de la BCT et la ministre des Finances ?

Et comme pour menacer de désobéissance économique la « galaxie des riches » qui refuse à son pays un argent sans conditions, le gouverneur de la BCT évoque les pays qui tentent de rallier le groupe des BRICS afin de prendre crédit chez sa banque, mais ne pousse pas l’audace jusqu’à demander officiellement l’adhésion de la Tunisie à ce groupe de pays, à l’image des 23 autres pays qui ont déjà candidaté.

La « menace » a peut-être été entendue, puisqu’à peine rentré à Tunis, Fethi Nouri recevait le vice-ministre du Trésor américain Eric Meyer, qui était aussi Senior Advisor au Conseil d’Administration du FMI. Et les deux hommes ont peut-être soulevé les questions de l’appui budgétaire et le retard de la Tunisie dans la conclusion de la Revue annuelle du FMI au titre de l’Article VI.

Une Revue, sorte d’audit financier approfondi, qui a toujours été le livre de chevet de tout investisseur ou banquier international. Une Revue, que refuse désormais de laisser faire la Tunisie, comme si elle avait des cadavres dans les placards, et qui explique pourquoi les bilatéraux et même les internationaux traînent les pieds quand il s’agit de prêter à la Tunisie du 25 juillet. Isin’t it Madame la ministre !   

  • La bonne parole du Gouverneur : « On ne demande pas de l’argent facile et magique »

Nous on estime, à l’écoute des 10 minutes de Fethi Nouri en Russie, que le gouverneur de la BCT aurait mieux fait de présenter son pays sous un meilleur jour qui faciliterait, peut-être et en dépit du FMI, son accès à d’autres sources de financement, bilatérales ou sur les marchés internationaux, et poussé les investisseurs à aider la Tunisie à créer plus de richesses et d’emplois.

On aurait aimé voir un Gouverneur, fier comme le Président du pays, au moins devant les autres, de ce qu’a réalisé son pays en matière de résilience comment le disent les chiffres du chef du gouvernement, et qu’il tienne à Pétersbourg le même discours que celui tenu devant Eric Meyer accompagné de l’ambassadeur Hood (ar). Un discours, dont Sihem Nemsia a repris les éléments de langage.

Force est de dire en définitive que Nouri avait raison de dire en Russie (par ailleurs 2ème plus gros déficit commercial avec la Tunisie), que la Tunisie « ne demande pas de l’argent facile. Mais de l’argent utile pour notre développement. On ne demande pas de l’argent magique. On demande de l’argent qui nous serve à développer notre pays ».

Encore fallait-il qu’il le fasse avec une fière souveraineté, pas enveloppée dans la recherche manifeste d’une certaine condescendance financière. Son body-language a peut-être trahi sa pensée, mais certainement impacté négativement son message.

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