AccueilLa UNECe que je crois : Le mensonge d’Ennahdha et les scénarios possibles

Ce que je crois : Le mensonge d’Ennahdha et les scénarios possibles

C’est le mercredi 23 octobre 2019, à deux jours de la fin du mandat temporaire de Mohamed Ennaceur, que le chef d’Etat nouvellement élu Kais Saïed, a prêté serment et juré qu’il va exercer son office de président de la République.

Il devra attendre la proclamation, définitive et officielle, des résultats des Législatives, et cela risque de s’allonger, l’ISIE ayant décidé de former recours contre la décision du tribunal administratif de restituer à l’islamiste extrémiste Saïd Jaziri son siège à l’ARP. Cela, sans oublier le énième retournement de ces élections, par l’annulation des résultats de la circonscription d’Allemagne. Officiellement, on évoque la date de fin novembre, comme délai de réunion de la nouvelle ARP.

Mais d’ores et déjà, le nouveau chef de l’Etat aura une semaine, à partir du début de son investiture, pour charger Ennahdha de former le nouveau gouvernement. Le marchandage au souk des ministres a déjà commencé chez le parti islamiste tunisien, qui prend soin d’annoncer à tous les partis que le fauteuil de chef de gouvernement sera sa chasse gardée.

–          Possibles 107 contre 110, si …

Faisons le décompte, avant d’aller plus loin, du véritable poids d’Ennahdha dans ce marchandage au souk des ministres, pour ne pas dire des sinistres. D’ores et déjà, le PDL d’Abir Moussi, Tahya Tounes qu’Ennahdha essaie encore de mouiller malgré le refus maintes fois confirmé de Salim Azzabi, le Courant Démocrate de Mohamed & Samia Abbou, le Mouvement Echaab de Zouheir Maghzaoui, et Qalb Tounes de Nabil Karoui qu’Ennahdha a déjà exclu de fait, ont tous refusé de contribuer à un gouvernement formé par Ennahdha et de accoquiner avec le parti islamiste tunisien.

De fait, ces 5 partis de la future opposition, représenteront 107 sièges. Une majorité qui pourrait, si elle tenait sa parole et ses positions, écraser le parti Ennahdha et l’empêcher de former tout gouvernement.

Rached Ghannouchi qui, comme le caméléon, lorgne à la fois du côté du perchoir du Bardo et du fauteuil de la Kasbah, et son parti qui, comme un perroquet parle les dialectes de tous les partis, connaissent parfaitement les chiffres de cette imparfaite équation.

Ghannouchi et les siens profèrent donc un double mensonge. D’abord en faisant croire qu’ils négocient avec tout le monde, alors qu’ils ont déjà exclu Qalb Tounes et qu’ils ont été toujours exclus par le PDL. Ensuite en faisant croire qu’ils formeront un gouvernement, alors qu’ils savent que même s’ils proposaient un chef de gouvernement Nahdhaoui, les chances qu’il soit voté sont presque nulles. Avec cette nouvelle cartographie de l’ARP, il devient presque sûr que les cinq partis de l’opposition pousseront vers le «Plan B», celui d’un chef de gouvernement qui serait chargé par le chef de l’Etat de former son gouvernement. Une alternative qui risquerait, elle aussi, de demander du temps pour se mettre en place.

–          Ce que disent les «Saïedophiles», ce que dit la Constitution, et le «Plan C » de KS

Du côté de la nouvelle présidence de la République, qui reste toujours aussi muette qu’une carpe, les «Saïedophiles» et tous ceux qui parlent au nom du chef de l’Etat pour ne pas l’impliquer, ont changé leur fusil d’épaule. Ils n’évoquent plus une possible dissolution de l’ARP, mais désormais la possibilité que le chef de l’Etat «nomme» le chef du gouvernement.

Rappelons à ce sujet, que l’article 89 de la Constitution stipule que «le Président de la République charge le candidat du parti politique ou de la coalition électorale ayant obtenu le plus grand nombre de sièges au sein de l’Assemblée des représentants du peuple, de former le gouvernement dans un délai d’un mois pouvant être prorogé une seule fois. En cas d’égalité du nombre des sièges, la nomination s’effectue selon le nombre de voix obtenues. Si le délai indiqué expire sans parvenir à la formation d’un gouvernement, ou si la confiance de l’Assemblée des représentants du peuple n’est pas accordée, le Président de la République engage des consultations dans un délai de dix jours avec les partis politiques, les coalitions et les groupes parlementaires, en vue de charger la personnalité jugée la plus apte, en vue de former un gouvernement dans un délai maximum d’un mois».

–          Le pas improbable plan de la constitution du gouvernement, dès le 1er essai

A aucun moment donc, il n’est question de nomination directe. Par contre, le nouveau chef de l’Etat avait lui-même évoqué la possibilité de dissoudre l’ARP, en cas de mésententes répétées, sur le gouvernement et son chef. Cela est possible, si les propositions d’Ennahdha échouent à deux reprises, comme le stipule l’article 89, où le chef de l’Etat se charge lui-même de proposer un chef de gouvernement, choisi sur la base de sa compétence.

On se retrouverait alors face à une sorte de «plan C», qui pourrait faire peur à toutes les composantes actuelles de l’ARP. Il n’est pas en effet sûr que l’électeur tunisien donne de nouveau leurs chances aux partis qui avaient remporté les dernières législatives, et appliquera de nouveau la stratégie du dégagisme.

Reste l’autre scénario. C’est celui d’une opposition qui ferait exprès de voter le gouvernement d’Ennahdha, sans y participer, pour mettre le parti islamiste en contact, direct et exclusif, avec le feu du pouvoir, qui ne peut que «détruire» Ennahdha, au vu des choix, économiques et financiers, cornéliens et que personne ne maîtrise et qui est, soit de continuer les réformes, socialement et économiquement douloureuses, soit d’opter pour une politique d’austérité, tout aussi dévastatrice.

–          En attendant, personne n’ose parler économie, et possible Shutdown

«En attendant Godot», personne parmi la classe politique, prochaine dirigeante ou dans l’ opposition, n’a à aucun moment parlé des défis, économiques et financiers, qu’il aura à gérer et que redoute tout le pays. Le budget 2020 et sa loi des finances, seront très probablement présentés, par un gouvernement sortant, devant une ARP sortante.

Le pays manque pourtant de fonds, rien que pour clôturer ce budget 2020. L’investissement dans le pays est en état d’attente. L’emploi aussi. Mais encore l’administration qui devra payer ses fournisseurs, et les entreprises impayées, pour payer les salaires de leurs employés. Et même le taux de change de la monnaie locale, qui bougera en fonction de l’orientation que prendra la crise politique et financière. Des sources généralement très bien informées, évoquent de plus en plus le risque d’un Shutdown à l’américaine et d’un possible manque d’argent pour payer les salaires des fonctionnaires et des retraités. De tout cela, personne ne parle et ne veut pour l’instant pas parler, laissant le pays comme un bateau, encore ivre de la réussite de ses élections que tous érigent comme un monument jamais conçu ailleurs dans le monde, mais à la dérive des querelles de la crise politique en cours.

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