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Coup de gueule, Live, de Fakhfakh. Circulez, il n’y a rien à voir ? Pas si sûr !

« C’est quoi cette histoire qu’on fabrique ? Moi je suis en guerre, ou dois-je gérer les futilités qui sont en train d’être racontées ? ». C’est ainsi, dans un accès de colère, de révolte et de réprimande, que répondait hier soir le chef du gouvernement en Live TV à la polémique déclenchée par le comportement de son ministre de l’Industrie, dans l’affaire des 2.000 masques médicaux. Le ministre Mohamed Abbou avait répondu de la même manière, lorsqu’interrogé sur l’affaire de la voiture du ministre du Transport. Il avait ensuite dit avoir diligenté enquête, comme pour l’affaire des masques. Mais il n’a, depuis, rien dit sur l’évolution de la première, et s’était retranché derrière le secret de l’instruction pour l’affaire des masques.

  • L’affaire des masques : Une futilité selon Fakhfakh

La dernière « futilité », comme l’a appelée le chef du gouvernement, est pourtant de taille. Un ministre, dans un Etat de droit et de respect des lois et des règlements, prend contact direct avec un industriel du textile, parmi 40 autres selon Elyes Fakhfakh lui-même, pour lui commander la fabrication de deux millions de masques. L’industriel est, de surcroît, député interdit de faire affaire avec l’Etat, responsable au sein de la structure professionnelle du secteur patronal du textile, et membre de la commission chargée d’élaborer le cahier des charges spécifique à ce marché. Des éléments qui devraient en principe le mettre hors course. Des éléments, tous confirmés par le juge Mohamed Ayadi, éminent juriste du Conseil de la concurrence et de l’Instance chargée de la lutte contre la corruption. Et cette dernière de persister et de signer dans cette affaire des masques, dans un communiqué rendu public ce lundi 20 avril 2020, en invoquant les articles 10, 11, 15, 125, et 130 de la constitution, qui auraient été violés dans l’affaire dite de la fabrication des masques. Mais aussi la loi organique du 26 mai 2014, relative aux élections. Manière de répondre à Fakhfakh que l’affaire est loin d’être futile.

  • Défense, bec et ongles, mais non totalement justifiée, de Salah Ben Youssef

Contre tous ces éléments, factuels, que le ministre de l’Industrie n’a pas niés, sauf en disant qu’il n’était pas au courant, le chef du gouvernement, lui, trouve excuse et fait même de cette excuse un droit acquis par les nouveaux pouvoirs obtenus par le vote de l’ARP. « Il s’agit de gens, de partout, qui font l’effort de trouver des solutions (…). C’est ce qui est demandé au responsable, et non d’attendre et prêter attention à ce qui se dit (…). Nous, on anticipe et c’est de notre responsabilité. Ce qui se dit est soit des gens qui pèchent en eau trouble, soit des gens qui ne comprennent pas la conjoncture ou ne comprennent pas l’Etat. Ce faisant, nous mettons le pays à l’arrêt », dit encore le chef du gouvernement, en pointant un doigt accusateur.

Le chef du gouvernement a peut-être raison, et l’urgence Corona pourrait expliquer ce qu’a fait son ministre. Il reste, cependant, à se demander si cela pourrait aller jusqu’à bafouer toutes les règles et lois du pays. Loin de nous l’idée de donner des leçons à quiconque, mais l’Etat c’est aussi ses lois. On pourrait certes, dans de telles circonstances exceptionnelles, les contourner. Mais cela aussi, devra se faire par la loi. Le chef du gouvernement aurait pourtant pu éviter toute cette polémique qu’il relance par son dernier coup de gueule, où il défendait gauchement, et en colère, son ministre qui a pourtant fauté.

Force est encore de se demander pourquoi se mettre dans une telle position d’opposition avec les lois en vigueur, alors que les nouvelles prérogatives qui lui ont été données par l’ARP comprenant la possibilité de légiférer par décret-loi, le lui permettent.

L’article 1er de la loi l’autorisant à agir par décret-loi, comprenait en effet la possibilité de « prendre des mesures exceptionnelles, concernant les achats publics, en relation avec la lutte contre le Coronavirus ». Pourquoi n’avait-il pas alors pris le décret-loi qui le lui permettait, ce qui lui aurait évité un tel coup de colère contre une administration, pourtant pierre angulaire de tout process de gouvernance ?

  • Défense, plus molle, d’Abdellatif Mekki et du chef de l’Etat

Il pouvait aussi annuler la TVA sur les masques sanitaires, afin de les rendre à la portée de toutes les bourses, les Tunisiens étant désormais obligés de les porter. Le volet financier et fiscal, en relation avec les personnes et entreprises touchées par le Coronavirus, faisait aussi partie des domaines de compétence de ses décrets-lois, tels que définis par l’ARP dans la loi numéro 19 de l’année 2020.

Il est donc un fait qu’en l’absence de décret-loi suspendant, par exemple, les procédures conventionnelles pour les achats publics, le ministre de l’Industrie aurait manifestement fauté, tout comme son chef qui le défendrait à tort, et ferait de ce coup de gueule un simple coup de théâtre politique, incongru et inutile !

Elyes Fakhfakh a été, cependant, quelque peu laxiste lorsqu’il avait été interrogé sur le comportement, non respectueux des gestes barrières contre le Coronavirus, lors de son déplacement à Sousse. Il a été ensuite assez coulant, et on le comprendrait, sur le geste du chef de l’Etat qui cassait le couvre-feu et distribuait des aides en pleine nuit, lorsqu’il avait été interrogé par le journaliste à ce propos. Un chef d’Etat aurait-il le droit de piétiner les lois par le simple fait de son statut ? Tous les hommes ne seraient-ils plus égaux devant la loi ?

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1 COMMENTAIRE

  1. Si à chaque fois qu’un membre de son gouvernement fera une « connerie » et même plus, il devra le défendre « bec et ongles », ça donne pas beaucoup de gages pour la probité, le sérieux et la conformité républicaine des actions futures de ce même gouvernement.

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