Très attendues, les conclusions de la 5ème Revue du Fonds monétaire international n’ont pas tout dit, en attendant que les autorités tunisiennes dont une délégation est à pied d’œuvre à Washington pour les réunions du printemps du FM, affinent leurs positions et disent leur dernier mot sur les efforts qui leur sont demandés.
Il n’en est pas moins noté par la mission du Fonds qui vient de se conclure en Tunisie que ces efforts pour soutenir la croissance en maîtrisant l’inflation et en stabilisant la dette publique commencent à porter leurs fruits, mais l’économie reste fragile. Au demeurant, le gouvernement tunisien est conscient des risques pesant sur l’économie et s’est engagé à limiter les déséquilibres budgétaires et extérieurs en cette année électorale.
Björn Rother, qui a dirigé cette mission, a souligné que les autorités tunisiennes «s’engagent résolument dans un programme politique visant à stabiliser et à réformer l’économie, en tenant compte de la situation sociopolitique tendue à l’approche des élections législatives et présidentielle qui auront lieu plus tard cette année ».
Une décimale de plus pour la croissance
«La Tunisie connaît une reprise modeste. La croissance passerait de 2,6% en 2018 à 2,7% en 2019, grâce aux bonnes performances de l’agriculture et des services, en particulier du tourisme. Néanmoins, l’activité économique continue de souffrir d’incertitudes politiques et économiques et de goulots d’étranglement structurels tels qu’un accès souvent insuffisant au financement. Ainsi, la croissance est restée insuffisante pour réduire le chômage, qui reste particulièrement élevé pour les jeunes et les femmes », indique une déclaration du chef de la mission du FMI qui évoque des « vulnérabilités macroéconomiques élevées menaçant toujours la stabilité économique ».
A l’actif des autorités tunisiennes, il est relevé un resserrement de la politique monétaire afin de contenir les pressions inflationnistes et une réduction notable du déficit budgétaire. Plus précisément, les mesures fiscales de 2018 et le renforcement de la collecte des taxes ont amélioré les revenus, tandis que les hausses du prix de l’énergie ont permis de contenir la croissance des subventions à l’énergie qui profitent principalement aux mieux nantis. Cela a permis d’accroître les dépenses consacrées aux investissements publics créateurs d’emplois et aux programmes sociaux, qui ont atteint respectivement 5,6% du PIB et 2,7% du PIB en 2018. De même, la couverture du programme national d’assistance aux familles vulnérables a été étendue (de 250 000 à 285 000 familles) et le niveau de ses prestations a été augmenté. En outre, les autorités améliorent l’accès aux soins médicaux pour les moins nantis et ont enregistré 600 000 ménages dans une base de données qui facilitera le ciblage des politiques sociales.
Le revers de la médaille
Cependant, le revers de la médaille, c’est que « des déséquilibres considérables continuent à entraver la croissance et le potentiel d’emploi de la Tunisie. La croissance reste trop dépendante de la consommation, tandis que l’investissement et les exportations restent insuffisamment dynamiques. Et les dettes extérieures et publiques croissantes de la Tunisie entraînent des besoins de financement importants et représentent un lourd fardeau pour les générations futures. Enfin, malgré un certain recul, l’inflation reste supérieure à 7%, menaçant le pouvoir d’achat, en particulier des plus vulnérables de la société ».
A la lumière de cet état des lieux, le FMI recommande de « maintenir le cap sur la réduction du déficit budgétaire, le renforcement des réserves internationales, le maintien d’une politique monétaire stricte et la suppression progressive de subventions énergétiques inéquitables tout en protégeant les ménages vulnérables est essentiel pour maintenir la stabilité économique et soutenir le processus de transition politique malgré des vulnérabilités macroéconomiques élevées ». Il souligne l’importance de « mieux maîtriser la masse salariale publique, qui figure parmi les plus élevées au monde en pourcentage du PIB, ce qui, précise-t-il contribuera à créer davantage d’espace pour les dépenses critiques consacrées aux ménages vulnérables, à l’éducation et à la santé.
« Les nouveaux défis extérieurs, notamment la volatilité des prix du pétrole, le ralentissement de la croissance dans les pays partenaires de l’UE et les retombées potentielles des conflits au sein de la région rendent encore plus urgents les progrès dans ce sens », affirme le chef de la mission du FMI qui insiste sur la nécessité d’une « nouvelle accélération des réformes structurelles, notamment pour améliorer la gouvernance et l’environnement des entreprises pour renforcer la confiance ».