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Une démocratie fragile en Tunisie

La démocratie tunisienne est à un tournant. Bien que les Tunisiens soient désormais libres de choisir leurs dirigeants, qu’ils aient organisé de nombreuses élections et qu’ils puissent critiquer ouvertement le gouvernement, les rêves du soulèvement ne se sont toujours pas exaucés dix ans plus tard, car les inégalités, le chômage et la médiocrité des services persistent.

Malgré un parcours démocratique encourageant, l’économie a stagné, la corruption reste un problème grave et les dirigeants politiques sont profondément divisés, paralysés dans la prise de décisions qui pourraient améliorer la vie d’une population de plus en plus aliénée et apathique. La Tunisie continue d’être affligée des mêmes fissures qui ont déclenché la révolution, ce qui est inquiétant, déplore « The Hill », le site web basé à Washington, axé sur l’actualité du Congrès. De la Présidence et des campagnes électorales.

Des questions subsistent notamment sur la capacité du gouvernement à fournir « les biens » au public. Malgré un ambitieux plan de décentralisation susceptible d’améliorer la prestation des services et de renforcer la gouvernance locale, peu de choses ont été accomplies à court terme sur ce front, ce qui rend difficile de mettre en évidence les progrès réalisés, non seulement en matière de délégation de pouvoir, mais aussi de distribution plus équitable des ressources ou de prise de décision locale, qui sont au cœur des divisions de la Tunisie. Et les gens sont en colère à ce sujet.

La confiance des citoyens dans l’establishment politique est au plus bas, 87 % des Tunisiens estimant que le pays est sur la mauvaise voie. (Il s’agit d’une augmentation de 20 % par rapport à la période précédant les élections de 2019, et les Tunisiens les plus pessimistes se prononcent sur la direction de leur pays depuis 2011). L’électorat reste profondément mécontent des partis au pouvoir. Interrogés sur les principales réalisations du gouvernement national en 2020, 75 % des Tunisiens ont déclaré qu’il n’avait « rien accompli » et plus de 50 % souhaitent voir de nouveaux partis politiques lors des prochaines élections.

Les Tunisiens en peine de joindre les deux bouts

Ils reprochent aux partis de ne pas avoir résolu les problèmes d’exclusion socio-économique profonde, d’inégalités régionales, de chômage élevé, de corruption et de dette croissante dans le sillage de COVID-19. Alors que le taux de chômage devrait atteindre 20 % – celui des jeunes plafonnant à 37 % (soit plus qu’en 2010) – l’économie reste une priorité absolue pour les Tunisiens qui sont de plus en plus incapables de joindre les deux bouts.

En 2020, la Tunisie a connu son déficit budgétaire le plus élevé depuis 40 ans en raison d’une augmentation des dépenses de 4 milliards de dollars en réponse à la crise sanitaire générée par la pandémie. Le PIB tunisien devrait avoir diminué de 8 % en 2020 en raison de la crise du Covid-19. Et la politique reste divisée avec un président, Kais Saied, qui n’est lié ni à un parti ni à une majorité parlementaire, et dont l’efficacité est minée par des luttes intestines et des divisions politiques, notamment des rivalités croissantes avec Rached Ghannouchi, chef du mouvement Ennahdha.

La démission de l’ancien chef du gouvernement Elyès Fakhfakh suite à des allégations de corruption, la nomination du son successeur Hichem Mechichi et la manière dont le nouveau gouvernement a été formé, ainsi que le clivage ouvert entre le parlement et le président, ont exacerbé les tensions. L’attrait croissant de personnalités populistes contre-révolutionnaires indique qu’une faille critique et plus existentielle s’est installée, signalant un changement potentiel dans la façon de faire de la politique en Tunisie.

Frustration galopante

L’un des plus grands échecs du gouvernement a été de s’attaquer aux problèmes qui réclament encore l’attention, à savoir les inégalités régionales persistantes. En effet, la frustration se répand dans le Sud et le Centre, le bassin minier des phosphates en particulier, où les manifestants continuent de réclamer des emplois et des investissements dans la région. La suspension de la production de gaz, de pétrole et de phosphate qui en résulte a paralysé l’économie. Les régions intérieures ont été durement touchées par la pandémie, qui a aggravé et approfondi la fracture entre la côte et l’intérieur. Cette même marginalisation interne a été l’un des principaux moteurs de la révolution de 2011. Négligée, cette dynamique risque de perpétuer l’instabilité et de créer de nouveaux troubles.

La démocratie est encore fragile en Tunisie et les défis sont importants. Le chef du gouvernement  Mechichi doit gérer les tensions entre la présidence et le Parlement. L’anarchie parlementaire s’accroît, tout comme la désaffection des citoyens pour le gouvernement. Aujourd’hui, seuls 41 % des Tunisiens estiment que la démocratie est la meilleure forme de gouvernement possible pour la Tunisie, tandis que 50 % pensent que d’autres formes de gouvernement pourraient être ou sont meilleures que la démocratie. Sans s’attaquer à cette rupture, la Tunisie risque de s’engager, pour la première fois en dix ans d’existence démocratique, dans une voie de non-retour, prévoit « The Hill ».

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