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Tunisie : Qui a peur de Ben Ali et pourquoi ?

Force est de remarquer, presque 18 mois après la fuite du «Makhlouaa » ou président déchu, que le fantôme de Ben Ali rôde toujours dans tous les couloirs de la politique tunisienne, ceux de sa justice et dans tous les esprits d’une Tunisie qui n’a toujours pas fait son propre deuil de son geôlier et présente parfois même les symptômes du «syndrome de Stockholm». Quelques repères :

– Ben Ali, le diable à bannir de l’Eden.

Il y a quelques semaines, fleurissait l’idée chez des membres du CPR et d’Ennahdha, d’une loi qui incriminerait toute bonne chose dite sur les 23 dernières années. Pour les deux plus importantes composantes de la troïka, l’ancien président tunisien Z.B Ben Ali est le diable de 23 années d’enfer et il fallait le chasser de l’Eden qu’elles prépareraient pour la Tunisie. Dire, donc, qu’avec «Ben Ali c’était mieux», qu’il avait fait telle ou telle réalisation, politique ou économique, devrait être banni et pourquoi pas puni.

– Ben Ali, le bouc émissaire tout désigné.

Il y a quelques mois, lorsqu’éclatait en public la première théorie du complot, Ben Ali a été le coupable tout désigné de tout le mal que se font les Tunisiens, toutes composantes confondues. Tout cela était dit dans la confusion la plus totale, dans l’absence la plus totale aussi d’indices accusateurs clairs, de noms ou de faits vérifiés et vérifiables.

Il y a quelques semaines aussi, à la suite des dernières violences sur fond de la fameuse exposition du Palais Al Abdellia, Ben Ali était aussi mis, directement ou indirectement, derrière tous ces évènements douloureux où presque personne parmi tous dirigeants ne voulait citer le coupable dont ministère de l’Intérieur et celui de la Justice arrêtaient les partisans. L’absence de preuves, de noms, le refus de désigner nommément des coupables connus ou moins connus, fait peser, là aussi, le doute.

– Bouderbala voulait entendre Ben Ali. Le gouvernement a dit non !

Il y a quelques semaines, lorsque la première annonce du livre de la femme de l’ancien président tunisien, Leila Trabelsi, avait été faite, un ministre tunisien de l’équipe gouvernante, s’était élevé contre la volonté de le diffuser en Tunisie. La censure, pour un peuple qui est toujours à la recherche de la vérité dans ce qui s’était réellement passé, cette nuit du 14 janvier 2011, mettait ainsi fin à toute tentative, fut-elle erronée, tronquée ou simplement fausse, de laisser se manifester une autre vérité sur ces faits, que celle dite ou racontée par les vainqueurs du régime Ben Ali.

Dans un entretien publié il y a quelques 10 jours, par le quotidien tunisien de langue arabe Achourouk, le président de la commission d’enquête sur les dépassements sécuritaires, Taoufik Bouderbala a révélé deux choses. D’abord, le fait qu’il avait demandé l’autorisation d’aller en Arabie Saoudite pour entendre l’ancien président tunisien Ben Ali sur les faits qui lui sont reprochés notamment et sur tous les faits relatifs aux dépassements en matière de sécurité. Bouderbala indique que cela lui a été catégoriquement refusé. Là aussi, la volonté est manifeste des actuels dirigeants de la Tunisie de l’après Ben Ali d’interdire à tout un peuple d’entendre un autre son de cloche que celui qu’ils voulaient que le peuple entende.

– Ben Ali, dites-vous ?

Il nous semble, pourtant, important de dire et de rappeler que ce qui a été réalisé, durant les 23 dernières années et il y en a, ne l’a pas été par Ben Ali et encore moins de sa poche. Dire, en effet, que la Tunisie des 23 dernières années n’a rien réalisé, que les nouveaux dirigeants n’ont hérité que d’un pays vide et d’un pays dévasté, c’est, en fait, renier ce que TOUT UN PEUPLE a fait, par l’effort de ses cadres, et il n’y en avait pas que des corrompus, renier tous les sacrifices consentis par toutes les catégories socioprofessionnelles pour mettre de côté tout l’argent investi dans l’infrastructure, l’économie, les régions même de façon parfois très inégale, renier tous les sacrifices de tout un peuple pour que le pays puisse rembourser ses dettes extérieures, des dettes accordées par des instances internationales qui, à moins d’être aussi corrompues que lui, qui veillaient à ce que chaque dollar, Yen ou Euro, aille bien dans les projets pour lesquels ces crédits avaient été accordés. Ben Ali, dites-vous ? Les réalisations et les investissements ont été ceux de tout un pays, hommes, femmes, cadres et employés. Dire le contraire, c’est, à notre sens, insulter l’intelligence de 10 millions de Tunisiens !

– «Qui veut noyer son chien, l’accuse de rage» ou simplement «noyer le poisson» !

Il est, pour l’instant, impossible, de répondre avec une certitude sans faille que Ben Ali était derrière tous les malheurs qui frappent la Tunisie depuis sa fuite. Il est tout aussi impossible de jurer du contraire. Les cartes sont encore toutes brouillées en Tunisie et personne ne peut actuellement jurer de rien.

Ce dont toute la Tunisie [sauf Ennahdha] est sûre, c’est que rien ne va encore comme les Tunisiens l espéraient après leur Révolution, sur le plan économique surtout, ni d’ailleurs sur le plan de la sécurité en dents de scie et encore moins sur le plan politique où la transition s’étire trop pour une opposition qui se retrouve en dehors de tout alors que la Tunisie n’est qu’en période transitoire.

Dans le doute politique et l’incertitude économique qui devient pesante pour un peuple qui a désormais l’impatience de ses moyens financiers, le peuple a tendance à se retourner en arrière et à développer le syndrome de Stockholm. C’est, à notre sens, ce qui fait peur à Ennahdha et qui pousse toute la troïka à diaboliser le passé de 23 ans, en espérant que le syndrome de Stockholm changera de trajectoire et de cible.

Dans cette attente, est-il politiquement, d’abord plausible, ensuite politiquement honnête, pour Ennahdha et le reste de la troïka, de jeter la responsabilité de tout ce qu’ils ne réussissent pas sur le dos des autres, à la limite indépendamment du fait qu’il soit Ben Ali, le RCD ou leurs suppôts ?

Ennahdha et sa troïka voudraient noyer le chien, en l’accusant de rage ou noyer le poisson, que leurs desseins sont découverts !

De là, cependant, à aller jusqu’à incriminer ceux qui oseraient parler des bienfaits des 23 dernières années, il y a un pas que même les Libyens n’ont pas osé franchir après avoir, comme Ennahdha et le CPR, voulu mettre en place une telle loi. Ben Ali interdisait lui aussi qu’on parle de Bourguiba. Le Bourguibisme lui a pourtant survécu et menace même son successeur !

Khaled Boumiza

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