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Tunisie-Elections : Demain, on rase gratis!

Dans la France post médiévale, il y avait un barbier, qui ne se coupait point les cheveux en quatre pour se payer, au propre et au figuré, la tête de ses clients, avait mis à l’entrée de son échoppe une grande pancarte proclamant : « demain on rase gratis ». Mais l’artisan, pas totalement idiot et près de ses sous, l’y laissait tous les jours. Et celui qui venait le lendemain se faire raser devait quand même payer, car la pancarte affichait un éternel demain qui n’arrivait jamais.

Autant dire que les promesses n’engagent que ceux qui les écoutent. Et les politiques où qu’ils se trouvent et à quelque bord qu’ils appartiennent, en font un usage immodéré et toujours avec plus d’imagination et les boniments dont ils ont le secret.

Le processus des élections du 20 mars 2013 et les aléas qui continuent de s’y attacher fournissent un exemple tunisien et actualisé de cet exercice dont l’establishment politique a le monopole. Et pour cause, le chef du gouvernement, Hamadi Jebali a affirmé dernièrement, plus précisément le 16 juillet, devant une délégation du Conseil international du Forum social mondial, que les prochaines élections n’auront pas lieu, le 20 mars 2012, mais à une date ultérieure.

Que restait-il alors de l’affirmation péremptoire et sentencieuse faite auparavant par Mustapha Ben Jaafar, le président de l’Assemblée nationale constituante que le scrutin tant attendu aura bien lieu, le 20 mars 2012 ?

Par-delà cette cacophonie au sommet de l’Etat qui donne au monde une piètre et parfois risible image de la façon dont la chose publique est gérée en Tunisie, il ne faut pas être clerc en la matière pour comprendre que, pour Ennahdha, comme pour ses partenaires de la troïka, et plus particulièrement le CPR de Moncef Marzouki, les élections ne sont pas de l’ordre de leurs priorités. D’autant moins que, dès le départ, ils donnaient la nette impression pour la confirmer en chemin, qu’ils y sont à perpétuelle demeure, en tout cas, qu’ils ne se résoudraient à en appeler aux urnes qu’à la date la plus reculée possible. Le président provisoire de la République, Moncef Marzouki, n’avait-il pas parlé d’une échéance de 4 ou 5 ans, le temps que les institutions de l’Etat se mettent en place, et que les programmes des partis au pouvoir commencent à donner leurs fruits et permettre ainsi au peuple de les juger, expliquait-il doctement.

De fait, tout s’ordonne autour d’une échéance électorale qui soit bien ultérieure à la date censément « butoir » du 20 mars 2012. Le gouvernement ne montre aucun empressement à mettre en place le dispositif chargé de l’organisation et de la supervision des élections, une structure qui aurait la vocation qui a été celle de L’Instance supérieure indépendante pour les élections dont ci-devant président, Kamel Jendoubi, vient de mettre l’accent sur “la nécessité d’accélérer la publication d’un projet de loi relatif à l’ISIE qui fera l’objet d’une réunion et d’un consensus entre les différents partis et dans lequel la société civile jouera un rôle important pour faire réussir les prochaines échéances électorales ». Démarche qui a reçu le soutien appuyé du secrétaire général de l’UGTT Houcine Abbassi qui a souligné l’attachement de l’organisation syndicale à mettre en place une instance supérieure indépendante qui garantisse la réussite des prochaines élections, rappelant le projet avancé par les experts de l’UGTT et la Ligue Tunisienne des Droits de l’Homme (LTDH), ainsi que l’ordre national des avocats, qui a fait l’objet de concertations avec des experts du gouvernement, en vue d’élaborer un nouveau projet, actuellement en cours d’étude.

Dans tous les cas de figure, techniquement, il ne sera pas possible de préparer les prochaines élections pour la date prévu, soit le 20 mars 2013 », comme l’a affirmé le secrétaire général de l’Association Tunisienne pour l’Eveil Démocratique (ATED) qui a expliqué cette éventualité-devenue certitude-par « l’absence d’un document officiel permettant de clarifier les principales caractéristiques et l’architecture d’une instance indépendante chargée des élections à venir en Tunisie ».

Au demeurant, le flou maintenu sur la prochaine date des élections est perçu comme un signe supplémentaire d’inquiétude par nombre de composants de la société civile qui affirment que « au regard du décret qui a convoqué les élections de l’Assemblée constituante pour siéger pendant un an, cette assemblée, ainsi que le gouvernement qui en est sorti, seront le 23 octobre 2012, hors le cadre légal qui les a rendus possibles ». Et d’avertir que « la lenteur adoptée par la majorité islamiste ne voilera pas la rupture du contrat politique. Elle engendrera une perte de confiance et un accroissement des tensions dans le pays ».

Ce retard « programmé » dans l’organisation des élections est en train d’être étayé par un autre, celui de l’élaboration de la Constitution dont les travaux auraient dû être terminés, le 15 juillet 2012. Or, on ne voit rien venir, sauf cette déclaration du rapporteur de la commission selon laquelle « il n’y a pas le feu, et un retard, ce n’est pas une catastrophe ! ». Vraiment !

Mohamed Lahmar 

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