AccueilLa UNETunisie : Belhaj Hmida gagnera tous ses combats, Khedher y a veillé

Tunisie : Belhaj Hmida gagnera tous ses combats, Khedher y a veillé

« La meilleure Constitution du monde« , se targuaient certains, dont des concepteurs de ce texte fondamental, très avant-gardiste à bien des égards, il faut le reconnaitre, mais encore faut-il que les citoyens soient en mesure de le digérer. Le problème quand on monte le niveau, quand on fait mieux que les autres ou quand on le prétend, c’est qu’il faut avoir les moyens de suivre dans la durée, la certitude d’avoir l’adhésion de la majorité. Bref, il faut soi-même être à la hauteur et s’assurer que les autres le sont, sinon il y a un gros problème de cohérence et de conformité avec les principaux censés régenter l’ordre social. Quand les rédacteurs de la Constitution – les députés – se sont enfermés à l’Assemblée Nationale Constituante pour pondre ce texte, ils ont mis le paquet pour faire le tour de toutes les problématiques d’une société qui découvrait soudainement l’ivresse de la liberté, de la démocratie. Et quand ils ont livré leur produit, ils pensaient, très sincèrement, avoir fait le meilleur travail possible, dans les circonstances particulières du pays entre 2011 et 2014. Ils ne s’attendaient certainement pas à la montagne de problèmes qui allait surgir après.

Le souci quand on veut brasser large, quand on veut que les droits de tous soient respectés, c’est qu’on finit par édicter des principes qui s’entrechoquent, se contredisent. Il est difficile de l’éviter pour autant, car c’est cela le corollaire d’une société où la chape de plomb saute brutalement, violemment. Alors on a pensé qu’il était bon, après maintes contorsions et débats enflammés, de mettre dans le même texte la protection du sacré (grosso modo l’Islam, notre patrimoine commun) et la liberté de culte, ou la liberté de conscience. Les rédacteurs de la Constitution avaient raison, ils ne pouvaient pas protéger le sacré et laisser en rade ceux qui ne s’y reconnaissaient pas, et c’est leur droit. Ce qu’ils ne pouvaient pas anticiper c’est la difficulté à faire coexister les deux réalités, dans une société dont la toile de fond est sa religion, l’Islam, que personne, même les plus antireligieux, n’avait osé contester publiquement, et encore moins transgresser. Maintenant ils osent, au nom justement de cette Constitution qui accorde la liberté de croire ou de ne pas croire. Et ça c’est une difficulté nouvelle pour la Tunisie, à laquelle elle n’était pas préparée et pour laquelle elle n’a pas de réponse…

Le visage de la Tunisie que les Tunisiens ne veulent pas voir

La violence des attaques contre les membres de la Commission des libertés individuelles et de l’égalité (Colibe), notamment sa présidente, Bochra Belhaj Hmida, jusqu’à des accusations de mécréance, est la parfaite illustration des contradictions dans lesquelles est prise une société qui a fait le choix de la modernité et qui freine en même temps des quatre fers face au vertige de sa liberté. La Colibe avait été mandatée par le président de la République pour proposer un corpus de grandes réformes en rapport avec les libertés individuelles et l’égalité, comme le stipulent les dispositions de la Constitution, les normes internationales des droits de l’Homme et les orientations de toutes les nations dites modernes. Cette Constitution qui, rappelons-le, avait été concoctée par les islamistes, et qui en est arrivée, selon certains, à bafouer certains préceptes de l’Islam. L’égalité totale dans l’héritage entre l’homme et la femme, l’égalité entre les enfants légitimes et naturels, l’égalité dans l’attribution de la nationalité et le choix du nom de famille, la fin de la peine de mort et l’incrimination de l’appel au suicide sont les propositions majeures faites par le rapport. Plus que ne peut en supporter les traditionalistes, qui prédisent l’enfer du Seigneur à Bochra Belhaj Hmida et compagnie. La mauvaise nouvelle pour les anti-Colibe, c’est que ces propositions ont la Constitution de leur côté…

Ils n’ont pas les moyens de leur indignation

La présidente de la Colibe, sous le feu des critiques, avait déclaré récemment que son rapport colle parfaitement aux conventions internationales ratifiées par la Tunisie et tire sa source des principes et valeurs clairement inscrits dans la Constitution de 2014. Et elle n’a pas tort. C’est d’ailleurs à cause de ces mêmes conventions, que la Tunisie a goulument signées mais qu’elle n’applique pas avec la même célérité, que les autorités s’étaient fait tirer les oreilles à Genève pas le Haut-Commissariat des Nations Unies aux Droits de l’Homme. La Tunisie non seulement a signé un paquet de conventions, en plus elle a aggravé son cas en dépendant, plus que jamais, de l’aide étrangère pour continuer sa route. Quand l’Arabie saoudite, la Russie, la Chine, les USA ou Israël foulent au pied les droits de l’Homme ou les conventions internationales, elles sont certes dénoncées, critiquées, mais c’est à peu près tout. On ne peut, dans les faits, rien leur faire. La Tunisie est loin de pouvoir en dire autant. Ceux qui s’en prennent à la Colibe et à tout ce qui bouge dans le sens de la liberté et de l’égalité mènent un combat d’arrière-garde, perdu depuis belle lurette. C’est une question de temps avant que cette réalité saute à la face de tous. Habib Khedher, du mouvement Ennahdha, qui était à la tête du comité mixte de coordination et de rédaction de la Constitution, pourrait le leur expliquer…

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